Passage imminent du Togo à l’EPU: Amnesty International décortique les manquements concernant les droits de l’homme

Le troisième passage de notre pays le Togo à l’Examen Périodique Universel aura lieu dès les premiers mois de l’année prochaine. Tribune mise en place par les Nations-Unies pour évaluer le niveau d’immersion des Etats dans le respect des droits humains, cet examen périodique se passe devant la commission des Nations-Unies pour les droits de l’homme.

A l’occasion, les représentants de chaque pays rendent compte des actions que leurs gouvernements ont menées sur une durée donnée, en vue de garantir une liberté de vie et d’expression à chaque citoyen, en lien avec le droit international. Le gouvernement togolais qui avait fait son premier exercice en 2012 et le second en 2016, a donc un nouveau rendez-vous avec cette commission, où il devra situer l’opinion internationale sur sa capacité à harmoniser sa gouvernance avec les exigences du droit international.

Quelques mois avant cette rencontre importante qui permet de situer notre pays parmi les Etats démocratiques donc fréquentables ou non, Amnesty International, en connaissance de cause, a déjà sonné l’alerte à travers une communication soumise à cette commission. Celle-ci fait l’état des lieux et indique quelques avancées dans la mise en œuvre des recommandations pour lesquelles l’Etat du Togo avait pris des engagements fermes en 2016, lors de son deuxième passage.

Entre autre avancées, l’on peut citer notamment, la ratification de la convention internationale sur la protection de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, la mise en place d’un comité national des droits de l’enfant, le renforcement de la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH) dont les membres sont désormais élus par le parlement. La communication indique en outre, que notre pays a eu à accepter la visite de la rapporteure spéciale sur l’albinisme en 2018, puis reçu le rapporteur spécial sur les formes contemporaines d’esclavage en 2019.

Mais, oui il y’a forcément un mais, la situation des droits de l’homme dans sa globalité a plutôt pris une courbe descendante et n’est donc pas reluisante d’autant plus qu’entre 2016 et aujourd’hui, notre pays a multiplié l’adoption des lois quasi liberticides qui vont aux antipodes de ce que l’on était en droit d’attendre de lui, conformément à ses propres engagements.

L’on se souviendra par exemple qu’en décembre 2018, l’Assemblée nationale avait adopté une loi sur la cybersécurité. Dans la communication soumise par Amnesty observe que cette loi « restreint fortement le droit à la liberté d’expression en introduisant des peines pouvant aller jusqu’à trois ans d’emprisonnement, la diffusion de fausses informations, et jusqu’à deux ans d’emprisonnement pour des atteintes à l’ordre publique, ainsi que la production, la diffusion ou le partage des données portant atteinte à l’ordre, la sécurité publique ou la dignité humaine » relève Amnesty.

Cette loi, il faut le préciser qui comporte certaines dispositions jugées de « vagues » par Amnesty, contient surtout une série de dispositions sur le terrorisme et la trahison assorties des peines particulièrement lourdes qui vont jusqu’à 20 ans. Etant entendu le caractère « vague » de ces disposions, l’ONG estime avec crainte, « qu’elles pourraient être facilement utilisées contre les lanceurs d’alerte et quiconque dénonce des atteintes aux droits humains » surtout que cette loi « confère également des pouvoirs supplémentaires à la police, en termes de surveillance des communications ou des équipements informatiques, en l’absence de garanties suffisantes, y compris dans le contrôle judiciaire ».

L’on imagine aisément que c’est en vertu des dispositions d’une telle loi que le Togo s’est autorisé l’usage abusif du logiciel d’origine israélienne dénommé « Pegasus », pour cambrioler numériquement les téléphones portables des acteurs de la société civile, des défenseurs des droits humains ainsi que des journalistes en vue de fouiner dans la vie privée de ces derniers.

Pendant ce temps, le protocole facultatif à la convention sur l’élimination de toutes les formes de discriminations à l’égard des femmes et la convention sur l’imprescribilité des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, n’ont toujours pas encore retenu l’attention de nos gouvernants alors qu’ils constituent des instruments importants dans la promotion de l’égalité genre et dans la protection de citoyens contre les crimes qui, malheureusement, ne manquent pas dans nos pays.

Le Code de procédure pénale n’a non plus été révisé jusqu’à ce jour. Or l’impératif pour les prévenus de faire appel à un avocat dès le moment de la garde à vue ne figure pas encore dans celui qu’utilise le pays. Tout comme n’existent non plus, aucune garantie juridique contre la torture et des traitements inhumains et dégradants.

Il y’a donc lieu, avant cette comparution du Togo devant la commission des Nations-Unies pour les droits de l’homme, d’interpeller le gouvernement sur l’impératif de poser des pas décisifs allant dans le sens du droit international qui garantit aux peuples du monde le Vivre Ensemble et la culture du Bien Commun.

Luc ABAKI

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