Légitimation de l’existence des milices au Togo; une humiliation et un désaveu de l’armée officielle par Faure Gnassingbé

«La situation des miliciens en République Démocratique du Congo (RDC) est marquée par la présence de groupes armés rebelles et d´autodéfense. Les miliciens, souvent utilisés dans des conflits armés, peuvent être responsables de crimes contre l´humanité et de destabilisation des institutions. Les groupes comme les maï- maï Yakutumba et les Wazalendo illustrent les conséquences dramatiques de l´usage de ces milices. Les sanctions internationales et les réformes nécessaires sont essentielles pour construire une paix durable et protéger les populations civiles.» (rtcm-rdc-com)

Comme le montre cet extrait d´un site en RDC concernant l´existence et l´utilisation des miliciens dans ce pays d´Afrique Centrale en guerre, un tel très dangereux et condamnable phénomène n´existe justement et malheureusement que dans des pays en conflit. Au Togo, bien que les ravages socio-humains, causés depuis au moins plus de trois décennies par le fait d´une gouvernance criminelle et prédatrice pour son propre peuple, soient incommensurables, nous ne sommes pas en guerre. Heureusement, pourrait-on être tenté de dire, espérant que dans une telle situation de non-guerre, il y aurait une chance théorique que les citoyens togolais soient à l´abri de la terreur et de la barbarie des miliciens. Mais malheureusement le calvaire, dû au fait du régime de dictature Gnassingbé de père en fils, que vivent les Togolais depuis très longtemps, ne serait pas parfait s´il n y avait pas utilisation des milices, de surcroît, tribales, pour réprimer la plus grande partie de la population aspirant à la liberté et à la démocratie.

En effet, au début de la démocratisation en 1990, 1991, la préfecture de la Kozah ressemblait à un état dans un état où les miliciens, recrutés par le pouvoir d´alors, faisaient la chasse à l´opposition. Qui a oublié cette époque où Monsieur Akrima Kogoé, ancien directeur-adjoint à l’enseignement du troisième dégré, plus tard directeur général à la SALT, s’était autoproclamé préfet de la Kozah, après que la préfet, Madame Gazaro Wêrê, nommée par le premier gouvernement de transition du premier ministre Joseph Kokou Koffigoh, fût renvoyée sur son instigation et sur celle d’un certain Sogoyou Kéguéwé? Et en tant que témoin oculaire, nous avons déjà eu l´occasion de rappeler:  «En 1991, après la conférence nationale et en notre qualité de reporter à la TVT, nous accompagnâmes avec notre équipe une délégation du Haut Conseil de la République (HCR), parlement de transition, pour une tournée de sensibilisation dans le nord du pays. Si la délégation n’eut aucun problème pour tenir ses meetings à Sokodé, Bafilo, Mango, Dapaong et Cinkassé…, il ne fut pas possible pour les Hauts Conseillers de la République de délivrer leur message du renouveau démocratique aux populations de Kara. L’ancien journaliste à Radio-Kara, le chef-activiste pro-RPT et pro-Éyadéma, Monsieur Sogoyou Kéguéwé et ses miliciens y veillaient au grain.»

Autre exemple; qui a déjà oublié ce camp retranché au quartier Adéwi à Lomé, interdit d´accès à certains Togolais? Et ce n´est pas notre jeune frère et ami Joseph Takéli, vivant aujourd´hui aux USA avec sa famille, qui nous démentirait. Lui qui avait échappé in extremis à la mort le 08 octobre 1991. Ce jour-là, pourchassé par les miliciens d´Adéwi à la solde du pouvoir Gnassingbé d´alors, il n´eut la vie sauve que grâce à dame «Chance». Ses poursuivants durent se contenter de sa chaise roulante qu´ils incendièrent. Et nous pouvons aujourd´hui affirmer que la curieuse amicale estudiantine, le HACAME (Haut Conseil de Coordination des Associations et Mouvements Estudiantins), à l´époque, et dont un certain Pascal Bodjona était l´un des activistes, fut la branche politique de ce groupe de jeunes Togolais qui avaient pris fait et cause, contre rétribution, pour Gnassingbé Éyadéma contre la démocratisation du pays. Des individus comme Akadé Sosso Gustave et le militaire réformé Tchalim, dont la fin ne fut pas des plus enviables, ne laissèrent pas forcément de bons souvenirs quant à la persécution d´autres Togolais qui voulaient le changement. L´autre militaire réformé, Simdjalim Pouli, grand milicien qui opérait avec son groupe à Adidogomé, Kodomé, Casablanca…jusqu´à la frontière du Ghana, connut également une mort atroce; laissant derrière une malheureuse veuve avec quatre petites filles. En effet, dans la nuit du 16 juin 1998, lui et deux de ses lieutenants, avec une brique de 15 plein chacun au dos, furent transportés par hélicoptère et jetés à la mer, parce qu´ils réclamaient avec insistance qu´on leur trouve du travail au port. 

Dépassés par l´évidence des images de miliciens qui opéraient en toute liberté en s´en prenant violemment aux manifestants lors des dernières manifestations de l´opposition de juin et juillet 2025, surpris par la vitesse de l´information et surtout par les virulentes critiques à ce sujet dans la presse nationale et internationale et sur les réseaux sociaux, Faure Gnassingbé et son entourage sont obligés de faire tomber le masque, en acceptant l´existence des miliciens à leurs services. Le régime autour de Faure Gnassingbé officialise et légitime le recrutement des miliciens qui se font appeler «sentinelles du peuple». Les trois entités régaliennes, à savoir, l´armée, la gendarmerie et la police sont-elles désormais incapables, ou ont-elles failli à leur mission? Que disent leurs hiérarchies? Acceptent-elles désormais d´être dégradées, désavouées, humiliées par le sommet de l´état, en permettant que des voyous, sur qui elles n´ont aucun contrôle, opèrent dorénavant en toute impunité à leurs côtés? Les «sentinelles du peuple» ailleurs, au Burkina-Faso, par exemple, ne sont pas recrutés sur une base partisane et participent aux travaux communautaires pour le bien de tous. Là-bas, ils ne sont d´aucune sensibilité politique, régionale ou tribale et n´ont pas pour rôle la persécution de leurs concitoyens pour qu´un régime de dictature, de père en fils, reste éternellement au pouvoir.

À l´attention de ces lugubres personnages, curieux «sentinelles du peuple», nous voulons rappeler qu´un dictateur et son entourage n’ont pas d’amis. Ils n’ont que des complices du moment pour essayer de jouer le tout pour le tout, en espérant sauver leur peau. C’est pourquoi les payeurs pour les basses besognes d’aujourd’hui peuvent rapidement devenir des tueurs sans pitié de leurs supposés bienfaiteurs, car les tenants d’un tel régime, traînant beaucoup de casseroles, n’ont aucunement l’intention de laisser des témoins gênants, quand ils sentiront que la fin est inévitable. Notre rappel, en milieu de texte, du terrible sort réservé à certains des miliciens par leurs recruteurs dans le passé, devrait être assez édifiant à cet effet. À bon entendeur…!

Samari Tchadjobo
Allemagne

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