Depuis mars 2020, le Togo mène une lutte acharnée contre le COVID. Ce, après l’apparition du premier cas actif sur le territoire national, le 6 mars 2020. Parmi entre autres recettes trouvées par le gouvernement togolais, figure l’interdiction de tout regroupement de plus de 15 personnes. Et c’était, alors, la fin de la célébration festive des fêtes traditionnelles à travers le pays. Ce, jusqu’à nouvel ordre. Mais entre les décisions et leur mise en application, le fossé semble grand.
Depuis de décembre 2019, le monde entier est ébranlé par ce qu’il convient d’appeler la nouvelle maladie du siècle. Ce qui semblait un cas isolé, à son apparition en Chine, est devenu monstrueux, par la suite. Mettant en épreuve, à la fois la science et l’ingéniosité humaine. La nouvelle maladie à Coronavirus (Covid-19).
Touché en mars, le Togo a, depuis lors, mis en place toute une batterie pour se prémunir, au mieux, de cette hydre. De la fermeture temporaire des écoles et autres lieux d’apprentissage aux lieux de cultes en passant par les salles de spectacles et discothèque. Mais si l’évolution relative et satisfaisante de la situation aura tout de même favorisé un desserrement de l’étau, est-il que la lutte contre ce virus, dans son ensemble, particulièrement pour ce qui est de l’interdiction des regroupements de masse, semble dépourvue de toute cohérence.
Entre la théorie et la pratique…
En effet, on se souvient que le 17 juin 2020, dans la dynamique d’empilement des mesures barrières édictées par le gouvernement, il a été fait interdiction formelle des fêtes traditionnelles à travers tout le pays. C’est ainsi que depuis plus d’un an, les évènements culturels comme Ekpessosso, Agbogbozan, Evala, Odontsu, Ayizan, Tingba-Paab et autres sont mis en veilleuse. Ce, au nom de la santé publique. Ce qui paraît compréhensible, lorsqu’on sait surtout qu’il faut d’abord vivre avant de fêter. Encore que techniquement, le Togo ne dispose malheureusement pas d’un plateau technique des plus aguerris pour faire face à cette pandémie.
Mais alors, plus les jours passent, plus l’on se rend compte de la dichotomie qui existe entre les décisions gouvernementales et les faits tels que constatés sur le terrain. En exemple, la prolongation, il y a quelques jours, de la décision portant interdiction de la célébration en masse desdites fêtes.
«Tenant compte du contexte de l’état d’urgence sanitaire toujours en vigueur, dans le cadre de la lutte contre la pandémie à la Covid-19, les regroupements de personnes ont été drastiquement limités. Cette mesure demeure en vigueur. Ceci étant, les regroupements pour la célébration des fêtes traditionnelles demeurent encore interdits jusqu’à nouvel ordre », indiquent, par voie de communiqué conjoint, les ministres de la Culture, Pierre Lamadokou et de l’Administration territoriale, Payadowa Boukpessi.
Toutefois, précise le communiqué du Gouvernement, les rites sont autorisés mais doivent se dérouler exclusivement en famille. « Ces rites familiaux se feront dans le strict respect des mesures barrières édictées par le gouvernement à savoir le port obligatoire de masque de protection, le lavage des mains et la distanciation physique », a-t-on précisé.
Cette nouvelle décision, à l’analyse, paraît bien curieuse. Surtout que les officiels assurent que «toutes les dispositions seront prises pour veiller au strict respect de ces mesures dans l’intérêt de la population». Parlons-en justement!
Si une chose est de prendre des mesures, l’autre est de s’assurer de son application afin qu’il soit en adéquation avec les principes théoriques. En effet, pendant que l’on semble s’acharner contre les moindres regroupements ici et là, au point même d’étouffer les libertés individuelles et collectives, force est de constater, par contre, que le gouvernement lui-même viole tacitement ses propres interdictions.
ça manque de cohérence
À titre illustratif, l’on sait tout le caractère gigantesque qu’ont revêtu les obsèques de plusieurs personnalités du régime, ou proches, décédées depuis que court cette décision. Des cérémonies funéraires de Kpabre Silly, le 12 septembre 2020, à Dapaong à celles de Fambaré Ouattara Natchamba, le 24 octobre 2020 à Gando, dans l’Oti, en passant par celles de Dahuku Péré, en avril 2021 et récemment celle de Abass Bonfo, le 8 juillet dernier, à Kabou, l’affluence était celle des grands jours. D’une cérémonie à une autre, elles ont été des obsèques à grandes pompes, auxquels a participé le chef de l’État, en personne, sans que personne ne crie gare.
On se rappelle aussi qu’il y a quelques jours, le 22 juin dernier, Faure Gnassingbé a également présidé la cérémonie d’inauguration de la centrale photovoltaïque de Blitta. Cérémonie qui a réuni plus de 2000 personnes. Ce, avec un difficile respect des mesures barrières. Et pourtant, les moindres regroupements en ville, y compris les mariages et veillées funèbres, sont systématiquement réprimés par les pouvoirs publics. Ce qui relève d’une politique sélective en matière de lutte contre le COVID au Togo. Comme s’il y a un Coronavirus pour les hauts placés, et un autre pour les citoyens de basse classe.
C’est dire , de toute analyse faite, que les décisions gouvernementales, dans le cadre du COVID, manquent cruellement de cohérence. Ce qui donnent ainsi raison à certains qui pensent que le durcissement de la lutte au Togo, loin de l’apparente focalisation faite sur la santé humaine, semble plutôt avoir bien de raisons inavouées.
Source: Fraternité