A-t-on le droit de sacrifier un peuple au nom d’intérêts géostratégiques ? La chute du tyran sanguinaire Bachar al-Assad en syrie, le 7 décembre 2024, donne lieu à des analyses contradictoires sur la toile et au sein de l’opinion publique. Nous précisons que ces analyses, sans malices, se veulent toutes, dans l’ensemble, un soutien au peuple syrien martyr.
Les arguments contre la fuite du boucher de Damas: sur le plan géostratégique, la fuite d’Assad va ouvrir un boulevard de crimes à Israël, va renforcer l’emprise impérialiste des Américains, affaiblir la Russie dans sa politique sahélienne de soutien aux régimes militaires, etc. Bref, il y aura un bouleversement politique régional et un foutoir en Syrie comme en Lybie, au Soudan où des chefs de guerre imposent leur prédation impitoyable.
Quittons la Syrie pour un questionnement qui concerne l’humain et la pratique de la politique. Au nom de la raison politique, les dirigeants et les idéologues justifient tout et le contraire de tout pour des intérêts plus ou moins sordides, voire crapuleux. Souvent, la notion d’intérêt national se réduit à un fourre-tout opportuniste et mystificateur. Dans la plupart des cas, elle est liée au sort d’un individu par rapport à son maintien au pouvoir.
On ne peut sacrifier des peuples aux jeux criminels de domination des puissances mondiales impérialistes pour lesquelles les peuples se confondent avec de simples pions sur la mappemonde. Les dirigeants des pays dominés, quant à eux, ne sont, bien souvent, que des larbins aux ordres de ces puissances. Eux aussi sacrifient facilement leurs peuples pour leurs intérêts personnels et criminels.
Dans tous les cas, les peuples opprimés sont victimes de la géostratégie des maîtres du monde et de leurs larbins sous-développés. Par conséquent, nous voulons en venir au fait que, avant les calculs politiques, il y a la liberté des peuples à défendre sous des dictatures abominables. Qu’un peuple soit libéré d’un régime sanguinaire est toujours une bonne chose dont il faut se réjouir. Mettons-nous à la place de ces peuples brisés par la terreur.
En Afrique, tous les pays ont connu ce chemin de croix et le vivent encore pour certains, comme au Togo. Alors pourquoi vouloir mettre un vent de liberté (même provisoire) entre parenthèses ? Même si les motivations de la géostratégie sont parfois louables et peuvent profiter aux peuples pris en otage, rien ne peut justifier de maintenir un peuple dans les fers pour des calculs politiciens. Tous les peuples méritent de jouir des droits humains. Et cette liberté qui fonde leur humanité ne peut, en aucun cas, être soumise à des impératifs de géostratégie. La liberté est une conquête permanente et la politique ne doit pas se soustraire à la morale et aux valeurs.
Ayayi Togoata APÉDO-AMAH