Dans une note circulaire datée du 11 novembre dernier, Sani Yaya, ministre togolais de l’Economie et des finances, mettait les directeurs des sociétés d’état en garde contre les « importantes dépenses effectuées par les sociétés d’état et les établissements publics au titre des étrennes »à l’occasion des fêtes de fin d’année.
« Cette pratique, non seulement fragilise la trésorerie de ces entreprises mais également a un impact budgétaire sur le compte d’exploitation de ces structures particulièrement en cette période de fin d’année », a fait savoir Sani Yaya qui semble avoir bien des raisons de faire cesser ces pratiques, vu les urgences de l’heure : « les besoins dans le pays ne cessent de croitre, surtout durant cette période de crise sanitaire dont les effets impactent négativement la vie sociale des populations, nécessitant une mobilisation accrue des ressources pour y faire face », argumente-t-il.
Ne seront finalement prises en compte que des dépenses des étrennes publicitaires, et les ressources engrangées serviront à la réalisation d’actions de responsabilité sociale en soutenant le gouvernement dans la mise en œuvre de projets visant l’amélioration des conditions de vie des populations et la cohésion sociale, notamment les cantines scolaires et de façon générale la promotion des filets sociaux, la prise en charge de la femme enceinte et du nouveau-né (projet Wézou) etc.
Une goutte d’eau
Cette note qui entend mettre fin aux dépenses que l’on pourrait qualifier de superflues, peut sonner comme une volonté de l’exécutif de dépenser utilement dans une période où la crise sanitaire a comme charançonné les bourses étatiques, avec pour conséquences des éternelles levées de fonds devenues le péché mignon de nos dirigeants.
Mais ne doit-on pas chercher les solutions ailleurs que du côté de ces dépenses de fin d’année ? Les faire cesser suffira-t-il pour réussir les vastes chantiers ? Ne sont-elles pas une goutte d’eau à côté des dépenses que les dirigeants eux-mêmes se permettent l’année durant?
Si les autorités veulent vraiment améliorer les conditions de vie des populations et la cohésion sociale, sans doute leur faudra-t-il revoir leur train de vie qui n’a pas changé depuis l’apparition de la Covid-19 en terre togolaise. Comment prendre au sérieux cette annonce quand les salaires des ministres n’ont jamais été un tant soit peu revus pour soutenir le choc économique ?
L’exécutif veut jouer la carte de l’économie, mais les députés n’ont jamais émis l’idée de la revue en baisse de leur salaire afin d’aider à la « mobilisation accrue des ressources »chère à Sani Yaya.
Comment peut-on espérer sortir aussi rapidement de cette crise quand les mêmes députés, qui n’ont d’élus que le nom, qui passent plus leur temps à avaliser les anecdotiques projets de loi qu’à considérer les conditions de vies de ceux qu’ils disent représenter, continuent de bénéficier d’aussi insolents émoluments, sans compter leurs bons de carburant mensuels ?
Quid des membres du bureau à l’Assemblée nationale qui sont des intouchables ?Aime-t-on assez ce pays pour avoir le courage de prendre des décisions pour une fois populaires ?Il faut avoir bu toute honte pour continuer de percevoir plus d’un million de FCA en qualité « d’élus du peuple », et encore dans une période aussi délétère où les citoyens, eux, n’obtiennent même pas la revalorisation du Salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) difficilement payé. C’est par là qu’il faut commencer, par là qu’il faut secouer le cocotier. Les étrennes à elles seules ne suffisent pas.
La mauvaise gestion des deniers publics gangrène le pays en raison de l’impunité ambiante.
Sodoli Koudoagbo
Source : Le Correcteur / lecorrecteur.info