«…Ils s´accrochent au pouvoir parce qu´ils ont volé, tué, pillé et profitent injustement de privilèges qu´ils n´auraient jamais dû mériter s´ils ne contrôlaient pas le pouvoir. Leur hantise, c´est non seulement de rendre compte de leurs forfaits, mais aussi et surtout de vivre sans ce pouvoir, qui est leur seul moyen d´exister. Un assemblage hétéroclite de flagorneurs, larbins, paresseux et jouissseurs recrutés ça et là sur toute l´étendue du territoire, sur la base de leur soumission totale et aveugle au dictateur sans lequel ils étaient voués aux gémonies, manque de personnalité, incompétence et un fort penchant pour l´accumulation des biens matériels et un désintérêt pour la cause commune…» Junior Zogo, CamerounWeb, 09 octobre 2017
Cet extrait d´un article trouvé sur un site camerounais pourrait bien avoir été écrit par un Togolais ou par un observateur étranger, bien informé sur le Togo, pour décrire la dramatique situation politique qui y prévaut depuis plus d´un demi-siécle, et peindre le caractère anti-peuple des profiteurs de l´ordre dictatorial. Ils sont nombreux ceux qui ont décidé de prendre en otage tout un peuple et d´hypothéquer pour longtemps l´avenir de plusieurs générations. Et dans ce monde fermé, constitué de courtisans et autres zélés autour du dictateur, il existe peu de courageux encore en possession d´un coeur pour la souffrance de leurs concitoyens, pour oser lever le petit doigt et dénoncer. Et c´est ce que Madame Marguérite Gnakadé, une cacique du système, ayant servi à plusieurs niveaux autour du pouvoir, une proche, sinon une très proche du prince aujourd´hui contesté, a décidé de faire, en donnant un coup de pied dans la fourmilière.
En effet, Marguérite Gnakadé, après avoir écrit, depuis plusieurs mois, des tribunes pour dénoncer la mauvaise gouvernance faite de corruption endémique, de massives violations des droits de l´homme, le tout couronné par une totale impunité, s´est adressée aux Togolais le 17 août dernier pour la première fois par vidéo. «…Depuis la diffusion de mes tribunes, certains disent que je m’exprime par amertume ou par frustration. D’autres doutent de mes actions et, pensent que je ne peux pas vouloir d’une sincère unité, ou du changement. Je sais ce que cela peut représenter dans l’imaginaire collectif…. Pourquoi devrais-je me taire, au motif de mes origines ethniques, de mes liens familiaux ou parce que j’ai été ministre et sous prétexte d’avoir bénéficié du système? Garder le silence face aux dérives que j’ai constatées quand j’étais dans le gouvernement serait trahir les valeurs qui me sont chères et qui constituent mes repères de vie. Ce serait renier ma conscience. Ce serait trahir le peuple togolais.» Comme elle le dit, il est parfois difficile de comprendre certains de nos compatriotes qui disent vouloir le changement et en même temps raisonner comme s´ils souhaitaient le maintien de l´ordre ancien. D´un côté, nous accusons les membres de l´entourage du dictateur d´être très méchants, égoïstes et peu courageux pour pouvoir voir la souffrance du peuple et dénoncer la mauvaise gouvernance pour que les choses changent positivement. De l´autre côté, ce sont les mêmes compatriotes, heureusement pas très nombreux, qui émettent des réserves infondées quand quelqu´une du sérail, comme Madame Gnakadé, prend son courage à deux mains pour dénoncer la mauvaise gouvernance de Faure Gnassingbé, nonobstant les risques réels qu´elle encourt pour sa sécurité.
Nous avons toujours relevé le fait que le dictateur, hier Éyadéma, aujourd´hui Faure Gnassingbé, aussi cruel soit-il, ne peut à lui tout seul, pendant des années, voire des décennies, sans un entourage complice et véreux, conduire le Togo dans la dramatique situation socio-politique que tout le monde connaît. C´est pourquoi nous pensons qu´à travers ses tribunes, depuis plusieurs mois, et tout dernièrement son adresse aux Togolais par vidéo, Marguérite Gnakadé prend beaucoup de risques en faisant ce que beaucoup, au sein de ce cercle de malheur autour du pouvoir, refusent de faire pour soulager le peuple et mettre fin à ses souffrances. Et nous ne sommes pas si naïfs pour ne pas comprendre que parmi nos compatriotes qui doutent de la sincérité de Marguérite Gnakadé, il y en a beaucoup qui combattent ses idées au profit de Faure Gnassingbé.
Et ce n´est pas l´éternel ministre Gilbert Bawara qui applaudirait les sorties, ô combien courageuses, de son ancienne collègue au gouvernement. Pour lui qui y aurait beaucoup à perdre, comme d´ailleurs pour tout ce petit monde obscur autour de Faure Gnassingbé, habitué au vol, au mensonge, au crime et à tous les vices qui tirent chaque jour le Togo vers le bas, Marguérite Gnakadé est désormais une «traître» à abattre. C´est pourquoi tous les démocrates togolais devraient se tenir comme un seul homme derrière «la dame de fer» pour que rien ne lui arrive; car nous savons tous de quoi ce régime, d´Éyadéma à Faure Gnassingbé, est capable, quant au sort réservé à tous ceux qui pensent autrement et cherchent le bonheur du peuple togolais.
Qui a oublié le sort réservé à Agbéyomé Kodjo et à Dahuku Péré, aujourd´hui disparus? Les deux personnalités furent présidents de l´assemblée nationale du Togo; eurent le courage de dénoncer la gouvernance de l´opprobre et de réclamer une réforme du système. Ce que Gnassingbé Éyadéma considéra comme un crime de lèse-majesté. Aujourd´hui, bien consciente du danger qui pourrait s´abattre sur elle de la part de ses anciens alliés, Marguérite Gnakadé ose là où beaucoup se taisent pour leurs intérêts personnels. C’est pourquoi elle a d’autant plus besoin de notre soutien que les stupides considérations ethnico-tribales ont encore la vie dure dans notre pays, hélas!
Samari Tchadjobo
Allemagne
Marguérite Gnakadé: une leçon de courage et de patriotisme à un entourage véreux d´un pouvoir aux abois
