Sur le principe, je trouve que c’est une initiative qui est intéressante. Pour une des rares fois, des ministres du gouvernement vont se présenter devant des étudiants de l’Ecole Nationale d’Administration afin de leur parler du PND (que l’on croyait déjà mort) et de la feuille de route du gouvernement.
L’initiative me paraît intéressante pour ce simple fait que la pauvreté de notre pays se justifie plus par le manque criard de l’activité intellectuelle qui devrait permettre le partage des connaissances et ainsi enrichir convenablement les citoyens.
A cela s’ajoute l’étouffement de la pensée critique par l’entretien délibéré d’une sorte chape de plomb sur un certain nombre de citoyens; ce qui par voie de fait, tue le principe fondamental de la transmission de la connaissance et même, des valeurs citoyennes essentielles sur lesquelles, une société qui nourrit l’ambition d’assumer sa mue progressive vers l’évolution, doit travailler.
Les ministres du gouvernement s’enferment dans leur bureau douillet, ne s’ouvrant à la presse que lorsque le besoin se fait sentir d’éteindre un feu qui a pris dans leur département. Et là encore, la charge est très souvent laissée juste au porte-parolat du gouvernement qui, même s’il est éloquent, reconnaissons-le, n’est pas forcément spécialiste de tous les sujets et ne peut non plus répondre des actes que pose un ministre dans son département.
Or l’idéal aurait été que chaque ministre, par moment, accorde à volonté des interviews aux médias de la place ou fasse une conférence de presse pour rendre compte de ses activités, des différentes initiatives et du niveau de leur mise en œuvre et se laisse réellement à toutes les formes possibles de questions afin d’assouvir au mieux le besoin d’information du peuple. En l’absence d’une telle disponibilité des dirigeants à rendre naturellement et spontanément compte de ce qu’ils font au peuple, l’on a le regrettable sentiment que notre société se déstructure dangereusement et chaque citoyen évolue comme il l’entend, sans aucune dynamique unitaire, sans un idéal commun à atteindre.
Cela dit, le fait que quatre ministres sortent de leurs bureaux pour aller à la rencontre des étudiants semble être un bon début, mais qui doit pouvoir aller au-delà. Il faut bien que notre élite dirigeante s’affranchisse du carcan politique pour assumer clairement et dignement son intellectualité, en organisant par exemple, des conférences en lien avec leur spécialité, leur formation professionnelle, les faits de société, les enjeux du moment.
A l’occasion, un partage efficient de connaissances sera fait avec les citoyens et c’est précisément cela qui crée la communion entre les dirigeants et les dirigés et rassure le peuple que ceux qui les dirigent sont effectivement des hommes et femmes, avec leurs forces et faiblesses, mais disposés à apprendre aussi des autres. C’est aussi par là que les citoyens ainsi édifiés sur un certains nombre de sujets liés aux enjeux de l’heure, savent leur part de responsabilité dans le processus de construction de nos nations. Pourquoi très peu de ceux qui nous dirigent écrivent de livres sur leurs expériences par exemple?
En tout cas, après donc l’ENA, nous attendons nos ministres sur d’autres fronts, non pas politiques ou propagandistes, mais purement intellectuels, car le besoin de nourrir les âmes des citoyens avec des connaissances enrichissantes afin de les rendre compétents à à se prononcer en connaissance de cause sur certains sujets est là, entier!
Luc Abaki