Dans une lettre adressée au président de la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH), la Coalition de la Diaspora Togolaise pour l’Alternance et la Démocratie (CODITOGO) condamne vigoureusement les actes de torture perpétrés lors des manifestations du 6 juin 2025 à Lomé. Elle interpelle l’institution sur son inaction face à des violations graves et récurrentes des droits humains, et appelle à un sursaut de responsabilité.
La Coalition de la Diaspora Togolaise pour L’Alternance et la Démocratie (CODITOGO)
LETTRE OUVERTE À
Maître Lionel Didi Ohini Kwao SANVEE,
Président de la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH)
Objet : CODITOGO condamne vigoureusement la barbarie primitive exercée par les forces de la police politique du régime de Faure GNASSINGBE sur des manifestants arrêtés lors de la manifestation du 6 Juin 2025 à Lomé et le silence coupable de la CNDH.
Monsieur le Président,
La Coalition de la Diaspora Togolaise pour l’Alternance et la Démocratie (CODITOGO) suit avec indignation et inquiétude la recrudescence de la pratique systématique des actes de torture et autres formes de traitements cruels, inhumains ou dégradants exercés sur les citoyennes et les citoyens interpellés lors des manifestations pacifiques publiques au Togo. Coutumières dans l’usage de telles pratiques qu’elles ont d’ailleurs érigées en mode de gouvernement, les autorités togolaises s’en délectent ostensiblement à travers leur police politique, malgré le caractère hautement abject de tels actes qui en fait un crime imprescriptible, et les dénonciations constantes dont elles font l’objet de la part des organisations de défense des droits de l’Homme.
Le rubicond a été franchi dans le cadre des arrestations intervenues lors des manifestations publiques pacifiques du 06 juin 2025 à Lomé : des victimes au nombre desquelles se trouvent des femmes qui racontent et témoignent, dans un sentiment de froid glacial, avoir été l’objet, de la part des forces de l’ordre, de bastonnades, d’actes humiliants et avilissants, engendrant des souffrances physiques et morales à la limite du supportable, dans le but de leur faire dire ce qui n’est pas, de les punir, de les intimider, de les décourager, de faire pression sur elles…, toutes choses qui répondent bien aux critères pris en compte par les articles 1er de la convention des Nations Unies contre la torture du 10 décembre 1984 (ratifiée par le Togo le 18 novembre 1987 !) et 198 et suivants du Code pénal togolais. Diantre ! Quel corps habillé a le droit de commettre ces supplices sur des femmes ? A-t-il une maman ? A-t-il une femme dans sa vie? Enfin, fait-il tout cela pour protéger un régime moribond dont le dictateur, le moment venu, le jettera en pâture à la vindicte populaire ? C’EST INACCEPTABLE !
CODITOGO dénonce et condamne fermement ces pratiques barbares, moyenâgeuses, rétrogrades, attentatoires aux sacro-saints principes de dignité et d’inviolabilité de la personne humaine. CODITOGO interpelle avec véhémence la CNDH qui a en charge le Mécanisme National de Prévention de la Torture (MNPT) et assure de ce fait la mission de prévention de la torture et d’autres formes de traitements cruels, inhumains ou dégradants, au sens des article 3, 4 et 6 de la Loi Organique N°2018-006 du 20 juin 2018 relative à la composition, à l’organisation et au fonctionnement de la Commission nationale des droits de l’Homme (CNDH), légèrement modifiée le 3 août 2021.
Il est, très sidérant, voire inquiétant, que la CNDH, une institution qui se veut indépendante, soit restée jusque-là silencieuse sur des cas constants et avérés d’actes de torture, alors que la Cour de Justice de la CEDEAO a, à plusieurs reprises, condamné l’État du Togo pour de tels actes dans plusieurs affaires.
Les décisions de condamnations d’actes de torture de cette haute juridiction communautaire ont fait l’objet d’une documentation et ont été transmises, sur sa demande, à la CNDH par l’Association des victimes de la torture au Togo (ASVITTO). Qu’en fait la CNDH ? Cette attitude de la CNDH contraste négativement avec la recommandation faite dans son rapport d’activité 2023 à l’endroit du gouvernement de revoir à la hausse le montant de la subvention allouée à la Commission pour lui permettre de doter le MNP (Mécanisme National de la Prévention de la torture) d’un budget autonome ; alors que les citoyens, qui alimentent les caisses de l’État, sont constamment victimes d’actes de torture, sans que cette CNDH n’agisse et ne réagisse comme il le faut.
CODITOGO tient à rappeler en outre qu’au-delà du fait que l’article 6 de la Loi Organique N°2018-006 du 20 juin 2018 ci-dessus citée lui confère des prérogatives les plus étendues2, la CNDH dispose d’autres pouvoirs réels qui sont le siège des articles 22 à 30 de la même loi. L’article 27 particulièrement, dispose que « Lorsque la sous-commission prévention de la torture a connaissance de faits laissant présumer l’existence d’une infraction pénale, elle les signale immédiatement à la Commission qui, sans délai, les porte à la connaissance du procureur de la République compétent ».
À ce jour, malgré la récurrence et la recrudescence d’actes de torture et les autres formes de traitements cruels, inhumains ou dégradants, non seulement décriés mais condamnés par la juridiction communautaire de la CEDEAO, CODITOGO n’a pas connaissance que la CNDH ait actionné les prérogatives que lui reconnaît cette disposition, faisant le lit à l’impunité des infractions le plus graves. TOUT EST DONC QUESTION DE VOLONTÉ ET DE COURAGE ! À cet effet, le bureau actuel de la CNDH doit tirer l’exemple de certains bureaux précédents, notamment ceux des Bâtonniers Yaovi AGBOYIBO (1987-1990) et Ahlonko DOVI (1990-1992) et du Juge Koffi KOUNTE (2006- 2012).
CODITOGO se tient disponible pour toute information complémentaire. Tout en vous priant de croire en l’assurance de sa considération distinguée, elle espère grandement un sursaut du bureau actuel de la CNDH pour être à la hauteur de sa mission.
Fait à Paris, le 18 juin 2025
Pour CODITOGO,
Raphaël GBADOE Coordinateur général.
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