Le 30 août : Quand les dates se vengent des dictateurs

Ils ont volé nos symboles, détourné nos dates, effacé notre mémoire. Mais l’histoire a une façon bien à elle de rendre justice. Le 30 août 2025 pourrait être ce jour de revanche.

En cette fin d’été 2025, alors que le mouvement M66 se prépare à descendre dans les rues togolaises, le choix du 30 août comme date de mobilisation révèle une ironie historique d’une puissance redoutable. Une date peut effectivement en cacher une autre, et celle-ci porte en elle les contradictions profondes qui traversent notre société depuis des décennies.

Je suis Gnimdéwa Atakpama, auteur de “La nuit est longue mais la révolution vient”, un manuel qui révèle les erreurs à éviter face à la dictature et l’oppression. Le livre est disponible sur Amazon, à la Librairie du Futur et Graines de pensées.

L’histoire d’une manipulation orchestrée

Le 30 août dans l’histoire togolaise porte en lui une dualité fascinante qui remonte à la controverse de 1958-1959. Quand les jeunes de la Juvento réclamaient l’indépendance immédiate, les progressistes du PTP et de l’UCPN proposaient le 30 août 1959 – anniversaire de la proclamation de la République autonome du Togo dont ils avaient été les principaux artisans en 1956.

Mais Sylvanus Olympio et le CUT, face aux difficultés du pouvoir, choisirent le 27 avril 1960. Une décision qui divisa déjà les forces nationalistes.

L’histoire ne s’arrêta pas là. En 1969, dans un coup de génie machiavélique, le Général Eyadema détourna le 30 août de son sens originel. À Kpalimé – ironie suprême, ancien fief du CUT –, il lança son “appel historique” pour créer le RPT. Depuis lors, cette date ne commémore plus la marche progressive vers la liberté, mais sert à légitimer un pouvoir autoritaire.

Quand les opprimés reprennent leurs symboles

Cette manipulation révèle la constante du régime Gnassingbé : s’approprier les dates et symboles nationaux à des fins politiques personnelles. Mais aujourd’hui, quelque chose d’inédit se produit.

Quand le M66 – mouvement né des manifestations sanglantes de juin 2025 – choisit le 30 août pour ses mobilisations, il réactive cette bataille mémorielle avec une intelligence stratégique remarquable.

Cette date devient le théâtre d’une confrontation symbolique entre deux visions irréconciliables du Togo.

D’un côté : un pouvoir vieillissant qui s’accroche encore à ses artifices symboliques. De l’autre : une génération déterminée qui refuse cette confiscation mémorielle, rejointe par tous ceux – jeunes et anciens, du Nord comme du Sud – qui aspirent à reprendre possession de leur destin.

Le jour où l’histoire bascule

Le 30 août 2025 pourrait marquer le tournant que nous attendons depuis des décennies. En choisissant cette date, le M66 ne fait pas que manifester : il réveille les fantômes de notre histoire et pose LA question fondamentale qui hante le Togo depuis 1960.
Qui détient le droit de définir notre identité nationale ?
Les héritiers d’un système qui a successivement manipulé nos dates commémoratives, effacé nos héros authentiques, et divisé notre peuple ? Ou nous, citoyens togolais de toutes générations et de toutes régions, unis dans le refus de cette imposture historique ?

Cette stratégie révèle une maturité politique exceptionnelle : transformer une date détournée par la dictature en symbole de résistance démocratique. Le 30 août 2025 pourrait ainsi devenir le jour où nous reprenons enfin possession de notre propre histoire.

Ton rôle dans cette révolution symbolique
Les formes de cette reprise en main sont multiples : présence physique dans les rues, partage massif sur les réseaux sociaux, discussions dans les familles, mobilisation des diasporas, résistance civile pacifique. Chaque action compte, chaque voix importe.

Dans cette bataille des symboles qui décide de notre avenir, une certitude demeure : l’histoire togolaise se répète, mais cette fois, toi, citoyen togolais – que tu sois à Lomé, Kara, Sokodé, Kpalimé, Bassar, Mango, Dapaong, Pagouda, Paris ou Montréal –, tu peux écrire le scénario.

Le 30 août t’attend. L’histoire t’attend. Ton pays t’attend.

Gnimdéwa Atakpama, auteur de La nuit est longue mais la révolution vient, Amania Editions, 2025.

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