Le Centre hospitalier régional (CHR) Lomé Commune est débordé et des patients sont gardés au CHU Sylvanus Olympio de Lomé. L’information est donnée depuis quelques jours par les autorités sanitaires. Cette situation révèle l’incapacité du gouvernement à anticiper dans ses prises de décisions, même quand il s’agit d’une question aussi sensible que la pandémie du coronavirus.
Le 21 mars 2020, le gouvernement a décidé de dédier le Centre hospitalier régional (CHR) Lomé Commune au traitement des personnes atteintes de la Covid-19. Une décision bien accueillie puisqu’elle permet de mieux circonscrire la maladie en isolant les personnes malades de la masse. Mais très vite, on s’est rendu compte que la capacité d’accueil de ce centre ne répondait pas aux besoins en hospitalisation. Il fallait donc la rénover. Le CHR qui se trouvait dans une situation de délabrement a fait peau neuve. Depuis l’entrée, tout observateur peut constater que des travaux ont été effectués.
En avril 2020, des officiels ont visité ce centre dans la cadre de sa rénovation et se sont félicités de l’augmentation des capacités d’accueil. « Durant cette visite, le ministre de la Santé et de l’Hygiène publique était entouré principalement par l’ambassadeur de France, la Représentante Résidente de l’Organisation Mondiale de la Santé au Togo et le Coordonnateur de la Coordination Nationale de riposte au COVID-19 », lit-on sur le site internet de l’OMS Togo.
« Pour adapter le CHR aux exigences de la prise en charge des patients atteints de COVID-19, de profondes rénovations ont été entreprises de façon graduelle avec une bonne identification des différentes zones et du circuit de sécurité. Ainsi, toute l’aile Sud du CHR avec une capacité de 75 lits a été totalement rénovée et équipée y compris en matériel de réanimation, selon les normes de l’OMS. Aussi, pour augmenter la capacité de prise en charge, des tentes et conteneurs ont été installés et aménagés. Le test des équipements est en cours afin d’y transférer les patients au plus tard le mercredi 22 Avril 2020 et poursuivre la rénovation et l’équipement de la seconde aile », a poursuivi l’OMS Togo.
Selon le ministre Majesté Ihou Watéba, directeur du CHR, « le centre dispose d’une zone verte de sécurité où le personnel a moins de risque de contamination. Mais aussi d’une zone rouge où on met les malades. Nous avons également du matériel de haut niveau, ce qui nous permet d’avoir un impact significatif sur la survie ».
Après cette rénovation et les mots de réconfort, le CHR Lomé Commune a pu contenir les patients, mais jusqu’à une certaine limite, puisque depuis quelques jours, les responsables du CHU Sylvanus Olympio ont déclaré avoir accueilli des malades de la Covid-19. « Nous avons actuellement une dizaine de malades ici. La situation est vraiment critique et illustre la dangerosité de cette pandémie », a déclaré le Lieutenant-Colonel Yawo Apélété Agbobli, Directeur général dudit hôpital.
Que le CHU SO vienne en appui au CHR Lomé Commune n’est pas une mauvaise chose en soi. D’ailleurs, nous avions connaissance de cette situation depuis un moment. Néanmoins cela suscite des interrogations. La première est relative aux dispositions prises pour encadrer les malades. Sont-ils dans les mêmes bâtiments que d’autres patients ? Bénéficient-ils des mêmes prestations, en termes de « confort » et d’attention comme ceux isolés au CHR Lomé Commune ? Une chose est certaine, les patients de la Covid du CHU SO ne se retrouvent pas dans les meilleures conditions.
Mais au-delà, c’est la gestion même de la pandémie au Togo qui se révèle manifestement approximative. En effet, c’est depuis mars 2020 que le premier cas de la maladie a été détecté au Togo. Le gouvernement a bien fait de réquisitionner le CHR pour en faire le quartier général des patients atteints de la Covid-19. Mais, plus d’un an et demi après la détection du premier cas, il est inadmissible de dire que ce centre a atteint ses capacités d’accueil. Pour un pays dont le système de santé s’est révélé vétuste dès l’apparition d’une dizaine de cas, le gouvernement doit être prévoyant et anticiper sur les choses. Après avoir rénové le CHR, il ne devrait pas s’arrêter là, puisque la pandémie n’est pas encore enrayée.
Ce qui révolte, c’est que depuis plusieurs mois, la pandémie a pris une ampleur plus inquiétante avec ce que l’on a nommé « variant delta ». Apparu en Inde depuis fin 2020, cette maladie a vite atteint les pays d’Europe, puis l’Afrique. Ce variant a suivi le même parcours de propagation que le virus souche détecté pour la première fois en Chine. Pour des dirigeants qui savent que les avions sillonnent toujours le ciel avec leur lot de personnes atteintes ou non, les autorités togolaises doivent s’attendre à ce que le pays ne soit pas épargné. En tenant compte de la virulence du variant delta, on peut s’attendre à une situation, non pas pareille à celle du virus souche, mais plutôt plus éprouvante. Des dispositions devraient donc être prises.
Malheureusement, et comme elles en ont l’habitude, les autorités togolaises ont attendu que les cas se multiplient par centaines pour crier. Le plus grave, c’est que rien n’est fait pour augmenter davantage les capacités d’accueil du CHR Lomé Commune déjà saturé. Faure Gnassingbé et ses collaborateurs n’ont pas anticipé. La Chine dont ils aiment s’inspirer a construit des hôpitaux en quelques jours. Ici, on s’est contenté de retaper le CHR sans penser à une situation plus grave. Vive l’amateurisme d’Etat. Pendant qu’on y est, bien malin qui pourra dire le nombre de respirateurs dont dispose effectivement le Togo.
G.A.
Source : Liberté / libertetogo.info