Des péages pour offrir des ressources pour l’entretien routier et la modernisation du réseau, c’est tentant comme argument-il en existe d’ailleurs dans des pays normaux. Mais lorsqu’ils saignent à blanc les populations et leur corsent la vie déjà chère, cela laisse à désirer. C’est le cas justement des habitants d’Aképé et de Noépé, des banlieues de Lomé, qui relève de l’absurdité totale. Explication.
Faire des recettes afin d’assurer l’entretien routier et la modernisation des routes, c’est un tantinet légitime. Mais le cas des péages d’Aképé sur la nationale N°4 et d’Aképédo sur le grand contournement fait désordre.
L’incohérence Aképé-Noèpé
Entre Sanguera et Akepe, se trouve un péage. C’est le passage obligé pour les usagers de la nationale N°5 venant de Kpalimé pour rallier Lomé. A moins de vouloir le faire par la zone Legbassito et environs via la voie du grand contournement joignant le Togo au Ghana, à partir de Noèpé. Même là aussi, ils sont contraints de mettre la main à la poche, car un péage y a été érigé notamment dans la localité appelée Aképédo. Ce contournement dessert généralement les habitants de Noépè qui voudraient accéder au centre-nord de la capitale. Là où le bât blesse, c’est la situation géographique ou la proximité d’Aképé et de Noèpé par rapport à Lomé.
En effet, ces deux localités, autrefois distantes de la capitale, font aujourd’hui partie intégrante de sa banlieue, au regard de l’urbanisation galopante. L’agrandissement de Lomé a presque déjà englouti Sanguera, envahi Aképé et atteint Noèpé. C’est une constante que face à la cherté des terrains en ville, beaucoup de Togolais se sont installés dans ces deux localités avoisinantes, mais viennent quotidiennement au boulot à Lomé. Mais ces riverains sont contraints de payer le péage tant à l’aller qu’au retour, qu’ils soient motocyclistes ou automobilistes.
Les frais de péage, faut-il le rappeler, ont connu depuis le 18 mars 2021 une hausse. Contre 300 F jusque-là, les conducteurs de véhicules légers paient désormais 500 F. Dans la semaine, ils doivent alors débourser au moins 5000 F donc pour les péages, et au bas mot 20 000 F pour le mois. Pour ceux qui boulottent aussi les samedis, l’addition est donc plus corsée. Quant aux motocyclistes, c’est entre 500 F et 600 F la semaine et 2000-2500 F le mois. Toutes ces dépenses, pour quels salaires à la fin du mois !
Ceinturage de Lomé par des péages
L’absurdité Aképé et Noèpé, loin d’être un duo de cas isolés, fait partie du moule général de l’enserrement de la capitale par des péages. Tout porte à croire que quelque part, on a décidé de rançonner les habitants de la banlieue de Lomé ou simplement usagers des routes nationales et autres axes donnant sur la capitale.
En effet, la capitale est encerclée de partout de péages, entre quatre (04) et cinq (05). Pour rallier Lomé, les usagers de la route Lomé-Kpalimé doivent payer au péage d’Aképé ou d’Aképédo sur le grand contournement. Ceux empruntant la nationale N°1 doivent le faire à Davie. Les usagers de la nationale N°2 paient le péage à Vodougbe à l’entrée d’Aneho. Ceux qui viennent de la route Lomé-Vogan-Anfoin refaite après des années de souffrance – détournement des fonds – ne sont pas exemptés. Il a été installé un péage à Kpomé où ils paient.
Lomé est donc ceinturée de péages et les habitants de la banlieue ou simplement usagers de ces axes sont quotidiennement rançonnés au moyen des péages dont les tarifs ont d’ailleurs connu une hausse tout dernièrement. Depuis le 18 mars 2021, les nouveaux prix sont comme suit : véhicules légers : 500 F ; minibus de 9 à 15 places : 6000 F ; autocars/bus : 1500 F ; poids lourds 2 essieux : 2500 F ; poids lourds 3 essieux : 3000 F ; poids lourds 4 essieux : 3500 F et poids lourds 5 essieux et plus : 5000 F. Nouveauté, les motos et tricycles sont aussi taxés respectivement de 50 et 100 F par passage.
Toute cette ponction ne fait qu’éroder davantage le pouvoir d’achat des populations, déjà faible. Si les commerçants sont obligés de payer quotidiennement ces péages pour convoyer les produits agricoles sur la capitale et desservir ses populations, il va de soi que cela rejaillisse sur les coûts de revient de ces denrées dans les marchés.
Saignement no limit des contribuables
Au Ghana voisin, depuis le 18 novembre 2021, les péages n’existent plus. Les autorités y ont vu un goulot d’étranglement et décidé de leur suppression. « Suite à la présentation du budget 2022 par le ministre des Finances au nom de Son Excellence le Président de la République du Ghana, le mercredi 17 novembre 2021, le ministre des Routes et des Autoroutes ordonne l’arrêt de la collecte des péages des routes et des ponts dans tout le pays. Cette directive prend effet à partir du jeudi 18 novembre 2021 à minuit», a annoncé une note du ministre des Routes et des Autoroutes Kwasi Amoako-Attah. Comme alternative pour assurer l’entretien routier, les autorités ghanéennes ont décidé d’imposer une taxe de 1,75 % sur les transferts mobiles d’argent et d’autres transactions électroniques qui dépassent 100 GHc, soit 10 000 F par jour.
Au Togo, ce serait une gageure d’espérer de la part du pouvoir en place une suppression des péages, même s’il existe mille solutions de rechange pour faire faire des sous à l’Etat afin d’assurer l’entretien et la modernisation du réseau routier. Les consommateurs étaient d’ailleurs déjà mis à contribution pour l’entretien routier. Sur le litre de carburant payé à la pompe, figure bien une taxe y consacrée perçue depuis des lustres, en tout cas à l’époque de Ferdinand Tchamsi et de sa structure , le Fonds d’entretien routier (FER). Mais les fonds ont été l’objet de dilapidation et jamais les responsables n’ont été inquiétés. Le pouvoir a juste changé de nom à la société devenue Fonds routier (FR) puis plus tard Société autonome de financement de l’entretien routier (SAFER).
Pour des observateurs avisés, vu que la ville de Lomé a déjà avalé les localités d’Aképé et de Noèpé et la fréquence de passage des riverains, ce serait du bon sens de repousser ces péages un peu plus loin, d’en faire même un seul. Et beaucoup proposent par exemple d’installer le péage à Bagbe. Mais Dieu seul sait si les gouvernants ont envie d’alléger la charge aux populations. Ici, le régime est obsédé par la volonté de se faire des sous sur le dos du pauvre contribuable. Vingt-quatre milliards (24 000 000 000) FCFA, c’est l’objectif visé par la SAFER comme mobilisation au crédit du péage cette année, dont deux milliards (2 000 000 000) FCFA de taxe sur les véhicules à moteur (TVM).
Les Togolais ne sauraient compter sur une quelconque clémence (sic) des dirigeants qui ont décidé de saigner à blanc les pauvres contribuables. Sans aucun état d’âme, ils rançonnent régulièrement les Togolais avec des hausses intempestives des prix de services et autres biens : prix des produits pétroliers, taxe sur les véhicules à moteur, taxe d’habitation, péages, etc. Tout cela ne fait que corser la cherté de la vie et éroder davantage le pouvoir d’achat des populations. Les Togolais sont manifestement condamnés à boire le calice jusqu’à la lie.
Source : L’Alternative / presse-alternative