Dans une longue lettre adressée au président de la Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication (HAAC), le Directeur de Publication de L’Alternative, Ferdinand Ayité, exprime son indignation par rapport à la suspension de son journal pour une durée de 4 mois. Il proteste contre cette sanction de la HAAC. Lecture !
Lomé, le 8 Février 2021
A Monsieur
le Président de la Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication (HAAC)
Objet : Vives protestations
Monsieur le Président,
Se référant à votre décision N°003/HAAC /21/P du 5 février 2021 portant suspension du bihebdomadaire L’ALTERNATIVE dont j’ai l’insigne honneur de diriger les travaux des publications, nous venons par ce courrier émettre de vives protestations contre les nombreuses contre-vérités contenues dans ladite décision et la légèreté fort blâmable qui a caractérisé la démarche de votre institution. En effet, invités pour une audition suite à la parution N°940 du 02 février 2021, nous, Messieurs Ferdinand Mensah AYITE et Isidore Kokou KOUWONOU, respectivement Directeur de Publication et Rédacteur en Chef du Journal L’Alternative, sommes présentés dans les locaux de la HAAC le 05 février 2021 .
Au cours de cette audition qui a duré environ 1h34mn, il nous a été signifié qu’une plainte venait d’être déposée contre notre parution sus-citée par Me Koffi Tsolenyanu, notaire à Lomé et ministre de l’Urbanisme, de l’Habitat, et de la Réforme foncière, par le truchement de son conseil Me Kossi Hounakey-Akakpo. Après les salutations d’usage, il a été procédé à une lecture intégrale de la plainte par monsieur Kasséré Sabi, Vice-président du Comité presse écrite de la HAAC. Ensuite, un résumé succinct en a été fait par ce dernier. En somme et à la lecture de ladite plainte, Me Koffi Tsolenyanu accuse le journal L’ATERNATIVE et son Directeur de Publication de diffamation, d’atteinte à son honneur pour avoir publié un dossier relatif à la succession Georges Kudawoo dont il est l’Administrateur Judiciaire des biens depuis 2008 à la suite d’une décision de justice. Me Koffi Tsolenyanu déclare dans sa plainte que le Directeur de Publication du journal L’Alternative, non seulement n’a pas cherché à le rencontrer pour avoir sa version des faits, mais aussi s’est évertué à le diffamer en le qualifiant de faussaire pour avoir établi un permis de construire au nom du nommé Fidèle Kudawoo décédé depuis le 30 juin 1965. La parole a été ensuite donnée au Directeur de Publication de L’Alternative que je suis pour faire valoir ses arguments.
Prenant la parole, nous avons fait des observations de forme pour rétablir la vérité concernant la démarche de notre Rédaction visant à rencontrer Me Koffi Tsolenyanu pour avoir sa version des faits. Contrairement à la version servie dans la plainte, nous avons fait comprendre aux membres de la HAAC que depuis le 18 janvier 2021, la Rédaction du journal L’Alternative a fait parvenir au Cabinet du notaire-ministre un courrier sollicitant un rendez-vous. Lorsque le coursier s’est présenté au cabinet, la secrétaire du ministre, prénommée Solange, a déclaré qu’elle ne pouvait pas décharger le courrier sans l’avis du ministre. Elle s’est alors dirigée vers ses collègues de bureau, certainement pour recueillir leurs avis et instructions. C’est là qu’une scène insolite s’est produite. Le coursier a remarqué que dame Solange se dissimulait derrière une porte pour l’observer en disant à ses collègues je cite : « il est toujours là ». Intrigué par cette scène, le coursier s’est référé à la Rédaction qui l’a instruit de rester sur place jusqu’à la décharge du courrier.
Ce qui fut fait au bout de 45 minutes. Le samedi 23 janvier 2021, nous avons reçu un appel téléphonique de dame Solange qui, dans un premier, nous fait comprendre qu’elle a tenté de joindre, en vain, monsieur Isidore Kuwonu, Rédacteur en Chef du journal L’Alternative et signataire du courrier, et qu’elle s’est dirigée vers notre personne. Elle nous fait ensuite savoir que son patron, Me Koffi Tsolenyanu, dans le cadre de ses responsabilités au gouvernement, était en tournée vers le nord et qu’il sera de retour à la fin du week-end et que dès son retour, nous serons contactés pour les échanges. Avant de raccrocher, elle a tenu à faire savoir qu’elle est au nord du pays vers la frontière du Bénin, non loin de Kantè pour des obsèques et qu’elle a des problèmes avec le réseau MTN qui interférait dans ses appels. Nous lui avons fait comprendre que la personne indiquée pour rencontrer Me Koffi Tsolenyanu est le signataire du courrier et qu’il faudrait qu’elle appelle de préférence ce dernier. Le mardi 26 janvier 2021, nous avons rappelé dame Solange pour savoir si son patron est de retour.
Celle-ci nous a fait comprendre que Me Koffi Tsolenyanu est effectivement de retour, mais qu’il s’attelait à ses charges ministérielles, notamment la préparation du conseil des ministres du mercredi. Elle a promis nous rappeler le jeudi 28.
Effectivement le jeudi 28 janvier, elle a rappelé ; mais étant en réunion, nous n’avons pas pu prendre son appel. Juste après donc la rencontre, nous l’avons rappelée et c’est là qu’elle nous faisait savoir qu’elle a échangé avec Me Koffi Tsolenyanu et ce dernier l’a chargée de nous dire qu’il n’est pas du tout disponible et qu’il verra éventuellement s’il pourra nous rencontrer. Nous avons chargé dame Solange de dire à son patron que cela fait deux semaines qu’il essaye d’esquiver notre rencontre et par conséquent, nous sommes dans l’obligation de publier le dossier quitte à ce qu’il donne sa version des faits lorsqu’il sera disponible. Le lundi 1er février 2021, alors que nous avions déjà bouclé et envoyé les calques à l’imprimerie pour la parution du lendemain, nous avons reçu un appel du cabinet Me Kossi Hounnakey-Akakpo qui cherchait la localisation du siège de L’Alternative pour la transmission d’un courrier.
En début de soirée, un coursier est arrivé au siège du journal pour transmettre ledit courrier. En fait il s’agissait de la transmission d’une lettre que Me Koffi Tsolelnyanu a, par l’organe de son Conseil Me Kossi Hounakey-Akakpo, adressée au président de la HAAC le même jour. En somme, Me Koffi Tsolenyanu informe le président de la HAAC que le Rédacteur en Chef du journal L’ALTERNATIVE a envoyé le 18 janvier 2021 un courrier à son cabinet pour le rencontrer dans le cadre d’un recoupement des informations sur la succession Georges Kudawoo. Mais qu’instruit de la diffamation que le Directeur de Publication a faite contre lui au mois d’octobre dans l’émission « L’Autre journal », il sollicite le Président de la HAAC pour organiser une rencontre entre lui et le journaliste afin qu’il puisse donner sa version des faits.
Cette curieuse lettre a fait l’objet d’une longue discussion lors de l’audition. Répondant à deux membres de la HAAC qui estimaient je cite : « Pourquoi après avoir reçu le courrier de Me Koffi Tsolenyanu, vous n’avez pas suspendu la parution ? Est-ce que c’est cette parution qui va chasser la COVID-19 du pays ?», nous avons tenu à vous rappeler qu’aucune disposition du code de la presse et de déontologie ne consacre cette curieuse démarche à laquelle Me Koffi Tsolenyanu et son avocat Hounakey-Akakpo veulent nous soumettre. Il n’est dit nulle part que pour les nécessités de recoupements d’informations auprès d’une tierce-personne, cette dernière sollicite la HAAC pour une rencontre avec le journaliste. Nous vous avons rappelé que le choix épistolaire de Me Koffi Tsolenyanu vise deux objectifs.
Premièrement, un trafic d’influence vis-à-vis de la HAAC et deuxièmement, une volonté d’empêcher la parution de l’article en poussant le journaliste à l’autocensure. Monsieur le Président de la HAAC, pour clore le débat sur cette partie de la plainte, notamment ce fameux courrier, qu’il vous en souvienne, monsieur Badjibassa Babaka, membre de la HAAC a déclaré ceci : « La HAAC ne convoque pas le journaliste avant la publication d’un article. C’est après le travail de monitoring que si le journaliste est en faute, on le convoque pour l’écouter. La demande du ministre pour rencontrer le journaliste devant la HAAC était irrecevable »,et vous-même monsieur Willybronde TELOU d’ajouter : « J’ai appelé monsieur Koffi Tsolenyanu pour lui dire que la HAAC n’est pas une cour et que sa demande n’était pas recevable ». C’est sur ces deux déclarations que cette question de forme a été expédiée. Comment se fait-il donc que dans votre décision portant N° 003 /HAAC/21/P du 05 février 2021 portant suspension de notre Journal L’Alternative, vous dites carrément le contraire de la conclusion à laquelle nous sommes tous parvenus en évoquant cette curieuse lettre que vous-même avez jugé inappropriée, pour soutenir votre sanction ? C’est tout de même hallucinant qu’en moins de quelques heures entre l’audition et la rédaction de votre décision, collectivement, vous ayez perdu la mémoire au point de pondre ce qui est contraire à ce que vous avez dit et soutenu dans la salle.
Venant au fond du dossier, nonobstant les nombreux fac-similés contenus dans la parution N°940 du 02 février 2021 du journal L’Alternative, que tout lecteur a pu constater, nous sommes arrivés à cette audition avec une pile de dossiers dans plusieurs chemises avec des copies pour les membres de la HAAC. En donnant lecture de la plainte, il nous a été signifié que Me Koffi Tsolenyanu y a adjoint des pièces. Le débat a commencé autour du permis de construire. Dans sa plainte, Me Koffi Tsolenyanu déclare : « En effet c’est par mépris de la procédure d’obtention du permis de construire que Me Tsolenyanu Koffi est taxé de faussaire.
Il faut préciser que c’est l’architecte qui a conçu le plan de l’immeuble à construire qui introduit la requête auprès des autorités compétentes pour se faire viser son plan et obtenir l’autorisation d’exécution dudit plan. Pour délivrer ladite autorisation, l’autorité compétente se réfère au nom qui figure sur les titres de propriété de l’immeuble sur lequel cette autorisation est sollicitée. En l’espèce, pour délivrer le permis de construire, le Président de la délégation spéciale s’est donc référé au titre numéro 517 CL créé le 10 août 1931 et dont duplicata a été délivré le 31 mai 1960 à Fidèle Kudawoo, mandataire d’alors de la succession de feu Georges Kudawoo. Qu’il y a lieu de préciser que ce titre foncier numéro 517 CL n’a jamais été muté aux noms des héritiers actuels et que tous les noms contenus à ce jour dans ledit titre foncier se rapportent à des personnes décédés…
Mieux, par jugement N°0392/2020 du 06 août, le Tribunal de Commerce de Lomé a dit l’autorisation de construire en cause non caduque et que Me Tsolenyanu peut s’en servir ».
Monsieur le Président,
Face à ces contorsions de Me Koffi Tsolenyanu dont le seul but est de jouer sur la naïveté de ceux qui ne connaissent pas le fond de ce dossier, en l’occurrence les membres de la HAAC, nous avons fait valoir nos arguments à savoir que Me Koffi Toslenyanu, dans un premier temps, tente de faire porter la responsabilité de l’établissement du permis de construire sur l’architecte.
Nous vous avons fait comprendre que c’est lui qui a désigné l’architecte, c’est lui qui lui a remis le titre foncier pour introduire la demande à la Mairie et plus grave, c’est lui qui se sert de ce document frauduleux dans les procédures judiciaires. S’il n’est pas l’auteur, il est le complice et dans les deux cas, il a participé à la fraude et au faux. Mieux, contrairement aux affirmations du plaignant, nous vous avons fait part des dispositions qui encadrent la délivrance du permis de construire, notamment la note circulaire N°161/MVUHSP/-CAB/SG relative à la composition du dossier de demande de permis de construire, au coût et au délai en date du 04 mars et signé de Mme Koko AYEVA ; il est clairement dit que le dossier de demande de permis de construire comprend les pièces suivantes, au point 3 : « Une copie de la carte d’identité ou du passeport du demandeur ».
Monsieur Fidèle Kudawoo étant décédé le 30 juin 1965, quelle carte ou document d’identité du défunt Me Koffi Tsolenyanu et son architecte ont-ils mis dans le dossier pour se faire établir ledit permis de construire ? Toujours dans sa volonté de dissimuler la vérité, Me Koffi Tsolenyanu tente de faire croire que les héritiers directs de Fidèle Kudawoo sont tous décédés et pourtant, il y en a deux qui sont encore vivants, une au Nigéria et une autre à Lomé au quartier AVEDJI Sun City au nom de Léontine Kudawoo au numéro de téléphone 90 02 33 03. Enfin, Me Koffi Tsolenyanu a volontairement omis de vous dire que la fameuse décision qui a déclaré le permis de construire caduque et qu’il est fondé à en faire usage a été rendue contre les locataires et non contre les propriétaires.
Monsieur le Président,
Pour couronner le tout, voici la première phrase de l’autorisation du permis de construire délivrée par le président de la Délégation Spéciale de la ville de Lomé que vous avez lue en fac-similé dans notre parution N°940 : « Le Président de la Délégation spéciale de la Ville de Lomé à l’honneur d’informer M. KUAWOO Fidèle qu’en réponse à sa demande en date du 07-11-2017, il lui accorde l’autorisation de construire sur son terrain sis à Lomé Adawlato TF N° 517 CL ». Vous trouvez donc normal que le Président de la délégation spéciale informe dans un courrier un mort ? Voilà les éléments du puzzle et de la supercherie que Me Koffi Tsolenyanu et son avocat, Me Kossi Hounakey-Akakpo, tentent de dissimuler dans des contorsions juridiques.
Monsieur le Président,
Au cours de cette audition, le débat devenant de plus en plus technique, puisque nous étions avec nos documents et vous avec les pièces introduites par Me Koffi Tsolenyanu, vous et certains membres avez déclaré qu’il relève de la justice et que la HAAC ne s’occupe que des questions d’éthique et de déontologie.
Monsieur le Président,
Voici quelques extraits des propos tenus par vous-même et les membres de la HAAC sur la question de la confrontation des documents des deux parties à savoir, Me Koffi Tsolenyanu et le journal L’Alternative : « C’est bon, Monsieur Ferdinand. On n’a pas besoin de voir tout ça. Il appartient à la justice de juger des pièces et ce sera pièce contre pièce. Nous, ce qui nous importe, c’est l’aspect déontologie que nous allons voir ». Ce sont vos propres propos, Monsieur Willybronde Telou lorsque nous avons voulu vous remettre nos documents. D’autres membres de la HAAC sont allés dans le même sens que vous : « Nous laissons à la justice de faire ce travail. Nous, nous ne pouvons pas juger ces pièces. Voici les documents du ministre. Je vous assure que c’est beaucoup de pièces. Vous avez aussi les vôtres. C’est la justice qui fera le reste »; propos tenus par Sabi Kasseré. D’autres membres également sont encore allés dans le même sens, notamment messieurs Mathias Ayena, Badjibassa Babaka et pour clôturer cette phase de discussion sur les documents brandis par les deux parties, vous avez dit ceci, monsieur le Président : « Je suis d’accord. Les pièces, ce n’est pas à la HAAC de les apprécier. Nous laissons le soin à la justice. Ce qui nous intéresse ici, c’est la déontologie (…) Et quand le ministre demande à la HAAC de prendre des sanctions contre le journal, il ne lui appartient pas de dire à la HAAC de sanctionner le journaliste. Il revient à nous de savoir ce qu’on doit faire ».
C’est à partir de cet instant que nous avons entamé les questions liées à l’éthique et à la déontologie.Monsieur le Président,Nous sommes donc surpris, ébahis, atterrés et même fort indignés de lire dans la décision rendue portant sanction contre notre journal et rendue publique, des propos totalement contraires à ce qui a été dit dans la salle d’audition : « Qu’au cours de l’audition, le Directeur de publication du bihebdomadaire L’Alternative, n’a apporté aucune preuve pour soutenir le bien fondé de ses allégations… ». Cette déclaration sentencieuse, péremptoire contenue dans votre décision de sanction rendue publique est hallucinante à tous égards, d’autant plus qu’elle ne reflète en rien le contenu des discussions et se trouve à l’opposé de vos propres propos tenus dans la salle dont nous avons répercutés certaines séquences ici.
Comment pouvez-vous affirmer que le Directeur de Publication n’a apporté aucune preuve pour soutenir le bien-fondé de ses allégations alors que nous sommes arrivés à la HAAC avec une pile de documents que non seulement vous n’avez pas voulu prendre, mais qu’en plus vous avez tous déclaré que la confrontation des pièces se fait à la justice et que vous vous occupez seulement des questions d’éthique et de déontologie?
Monsieur le Président,
Il y a lieu de s’inquiéter et de se poser des questions sur la mission réelle de la HAAC si vous prenez des libertés de servir dangereusement des contrevérités à l’opinion après une audition, pour jeter un média et son Directeur de Publication en pâture, le faisant passer pour un affabulateur, un colporteur de fausses informations, un diffamateur, un incompétent, dans le seul but de protéger un ministre indélicat. D’ailleurs, il nous a été donné de constater tout au long de l’audition que vous ne prenez que le parti du plaignant, c’est-à-dire Me Koffi Tsolenyanu, en faisant beaucoup plus foi aux documents qu’il a introduits à votre niveau qu’aux nôtres. C’est la raison pour laquelle bien évidemment, vous n’avez pas voulu prendre nos pièces.
Monsieur le Président,
La HAAC dispose d’un service juridique. Si elle était animée par de vrais juristes, du moins des hommes compétents qui font preuve d’équité et d’impartialité, à partir du moment où vous avez déclarez vous-même que la confrontation des pièces fournies par les deux parties relève de la justice, votre service juridique aurait dû dresser un rapport sur cet aspect renvoyant les deux protagonistes devant une instance supérieure et compétente, notamment la justice où un magistrat ou un collège de magistrats pourra apprécier la qualité des pièces du dossier et bien situer les responsabilités. C’est la procédure à suivre à partir du moment où vous vous êtes déclarés incompétents à apprécier et juger la validité des pièces.
Vous avez préféré jeter l’anathème sur le journaliste pour faire plaisir au plaignant qui est un personnage sulfureux de la place. Pendant qu’on y est, avez-vous eu la vigilance d’esprit, monsieur le Président, de vous poser la question de savoir face à la gravite des accusations, pourquoi Me Koffi Tsolenyanu a préféré la HAAC à la justice ?Sur les aspects d’éthique et de la déontologie, Monsieur le Président, l’audition a tourné beaucoup plus autour du terme faussaire que vous avez jugé inapproprié. « Nous sommes entre nous, même si vous avez toutes les preuves, je dis même si, vous auriez pu utiliser une autre expression puisque Me Koffi Tsolenyanu est membre du gouvernement, ce n’est pas bien »,avez-vous déclaré, Monsieur le Président, suivi de Sabi Kasseré qui déclare : « Vous auriez pu dire présumé faussaire puisqu’il bénéficie de la présomption d’innocence et d’autres mots pour la une de votre article ». Monsieur Kanak Lalle a poursuivi dans le même sens en déclarant : « Quand nous avons pris le journal et vu à la une « faussaire », on a cru que le ministre a fabriqué des faux billets. C’est après avoir parcouru l’article que nous nous sommes rendu compte que c’est autre chose. Généralement, c’est celui qui fait des faux billets qu’on appelle faussaire ».
En fait, la cause était déjà entendue au regard de ces différentes déclarations de vous-même et des membres de la HAAC. Nous avons cependant donné les raisons qui fondent l’utilisation de ce mot étant donné qu’il n’existe aucune autre expression pour qualifier l’acte posé. D’autres aspects de l’article incriminé ont été également débattus, notamment les déclarations faites sur UNIR et la franc maçonnerie. Et Monsieur Komlan Agbeka sur presque un ton de menace, a déclaré ceci : « Et puis pourquoi vous mêlez la franc-maçonnerie à tout ça ? Vous connaissez la franc-maçonnerie, les illuminatis ? Vous savez ce qu’on appelle l’égrégore ? Faites très attention aux sujets que vous abordez dans votre journal ».
Monsieur le Président,
C’est au bout de cette longue discussion et au regard des conclusions auxquelles nous sommes parvenus séquence par séquence, que nous avons déclaré que nous ne sommes pas en mesure de faire un démenti comme l’exige le plaignant puisque nous n’avons confronté aucune pièce pour faire rejaillir la vérité.Les attributions que la Loi organique N°2018-029 du 10 décembre 2018, en son article 22 alinéa 1er donne à la HAAC sont claires : « La HAAC a pour mission de garantir et d’assurer la liberté et la protection de la presse et des autres moyens de communication de masse ».Il est regrettable de constater que la HAAC est devenue un instrument d’étouffement de la liberté de presse à travers les suspensions abusives d’émission, de journaux, des convocations intempestives dans le seul but de faire plaisir à certaines personnes. En décidant de suspendre le bihebdomadaire L’Alternative pour quatre (04) mois alors qu’elle reconnaît elle-même n’avoir aucune compétence pour juger des pièces à conviction dans le dossier, la HAAC non seulement cherche à étouffer un média indépendant dont la ligne éditoriale dérange, mais bien plus, empêche en fait le journal de sortir d’autres révélations sur le sieur Koffi Tsolenyanu. Depuis 2018, les Directeurs de Publications sont appelés à faire de leurs journaux des entreprises de presse.
Pendant que ces derniers se débrouillent pour faire de leurs journaux de vraies entreprises de presse avec toutes les charges auxquelles ils font face, la HAAC devenue une cour martiale se permet de les suspendre ou de fermer systématiquement. Il est à craindre qu’à cette allure, votre mission se résumera d’ici quelques années à réguler les avis de décès et les communiqués, étant entendu que vous auriez réussi l’exploit de faire disparaître de l’espace médiatique la plupart des médias indépendants.
Monsieur le Président,
Nous sommes curieux de savoir la dernière fois que la HAAC, institution dont vous avez la charge, s’est investie dans la protection des journalistes puisque c’est votre mission, et puisque tous les jours les journalistes, en l’occurrence de la presse privée, sont agressés, poursuivis, chassés, interpellés sur des lieux de reportage. Si nous avons décidé de vous envoyer cette lettre de protestation, c’est que l’institution dont vous avez la charge est devenue une boîte à fabriquer du mensonge et c’est extrêmement grave pour la liberté de presse dans notre pays.
Les contre-vérités servies à l’opinion dans votre décision rendue publique le 05 février 2021 en est une preuve palpable. Il est donc souhaitable qu’à l’avenir, lors des auditions, vous vous fassiez assister d’un huissier de justice (audiencier donc), qui aura pour mission de consigner les propos des uns et des autres dans un procès-verbal ; ou d’un représentant d’une organisation de presse ou carrément que ce soit une audience publique afin d’éviter ce genre d’incidents fâcheux, nocifs à la liberté de presse et donc à la démocratie dans notre pays. Les institutions ne valent que par les hommes qui les dirigent, dit-on. Nous attendons donc de la HAAC des décisions impartiales, justes équitables et honnêtes.
Il en va de la crédibilité de l’institution et des hommes qui l’animent. D’ores et déjà, nous nous excusons de vous adresser une si longue lettre, mais elle était nécessaire pour détricoter dans les moindres détails les contre-vérités contenues dans votre décision afin de rétablir la vérité des faits.Dans son discours en date du 04 février 2021, c’est-à-dire la veille de notre suspension arbitraire, le Président des États-Unis d’Amérique, Joe Biden déclarait ceci je cite : « Nous croyons qu’une presse libre n’est pas un adversaire. Au contraire, elle est essentielle. Une presse libre est importante pour la santé de la démocratie ». Puisse la Providence vous assister à approfondir cette réflexion afin de conduire en toute impartialité, mais aussi en toute honnêteté, votre mission à la tête de la HAAC pour une presse libre et indépendante au Togo.
Dans cette attente, nous vous prions de croire, Monsieur le Président, à l’expression de notre profond respect.
Pour le Journal
Le Directeur de Publication
Ferdinand Mensah AYITE
Tout est dit; monsieur AYITE
Quelle tristesse font nos institutions!
Vous serez toujours élevé Monsieur Ferdinand AYITE, que Dieu vous protège. Togo, pays fonctionnant à l’envers.