De plus en plus fréquemment, nos villes sont submergées par les eaux de pluie. Chaque fois, le même scénario : les averses s’abattent, les caniveaux débordent, et les habitations se retrouvent dans l’eau. Le phénomène s’intensifie, mais les citoyens n’ont que deux choses à faire : filmer les sinistres pour les partager sur TikTok et attendre les mots de réconfort d’un ministre venu constater les dégâts.
Les vidéos qui prolifèrent sur les réseaux sociaux (souvent accompagnées de messages de détresse ou de critiques à l’égard des autorités) sensibilisent certes un large public, mais elles ne sont qu’un exutoire et ne changent rien à la réalité, exactement comme les autorités qui envoient des représentants pour exprimer leur compassion et faire des promesses.
Les inondations sont révélatrices d’une gestion inefficace, car pendant que nous nous noyons, les routes, les caniveaux et autres infrastructures urbaines continuent d’être construits selon les mêmes techniques, avec les mêmes dimensions et avec les mêmes entreprises d’amis qui ont montré leur incompétence et malhonnêteté.
Des experts paralysés par la politique de la peur
Le pays regorge pourtant d’ingénieurs, de climatologues, de pédologues, d’architectes, d’urbanistes, mais la capacité de ceux-ci à se réunir pour chercher des solutions reste limitée. Le climat politique constamment étouffant semble avoir imprégné les esprits au point que beaucoup considèrent l’engagement citoyen comme risquant, voire interdit. La peur de s’impliquer paralyse les initiatives, et les spécialistes préfèrent rester silencieux pour ne pas être perçus comme des opposants ou des gens ayant des ambitions politiques.
La politique a pris une place incroyable (si ce n’est toute la place !) dans tous les domaines de la vie sociale au Togo, surtout après l’épisode Atchadam Tikpi en 2017. Toute action collective (lorsqu’elle ne vient pas du parti au pouvoir) est perçue comme une menace. Seules les initiatives conformes aux directives d’UNIR sont tolérées, laissant peu de place à l’innovation. Alors le pays stagne, incapable de faire face aux défis de notre temps.
Les changements climatiques imposent une adaptation des infrastructures aux nouvelles réalités. Pour y arriver, il faut malheureusement d’abord libérer les énergies et les compétences paralysées par la peur, en dépolitisant la vie sociale.
N’djo
Source : Journal Sika’a