UNIR/comme un air de précampagne : Opération zéro cataracte, participation aux funérailles, dons…

Le régime est-il déjà en campagne pour les prochaines échéances électorales ? Ça en a tout l’air. Depuis plusieurs mois, le RPT/UNIR intensifie la propagande en faveur de Faure Gnassingbé. Lors de la campagne Zéro cataracte, il a été demandé aux populations de se rappeler du chef de l’Etat quand viendra le moment des élections. En plus, il serait demandé aux militants, cadres de leurs localités, de participer aux funérailles afin de s’attirer la sympathie des populations.  

Le 14 mars de cette année, le gouvernement a lancé l’opération « Zéro Cataracte ». Une initiative dite présidentielle qui vise à opérer gratuitement les personnes souffrant de cette forme de cécité très répandue au Togo. Cette campagne démarrée dans la région des Savanes, s’est poursuivie dans les autres régions du pays et continue actuellement dans la Maritime. « Des milliers de personnes souffrant de cette maladie ont déjà bénéficié gratuitement des consultations de dépistage des pathologies oculaires ou des troubles de vision, des actions de chirurgie, de verres médicaux et des produits pharmaceutiques notamment les collyres. En avril déjà, cette opération foraine a permis de consulter près de 11 600 patients pour lesquels, il est prévu 3000 opérations de cataracte au lieu des 800 initialement attendus », écrit la Présidence de la République. Il est indiqué qu’à terme, plus de dix mille (10.000) personnes souffrant de cataracte seront opérées, et au moins 20.000 verres médicaux confectionnés sur place, seront offerts aux populations.

La présidence de la République parle de l’adhésion des populations à cette initiative. Une adhésion qui démontrerait « l’efficacité de la politique socio-sanitaire du chef de l’Etat et de l’importance capitale qu’il accorde au bien-être des populations ». On remarque déjà que l’initiative dévie vers la propagande alors que la campagne, jusqu’à preuve du contraire, n’est pas financée par les fonds propres du chef de l’Etat. C’est le pays qui vient en aide à ses populations envers lesquelles il a des obligations. Ce n’est donc pas une faveur.

Il y a quelques jours, le site internet du parti au pouvoir publiait un article sur l’opération Zéro cataracte en y dévoilant « la joie » des populations bénéficiaires. Mais ce qui atteste qu’il s’agit bel et bien d’une opération de propagande, c’est que dans l’article, il est écrit que l’initiative est un « don personnel du Distingué Militant Faure Essozimna Gnassingbé ». C’était à la mi-août, lorsque l’opération était arrivée dans la préfecture de Vo. Et un entretien avec le secrétaire préfectoral du parti a été publié. L’interviewé y déclare : «Cette opération Zéro Cataracte me donne deux sentiments, un sentiment de joie et un deuxième sentiment de reconnaissance. Sentiment de joie, parce que nous avons une difficulté que plusieurs de nos concitoyens rencontrent dans nos villages, dans nos localités (…) Sentiment de reconnaissance envers le Distingué Militant Faure Essozimna Gnassingbé qui a initié cette opération».

Comme un air de précampagne

Il faut aussi le dire, ces propos publiés par le site du parti UNIR sont loin de ce qui se dit dans les villages lors des échanges avec les personnes venues se faire consulter. Il est sans cesse répété aux candidats à cette opération que c’est une initiative personnelle de Faure Gnassingbé. C’est bien de le mentionner, mais on ne peut pas en faire un slogan. « Quand nous sommes arrivés au lieu où doit se tenir les opérations, ils nous rassemblent pour nous entretenir sur l’initiative. Ils ont parlé, mais ce qui m’a surpris, c’est qu’à la fin, ils nous demandent de nous rappeler que c’est un geste du chef de l’Etat. Que nous ne devons pas oublier cela et quand il va nous tendre la main, nous devons lui répondre favorablement en disant : « Quand quelqu’un te fait du bien et qu’il te sollicite, tu dois lui répondre favorablement ». Dès qu’ils ont fini de parler, je me suis levé et je suis rentré chez moi », rapporte une dame.

« Quand ils sont venus chez nous, ils ont tout fait pour que nous nous sentions redevables à Faure Gnassingbé. Son nom a été cité à plusieurs reprises dans les interventions. J’ai remarqué ça surtout dans les interventions des responsables du parti dans notre localité. C’est vrai que c’est une initiative venant de sa part parce qu’au Togo, les ministres n’initient rien si ce n’est sur son instruction personnelle, mais à voir comment on entretient les populations, on a l’impression qu’ils sont en campagne. C’est comme si les gens doivent se sentir redevables au chef de l’Etat », s’indigne une autre source.

C’est le mal du Togo. Chaque fois qu’il y a une initiative à l’endroit des populations, on s’en sert comme une occasion de propagande et de campagne électorale. Cela a été observé dans le cadre de la mise en œuvre du Fonds national de la finance inclusive (FNFI). Au lancement du premier produit de ce projet en 2014, il a été dit aux femmes que c’est un don du chef de l’Etat, et qu’après sa victoire à l’élection présidentielle qui allait suivre quelques mois après, en 2015, elles ne seront plus appelées à rembourser. Autrement dit, si elles accordaient leurs votes à Faure Gnassingbé, leur ardoise serait effacée. Après la présidentielle de 2015, Faure Gnassingbé a « gagné », mais les dames qui ont cru en cette promesse ont été obligées de rembourser le prêt ; ou de séjourner en prison.

Sur un autre terrain, le parti au pouvoir mène déjà campagne, chaque militant dans sa localité d’origine. L’usage de la couleur bleue serait vivement recommandé par les instances du parti UNIR. C’est ce qui transparait dans l’aspect des infrastructures réalisées dans les localités et peintes aux couleurs du parti. Même lors des funérailles, les chaises utilisées doivent être de couleur bleue. L’autre système mis en place pour rallier les populations à la cause du parti, c’est la participation aux funérailles. Selon des informations, il serait conseillé à chaque cadre de participer activement aux différentes funérailles qui ont lieu dans son village et de faire des cadeaux aux familles. Histoire de pouvoir demander le retour de l’ascenseur quand viendra le moment de mettre les bulletins dans les urnes.

Au final, le citoyen togolais n’a plus de droit, mais des droits accompagnés de devoir. Une population atteinte de cataracte devrait interpeller tout dirigeant qui ne devrait pas en faire un fonds de campagne. Lorsqu’on est à court d’initiatives comme c’est le cas au Togo, rien d’étonnant.

Géraud A.

Source : Liberté

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