Togo / Arnaque à la pompe à essence: Une gangrène à plusieurs facettes

Payer quelques litres de carburant ou faire le plein au Togo peut parfois réserver de mauvaises surprises. Certaines stations-service cherchent à profiter des automobilistes. Des pompes truquées aux pompistes malhonnêtes, les pièges se multiplient. Depuis quelques années, les automobilistes dénoncent le phénomène. Mais l’Agence togolaise de métrologie (ATOMET), structure étatique chargée de la vérification des instruments de mesure, s’est toujours montrée très laxiste jusqu’à la semaine dernière où une descente de ses agents a permis la découverte de la fraude. Visiblement, ce n’est que la partie visible de l’iceberg.

Vous pensez faire un plein correct, mais vous repartez avec moins que prévu. Oui, certaines pompes malhonnêtes créent artificiellement une erreur de carburant et distribuent moins de carburant que ce qui est indiqué. C’est une arnaque discrète, mais redoutable. La pratique existe depuis plusieurs années, et permet à de nombreuses stations de faire beaucoup d’argent sur le dos des automobilistes qui très souvent ne remarquent la fraude. « Dans nombre de stations, les pompistes vendent de l’air. Tu paies le même litre de carburant, mais la distance parcourue varie », a confié Messan, un conducteur de taxi-moto qui a souligné que certains de ces collègues ont aussi fait l’expérience.

L’ATOMET se réveille de son sommeil

Depuis de nombreuses années, c’est ce que les Togolais propriétaires d’engins vivent dans les stations. Malgré les dénonciations, l’ATOMET, structure technique de la Haute autorité de la qualité et de l’environnement (HAUQE), en charge de la conformité des instruments de mesure, restait dans un silence étonnant. En mars 2024, alors que les voix s’élevaient encore, cet organisme s’est limité à une simple rencontre d’échanges avec les responsables de stations.

« Actuellement, plusieurs vidéos circulent sur les réseaux sociaux incriminant certaines stations services par rapport aux agissements de ces agents. Comme vous le savez, la main d’œuvre que les stations-services emploient, notamment, les pompistes qui, influencent grandement sur le résultat de mesure. Face à cette situation, les autorités nous ont instruit de tenir cette rencontre d’information et de sensibilisation sur le respect de la réglementation en matière de métrologie », déclarait laconiquement Laré Arzouma Botré, Président de la HAUQE à la fin des échanges qui n’ont servi à rien. Puisque les fraudes continuent de plus belle.

Il y a quelques jours, dans une vidéo devenue virale sur les réseaux sociaux, un consommateur affirme avoir été servi près de 30 litres de carburant alors que son bidon ne peut en contenir que 25 litres. Cet incident, survenu dans une station visiblement affiliée à TotalEnergies a soulevé une nouvelle vague de dénonciation. Le mouvement Martin Luther King (MMLK) se saisi de l’affaire et interpelle les autorités.

« Des informations persistantes font état de pratiques douteuses employées par certains pompistes dans les stations-service, visant à réduire discrètement la quantité de carburant réellement servie aux consommateurs. Bien que le nombre de litres affiché sur les pompes semble correspondre à la quantité demandée, de nombreux usagers constatent que leurs réservoirs ne se remplissent pas comme prévu », a souligné dans un communiqué datant du 03 mars 2025, l’organisation dirigée par Pasteur Edoh Komi. « Le MMLK exige également que des contrôles rigoureux et réguliers soient effectués par les structures en charge de la régulation du secteur pétrolier afin de mettre un terme définitif à ces irrégularités »,a-t-elle ajouté.

C’est alors que l’ATOMET se décide à sortir de sa profonde léthargie intrigante face à une situation de violation flagrante du droit des consommateurs. Lors d’une descente effectuée le 11 mars, 2 distributeurs ont été identifiés comme non conformes. Ce qui conforte les soupçons et les dénonciations des consommateurs. Normalement, après les constatations, l’ATOMET doit infliger une sanction à ces stations. En effet, le non-respect des dispositions des textes réglementaires de métrologie entraine des sanctions pénales. Ces sanctions sont constituées des amendes allant jusqu’à dix millions de francs CFA et ou des peines d’emprisonnement allant jusqu’à deux ans (Article 35 et 36 de la loi sur la métrologie légale). Mais rien n’a été dit jusqu’à présent, alors que ces stations devraient servir d’exemple pour faire la dissuasion. Surtout que la fraude à la pompe à essence est loin d’être concentrée uniquement à Lomé.

Un phénomène national

Cette pratique frauduleuse savamment élaborée par les stations concerne toute l’étendue du territoire national. En effet, certains Togolais dénoncent une arnaque généralisée dans les stations-service. Il est donc impératif que des agents soient déployés dans l’ensemble du pays pour effectuer des contrôles. Nul doute que d’autres stations de mauvaise foi seront épinglés.

« Dans ce Togo où les conducteurs d’engins à moteurs triment pour s’acheter du carburant cher, certaines stations-services se plaisent à les arnaquer en ne donnant pas la juste mesure du prix payé. On achète 10.000 FCFA de carburant, ça ne fait même pas 20 km et le réservoir indique déjà la réserve. Pourquoi peut-on être si cruel ? Pourquoi trafiquer les compteurs ou les indicateurs de litres de carburant pour gruger les gens ? L’ATOMET l’organe de contrôle et de régulation ne doit pas s’arrêter à seulement 11 stations d’essence à Lomé, mais faire le tour de toutes les stations dans la capitale et à l’intérieur du pays pour s’assurer que le consommateur a la juste valeur du prix qu’il a payé à la pompe », fulmine un analyste.

En dehors des stations-services, l’ATOMET devraient également se plancher sur les instruments de mesure, les balances et autres utilisés dans les poissonneries, les supermarchés, les marchés, les revendeurs de gaz domestiques. Car l’arnaque à l’unité de mesure est bien présente dans de nombreux secteurs. Il est temps pour l’ATOMET de mettre sur la place la liste de tous ces établissements ou entreprises qui grugent les pauvres populations.

Lemy Egblongbéli

Source: lecorrecteur.tg

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