Lieux privilégiés pour découvrir et se procurer des œuvres, les galeries d’art s’ouvrent aussi à des objets à caractère religieux ou culturels. La Galerie Found in Africa à Lomé, au Togo, incarne cette intimité entre l’art et la religion.
À Lomé, la Galerie « Found in Africa» – trouvés en Afrique — représente une porte d’entrée dans l’art africain à partir d’une riche collection. A Tokoin-Trésor, dans la capitale togolaise, cette galerie ambitionne de réunir l’art africain dans une villa qui accueille le visiteur à travers un rideau de cauris suspendus par des fils. Un premier signe ? Le cauris étant non seulement un symbole d’art qui sert à créer des bijoux ou d’économie pour avoir servi de monnaie dans le passé, mais aussi un symbole de croyances religieuses.
Et pourtant point de panique chez le visiteur. C’est bel et bien une maison d’art, chez Souleyman Mflam, un passionné qui collectionne des œuvres de plusieurs régions d’Afrique. Son parcours en dit assez. Originaire du département du Noun à l’ouest du Cameroun, « une cité où le travail de l’art se transmet de père en fils », Souleyman a déposé ses valises au Togo il y a vingt-sept ans. Et s’y est installé.
« La religion et l’art sont imbriqués »
Depuis trente ans ce galeriste respire l’art et collecte des objets et des personnages sculptés à caractère purement artistique et parfois en relation avec les croyances des peuples et pays dont ils proviennent, notamment du Cameroun, Burkina Faso, Gabon, Ghana, Mali, Nigeria, Tchad, Togo, etc. Une collection rassemblée sans doute au gré de la providence, mais aussi à la faveur des inspirations d’un passionné d’art et de Dieu.
« La religion et l’art sont imbriqués, tellement il est difficile de les séparer. Je ne peux pas les dissocier, car pour moi, il n’y a pas de religion sans art », déclare ce croyant à La Croix Africa. En effet, Souleyman est musulman et « ne trouve pas d’incompatibilité entre l’art et la religion » : « je suis un musulman pratiquant, ça ne m’empêche pas d’être galeriste, d’aimer l’art et de vendre des objets d’arts. »
« Lors de mes collectes, précise-t-il, je rencontre des gens qui veulent détruire des objets ayant trait à la spiritualité, je leur défends de le faire ». Pour lui, ces objets constituent un patrimoine qu’il faut préserver à tout prix, plaide-t-il, tout en faisant remarquer leurs diversités : chez les chrétiens catholiques, il y a la croix, la statue de la Vierge Marie, tandis que chez les adeptes du vaudou, il y a des statuettes représentant des divinités.
Des œuvres d’art qui évoquent la spiritualité
Dans cette galerie, l’on trouve les sculptures « Djenné » du Mali qu’on utilise pour implorer la pluie, des objets funéraires du Ghana, des objets commémoratifs chez les Bamiléké du Cameroun, ou encore la sculpture « Ajere ifa » chez les Yoruba, les statuettes de jumeaux ewe du Togo, mais aussi, d’anciennes cuillères, valises, mallettes, des armoires et des lits d’une époque lointaine. « J’ai une collection d’œuvres et objets divers qui évoquent la spiritualité mais qui ne sont pas forcément des objets de cultes », explique cet artiste qui confesse prier « Dieu cinq fois par jour comme recommandé par l’islam et ça n’a rien contre les objets collectionnés ».
Curieusement, « en 2023, j’ai proposé un sculpteur togolais à des Tunisiens rencontrés au Ghana et il est allé en Tunisie leur sculpter les portes d’une église ; mais ce même artiste sculpte aussi souvent des portes de mosquée », évoque ce galeriste.
africa.la-croix.com