Le 1er mai a été célébrée au Togo comme partout dans le monde, la fête du travail. Moment de « communion » entre employeurs et employés qui s’unissent, le temps d’un rafraichissement. Pour cette année 2022, cette célébration s’est faite dans une ambiance particulière. Chose inhabituelle, la rencontre entre syndicats et représentants du gouvernement s’est déroulée en pleine session du Conseil national du dialogue social (CNDS). Le gouvernement appelle au dialogue, tout en barrant la route à ceux qui y sont disposés, comme les responsables du Syndicat des enseignants du Togo (SET).
Comme ce fut le cas dans les précédentes célébrations, les travailleurs ont présenté leurs cahiers de doléances. Les organisations syndicales ont saisi l’occasion pour solliciter plus de moyens afin de mieux prendre en main les problèmes de l’éducation et de la santé à travers une éducation ouvrière approfondie et continue. Elles ont sollicité du gouvernement l’harmonisation du paiement des indemnités de départ à la retraite dans la fonction publique, tout en plaidant pour une révision du Code du travail afin de permettre à tous les travailleurs du pays de bénéficier des mêmes droits.
La réponse aux doléances des travailleurs a été apportée par le ministre de la Fonction publique, du Travail et du Dialogue social, Gilbert Bawara. Ce dernier s’est fendu d’un discours aux termes duquel il a réitéré la « disponibilité » du gouvernement à faire preuve d’un sens d’écoute et de concertation dans la recherche de solutions concrètes et durables aux problèmes sociaux. « Nous prenons acte du cahier de doléances des organisations syndicales des travailleurs. Nous prenons bonne note des préoccupations exprimées par les organisations professionnelles d’employeurs », a-t-il déclaré, soutenant que le gouvernement a toujours privilégié le dialogue et la concertation. « Nous continuerons dans le même sens pour le bien-être de tous », a-t-il poursuivi.
Le ministre Bawara a profité de sa tribune pour dire « sa vérité » aux travailleurs, leur conseillant de respecter les textes en matière de syndicalisme. « Nous exhortons vivement les organisations syndicales des travailleurs à être attentifs au respect des droits et règlements qui existent dans notre pays », a-t-il appelé. Avant de conclure : « Nous devons continuer à dialoguer, mais si nous voulons aller beaucoup plus loin dans ce que nous recherchons, nous avons besoin d’un climat de paix et de sérénité. Et le climat de paix et de sérénité ne se décrète pas. Ce ne sont pas les lois et les décrets qui vont garantir cela. C’est dans nos habitudes et dans nos comportements ».
Inutile de demander si ces propos émanent de Gilbert Bawara, lui qui, il y a quelques jours, a mis fin à la carrière d’une centaine d’enseignants fonctionnaires à qui l’on reproche d’avoir été à l’origine des mouvements de grève qui ont secoué le secteur de l’éducation courant mars et avril 2022. C’est bien le même ministre qui a pris une part active dans la chasse à l’homme lancée contre les responsables du Syndicat des enseignants togolais (SET) à l’annonce de la mise en place de ce syndicat, et qui a contribué à mettre certains d’entre eux sous les verrous en 2021, dans des conditions dignes de l’interpellation de vulgaires brigands. Certains ont été contraints de rentrer dans le maquis.
Même au cours de l’année 2022, cette exagération s’est poursuivie. Gilbert Bawara ne s’est pas retenu dans les déclarations contre les enseignants qui dénonçaient le fameux mémorandum d’entente signé par des organisations syndicales qui ont accepté de ne pas appeler à la grève pendant les cinq (05) prochaines années. Pour la seconde fois depuis son existence, le SET a vu ses responsables arrêtés pour des faits visiblement imaginaires. Après la série de suspension du cadre de l’enseignement pour au moins 150 d’entre eux, ils sont une centaine à se voir notifier leur licenciement définitif, à quelques jours de la fête du travail.
Et puis, celui qui chante aujourd’hui le dialogue n’a pas été en mesure de faire appel aux responsables du SET lorsque les occasions de dialogue entre syndicats et gouvernement s’étaient présentées, comme le 1er mai. Après avoir brimé les travailleurs, fait déposer nombre d’entre eux en prison, licencié d’autres et exclu d’autres encore, le gouvernement tente de se faire passer pour un champion du dialogue.
En dehors de ce discours qui tranche avec les actes que pose le gouvernement, il y a aussi le fait qu’au Togo, l’autorité ne respecte jamais les accords. C’est d’ailleurs ce qui occasionne régulièrement les mouvements d’humeur des travailleurs. C’est bien d’appeler au dialogue, mais c’est mieux quand on respecte les accords signés ou la parole donnée.
G.A.
Source : Liberté / libertetogo.info