«Ce n’est pas un audit, je voudrais vraiment que ça soit très clair, le gouvernement n’a pas commandé d’audit sur le secteur du pétrole,…Ce rapport qui est brandi comme une preuve, qui est brandi aujourd’hui par les uns et les autres à charge d’un certain nombre de personnalités n’est pas fiable, il n’a pas été fait dans les conditions acceptables, et naturellement le gouvernement n’en tirera aucune conclusion à l’étape actuelle » Christian Trimua
«…il n’y a rien de plus faux que cette affaire». Gilbert Bawara
C’était encore l’époque où les deux ministres vuvuzela,(merci à la presse togolaise) du régime de Faure Gnassingbé, Christian Trimua et Gilbert Bawara s’époumonaient à justifier l’injustifiable et à raconter des histoires à dormir debout pour minimiser le travail de dénonciation abattu par le Bi-Hebdomadaire L’ALTERNATIVE, et discréditer le rapport d’audit commandité par le gouvernement à son corps défendant, dans l’affaire Petrolegate. Et ces curieuses déclarations avaient lieu après que Ferdinand Ayité et son journal fussent condamnés en novembre 2020 par l’injustice, oh pardon! par la justice togolaise pour “diffamation” à l’encontre des Adjakly à payer une forte somme. Et l’agitation de ces deux ministres n’était pas anodine, vu le fait que l’affaire de détournements concernant les Adjakly avait ses ramifications jusqu’au sommet de l’état togolais. À travers un système d’appel d’offres opaque, de 2009 à 2019 environ 500 milliards CFA avaient été détournés par la Coordination du Comité de suivi des fluctuations des prix des produits pétroliers (Csfppp), chargé de négocier l’importation du pétrole au Togo. Ce gros scandale de l’année fut le chou gras de Ferdinand Ayité et ses collègues qui, de façon minutieuse et professionnelle, semaine par semaine, épisode par épisode, ont détaillé les tenants et les aboutissants du puzzle mafieux.
Aux pressions de toutes sortes pour leur faire peur et laisser tomber, les journalistes du Bi-Hebdomadaire L’ALTERNATIVE ont opposé un professionnalisme et un courage sans pareils; et puisque nous sommes en dictature, ils s’en sortiront avec une condamnation à la Hussarde à payer une amende de 7 millions de nos francs pour “diffamation”, à l’issue d’un procès digne des républiques bananières. Une condamnation à payer une telle somme équivaudrait pour beaucoup de journaux privés, critiques à l’égard du régime, à déposer le bilan et à mettre la clé sous le paillasson. Ce que la justice aux ordres n’avait pas pu atteindre, la pompeusement dénommée Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication (HAAC) est là pour prendre la relève et donner l’estocade. Le traitement du dossier concernant la succession Georges Kudawoo par le journal fut l’occasion pour la HAAC de sortir la chicotte. [L’Alternative No.940 du 02 février 2021]. Pendant l’audition à la HAAC Ferdinand Ayité avait affronté ses arguments et preuves à ceux du ministre plaignant. Malgré le fait que notre notaire de ministre ait fourni un faux document pour se tirer d’affaire dans le dossier de la succession, le journal n’a pas le droit d’utiliser le mot “faussaire”, puisque, selon la HAAC, il s’agit d’un ministre, comme si les ministres étaient des citoyens à part. Et la suspension de 4 mois était la sanction que “l’Alternative” devait accepter sans broncher. La raison du plus fort avait alors prévalu.
Condamné à payer une amende de 7 millions pour diffamation contre les Adjakly, “L’Alternative” sera de nouveau au tribunal le 08 juillet prochain pour un procès en appel. Après 4 mois de suspension le bi-hebdomadaire a commencé à paraître de nouveau il y a deux semaines. Pendant que Ferdinand Ayité, le directeur de publication et ses collègues sont acculés de tous les côtés au Togo, une organisation américaine qui récompense entre autres les travaux de journalistes qui illustrent la corruption et les crimes financiers dans le monde, Trace Foundation, vient d’honorer le journal L’Alternative par une dinstinction dénommée “Trace Prize for Investigation”. Rappelons que dans la hiérarchie de distinction de Trace Foundation nous avons les premier et deuxième prix et la distinction. Et parmi plus d’une centaine de journaux anglophones et francophones le Bi-Hebdomadaire togolais “L’Alternative fut le seul à remporter cette distinction honorable. Hué, humilié et persécuté dans son pays, “L’Alternative”, grâce à un travail professionnel, vient d’être blanchi et auréolé par une organisation indépendante étrangère.
Que pensent aujourd’hui tous ces Messieurs et Dames de la HAAC, qui devraient, si on était dans un pays normal, se réjouir qu’un des leurs ait pu mériter une telle distinction? Regrettent-ils d’être allés trop vite en besogne, ou ont-ils le remords de quelqu’un qui ne pouvait, de toute façon, faire autre chose, parce qu’étant en mission commandée? Et ces ministres, haut-parleurs du régime de Faure Gnassingbé? Se sentent-ils humiliés ou honorés parce qu’un de leurs compatriotes se voit ainsi auréolé? Et pour que ce procès en appel du 8 juillet 2021 ait moins des allures des républiques bananières, cette distinction de Ferdinand Ayité et ses collègues ne devrait-elle pas servir de circonstance atténuante?
Samari Tchadjobo
Allemagne