Togo- 20 ans de gouvernance : La SEET interpelle Faure Gnassingbé sur le désespoir de la jeunesse

Dans une lettre ouverte adressée au chef de l’État, Faure Gnassingbé, la Synergie des Élèves et Étudiants du Togo (SEET) dresse un bilan critique des vingt (20) années de son régime. Elle dénonce une gouvernance qualifiée de “machiavélique”, accusée de compromettre l’avenir de la jeunesse togolaise. Enfin, la SEET appelle le chef de l’État à restituer le pouvoir au peuple souverain au cours de cette année. Lisez!

LETTRE OUVERTE AU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE SUR L’AVENIR COMPROMIS DE LA JEUNESSE.

Objet : Qu’avez-vous vous fait du Togo, jadis l’or de l’humanité ?

Excellence Monsieur le Président de la République,

« L’avenir de notre pays dépend de l’éducation et de l’engagement de notre jeunesse. Ce n’est qu’en leur donnant les outils nécessaires pour comprendre le monde et y participer activement que nous pourrons construire une nation forte et prospère. » Sylvanus OLYMPIO, Premier Président de la République du Togo, père de l’Indépendance et de la Nation.

Au nom de la jeunesse désillusionnée et abandonnée par une gouvernance qui n’a cessé de trahir ses promesses et ses responsabilités, d’une jeunesse qui assiste impuissante à l’évaporation de ses rêves et qui voit le pays sombrer sous le poids de votre gestion calamiteuse depuis bientôt 20 ans, nous vous adressons le présent courrier en ce début d’année pour vous exprimer notre position sur vos vingt années de gouvernance. Il est grand temps que vous soyez confronté à la réalité de la souffrance que vous principalement, avez contribué à engendrer.

1. Au plan éducatif :

L’année écoulée a été marquée par une chute vertigineuse du niveau scolaire et universitaire. Le pays se retrouve avec une génération d’élèves et d’étudiants qui échouent en masse, car le système éducatif est en ruines. Vous avez entretenu une lente agonie de nos écoles et universités, privant nos jeunes de l’opportunité d’un avenir meilleur. L’inflation, la précarité grandissante et les conditions de vie insupportables ont transformé l’étudiant togolais en une victime désespérée, prisonnière d’un système qui n’offre que du vide et pas d’opportunités d’épanouissement. Les jeunes aujourd’hui, qui vivent dans des conditions inacceptables, demain, feront face à un pays dévasté par une gouvernance corrompue, parce que vous avez échoué à leur offrir un avenir digne. Ils sont condamnés à vivre la même misère que leurs parents, et vous n’avez même pas le courage de leur offrir des solutions.

Si après vingt ans de gouvernance, vous peinez à équiper les laboratoires scientifiques et de langues, nous ne savons ce que vous pouvez encore dire aux togolais, Monsieur le Président. D’ailleurs, où en êtes-vous avec la promesse des trois milliards de transfert monétaire aux parents d’élèves ? N’est-il pas temps de revaloriser les bourses et allocations des étudiants afin que ceux-ci puissent vivre dignement et étudier ?

2.  Au plan socio-économique :

Sous votre gestion, le pays est sous tension, et cela ne fait que s’aggraver. Le pouvoir d’achat des Togolais s’effondre chaque jour davantage, les jeunes sont privés d’emplois, et la pauvreté est devenue la norme pour une majorité de nos concitoyens, avec les énormes charges fiscales qui pèsent sur le dos des débrouillards. Pendant ce temps, vous et votre cercle de proches êtes dans des voyages dont les togolais ne savent la nécessité ni la valeur ajoutée, des voyages pourtant effectués au frais du contribuable. Pendant que les autres pays voisins s’efforcent pour faire face à la mutation sociale et économique, vous vous êtes engagés à brader les biens du Togo aux étrangers : le port de Lomé, les phosphates, les banques, la téléphonie mobile pour ne citer que ceux-là. Où en sommes-nous, Monsieur le Président, avec votre projet baptisé « Les 20 plus » et brandi en 2005 quand vous preniez le pouvoir ? Était-ce plutôt un aveu de votre désir de faire plus de 20 ans au pouvoir ?

 Le nord du pays est en proie à l’insécurité, et le mutisme de votre gouvernement à ce sujet frôle l’indifférence d’un État qui ne dispose pas de solutions. L’inaction du gouvernement face à ces problèmes ne fait que détruire les chances de ceux qui croyaient encore en un avenir meilleur.

3. Au plan politique :

Le changement constitutionnel que vous avez opéré dans la clandestinité sans consulter la population par référendum, est la preuve de votre mépris pour la démocratie et pour la souveraineté du peuple. Vous avez bafoué les principes les plus élémentaires de la Constitution, votre seul souci étant de mourir au pouvoir comme votre feu père.

La SEET se demande ce que vous gagnez quand vos compatriotes meurent en détention pour avoir exprimé leur opinion sur votre gouvernance catastrophique. Votre conscience ne vous interpelle-t-elle pas quand vous vous retrouvez à la conférence des chefs d’État et de gouvernement de la CEDEAO alors que vous refusez d’exécuter les décisions de la cour de justice de cette institution sous-régionale ?

 La répression et l’arbitraire sont devenus la norme sous votre règne. Il est grand temps que la gouvernance machiavélique s’arrête au Togo. Que vous arrêtiez de transformer notre justice en un instrument de conservation du pouvoir et de répression des peuples. Que la chasse aux journalistes indépendants s’arrête et que chaque citoyen soit heureux d’appartenir à sa société.

4. Sur le plan international : un panafricanisme de façade qui ridiculise le Togo.

Quant à votre panafricanisme que vous et votre ministre des Affaires étrangères ne cessez de brandir, il ne sert qu’à camoufler votre échec notoire et votre gestion désastreuse du pays. Il est facile de se draper dans les beaux discours panafricains pendant que votre gouvernement précipite le Togo dans un abîme d’injustice, de corruption, de népotisme, de clientélisme et de mal gouvernance. Vous ne pouvez pas nous vendre ce rêve démagogique, Monsieur le Président, tant que les Togolais ne verront pas de changements tangibles dans leur vie quotidienne. Qu’avez-vous fait d’innovant pour le Togo, depuis les deux dernières décennies ? Comme l’Éternel à la création du monde, êtes-vous heureux de vous, quand une passerelle piétonne s’écroule et tue presque une dizaine de vos concitoyens ? Quand à chaque fin d’année, les marchés brûlent, emportant les maigres acquis économiques de pauvres citoyens ? À quand la déclaration de vos biens ? Le Togo est-il devenu votre propriété privée ?

5. L’histoire et le peuple n’oublient jamais.

Nous tenons à rappeler une fois de plus, que les Togolais qui n’étaient pas encore nés en 2005, lorsque vous avez pris le pouvoir, sont aujourd’hui à l’université. Ils ont vu leurs parents se battre pour leur permettre d’étudier, pour leur offrir un avenir. Malheureusement, ils ont eu le malheur d’avoir connu un Président de la République qui n’a qu’une seule équation à résoudre : « comment faire pour mourir au pouvoir ». Et aujourd’hui, à cause de votre gestion calamiteuse du pouvoir d’État, ces jeunes n’ont aucun espoir de faire mieux que leurs parents. Ils n’ont aucune perspective d’avenir dans un pays où la corruption, l’impunité et l’injustice ont pris racine à tous les niveaux.

Monsieur le Président, il est temps de rendre des comptes. Au lieu de continuer à détruire l’avenir de notre jeunesse, à nous servir des discours déconnectés de la réalité du quotidien du togolais comme le dernier en date, nous vous invitons à vous rendre dans les universités publiques du pays, à rencontrer les étudiants, la future élite, à écouter leurs avis sur votre gestion et à leur permettre de vous confronter à la réalité de votre gouvernance pendant ces vingt (20) dernières années. Ce pays mérite mieux que la maltraitance systématique que vous lui infligez. À la fin de votre mandat en cette année 2025, la SEET vous propose de rendre le pouvoir au peuple et d’abandonner le projet tentaculaire de la 5eme République que vous avez de la peine à gérer. Elle vous prie également de discipliner vos proches qui se livrent à l’utilisation de miliciens pour s’en prendre aux journalistes et leaders d’opinion.

Monsieur le Président, si nous avons un conseil pour vous c’est de savoir partir, car tout fini par finir.

Espérant que vous donnerez suite à nos questions sur votre gouvernance, nous implorons Dieu de toucher votre conscience pour libérer le pouvoir au peuple souverain en cette année.

Le Président National,

Bertin BANDIANGOU

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