La récente désignation du chef de l’Etat Faure Gnassingbé par l’Union africaine comme médiateur dans le conflit opposant la République démocratique du Congo au Rwanda, dans le cadre de la crise autour du M23, suscite une vive polémique au Togo. L’opposition togolaise ainsi que des voix influentes de la société civile dénoncent une décision jugée « insultante » et « scandaleuse ».
Lors d’une interview récente, le professeur Togoata Apedo-Amah, figure intellectuelle respectée et acteur engagé de la société civile togolaise, n’a pas mâché ses mots. « Que Faure Gnassingbé soit choisi comme médiateur ne me surprend pas, parce que l’Union africaine, tout comme la CEDEAO, ont toujours été des syndicats de dictateurs », a-t-il déclaré avec fermeté. Pour l’universitaire, cette nomination est le symptôme d’un système continental verrouillé par des dirigeants autoritaires qui, au lieu de répondre aux aspirations de leurs peuples, préfèrent se soutenir mutuellement dans une solidarité de façade.
La désignation de Faure Gnassingbé comme médiateur est perçue comme un affront, notamment en raison de la situation intérieure du pays. « Le Togo est malade », martèle Togoata Apedo-Amah. Il estime que le chef de l’État devrait plutôt se consacrer à résoudre les crises sociales, économiques et politiques qui secouent son propre pays. « C’est comme un médecin qui abandonne son malade à la maison pour aller en soigner un autre ailleurs », ironise-t-il.
Et de conclure : « C’est de la politique spectacle. On veut briller à l’extérieur pendant que l’on échoue à gouverner chez soi. Quand ta maison est sale, tu ne vas pas nettoyer celle d’autrui. »
Dans le même élan, les principales formations de l’opposition, telles que l’ANC et la DMP, ont exprimé leur incompréhension face à ce choix de l’Union africaine. Pour elles, la gouvernance contestée de Faure Gnassingbé au Togo ne peut jouer les facilitateurs dans une crise aussi complexe.
Alors que la situation dans l’est de la RDC reste volatile, la controverse autour de cette nomination relance une fois de plus le débat sur la légitimité de certains chefs d’État africains à jouer les médiateurs, alors que leurs propres pays sont confrontés à des crises profondes.