Depuis 1914, l’Eglise Catholique a toujours porté un regard attentif à la situation des migrants et réfugiés de par le monde. Elle a instauré, à cet effet, une Journée mondiale du migrant et du réfugié (JMMR) célébrée chaque dernier dimanche du mois de septembre. Ce dimanche 25 septembre 2022 était la 108eme édition. Cette année, le thème choisi par le Pape François pour exprimer sa préoccupation à l’égard de ces différentes personnes vulnérables qui doivent se déplacer pour une raison ou une autre, est : « Construire l’avenir avec les migrants et les réfugiés ».
Au Togo, pays d’accueil de nombreux réfugiés et migrants venus de toutes les nationalités (Bénin, Burkina Faso, Burundi, Côte d’Ivoire, Congo Brazzaville, Gabon, Ghana, Irak, Mali, Nigéria, RCA, RCD, Rwanda, Sierra-Léone, Somalie, Tchad, Turquie), l’Eglise Catholique n’a pas dérobé à la tradition. Hier dimanche à la Paroisse Saints Martyrs de L’Ouganda, une grande messe d’action de grâce présidée par Mgr Nicodème Barrigah-Benissan, l’Archevêque de Lomé, a été dite pour marquer cette journée. Plusieurs refugiés et migrants vivant au Togo, ont pris part à cette célébration.
Les lectures de cette célébration eucharistique ont été tirées du livre du prophète Amos 6, 1…7, du Psaume 145, de la première lettre de saint Paul à Timothée 6, 11-16. L’Evangile du jour a été tiré de Luc 16 : 19-31. Dans son homélie, l’Archevêque de Lomé est revenu sur le message du Pape. Il a invité chacun à dépasser les stéréotypes et à porter un autre regard sur les réfugiés et migrants qui vivent dans nos communautés.
« Le thème – Construire l’avenir avec les migrants et les réfugiés – choisi par le saint Père cette année nous invite tout simplement à placer les migrants et les réfugiés au centre de notre attention. C’est l’occasion de réfléchir sur la manière dont nous accueillons ces personnes vulnérables qui frappent à notre porte. Ces dernières années, les médias nous ont rapporté des scènes choquantes et indignes sur la situation des migrants. Des conditions d’accueils et d’intégration décevantes. Chacun ici a été indigné. Mais autant nous sommes choqués par ces images, autant devons-nous nous remettre en question sur l’accueil que nous aussi nous réserverons aux réfugiés qui vivent parmi nous ici. Autant nous souhaitons un bien-être à nos frères et sœurs de la diaspora, autant devons-nous nous inquiéter de la situation de ces ressortissants qui vivent parmi nous ici. Nous considérons parfois que les migrants ou les réfugiés sont venus nous piller. Mais au contraire, ils sont venus nous enrichir. (…) Aux réfugiés et migrants qui vivent au Togo, je voudrais vous dire que votre situation ne laisse l’Eglise insensible. Que ce jour déclenche en chacun de nous une attention à l’égard de nos migrants et réfugiés.
La parabole de Lazard et du riche de l’Evangile du jour, c’est pour nous montrer que la richesse peut-être un danger, parce qu’elle risque de fermer nos yeux à la souffrance de nos frères. Mais cela ne veut dire que nous devons demeurer dans la pauvreté. L’Eglise est souvent considérée comme l’opium du peuple. Mais elle ne condamne pas en réalité, la richesse. (…) La question aujourd’hui est qu’est-ce que je fais des biens que le Seigneurs a déposés dans mes mains ? Je me réjouis du fait qu’un tel évangile soit lu aujourd’hui où nous célébrons la Journée mondiale du migrant et du réfugié. (…) Nous devons porter un autre regard sur les réfugiés et migrants qui vivent parmi nous », a conseillé l’Archevêque de Lomé.
Cette messe qui est une première du genre au Togo, a été également l’occasion pour ces migrants et réfugiés de saluer l’hospitalité des Togolais et le soutien à eux apporté par les autorités togolaises. Mais ils n’ont pas passé sous silence les drames dont ils sont victime au quotidien au sein de la communauté.
« Ces drames, nous les devons au regard accusateur porté sur nous. Le migrant ou le réfugié est en effet perçu comme un malfaiteur, un paresseux, un opportuniste… C’est donc la personne dont il faut se méfier, s’éloigner, s’abstenir de toute relation sérieuse. C’est la personne qu’il faut surveiller, qu’on peut exploiter, maltraiter et ceci parce qu’elle n’est pas sur sa terre. (…) L’homme ne se connait pas assez lui-même et c’est pour lui une prétention démesurée que de prétendre connaître avec perfection son voisin, et de surcroît l’étranger qui est à côté de lui. (…) Le migrant ou réfugié c’est aussi un ingénieur, un entrepreneur, une gestionnaire, un artiste, un juriste, une informaticienne, un maintenancier, un jardinier, mais comment construire l’avenir avec vous tant qu’il porte cette charge ? Nous souhaitons que les autres membres de l’église se montrent plus accueillants, compréhensibles et collaboratifs avec nous. Nous remercions les acteurs comme le HCR, l’OIM, le ministère de la Sécurité et de la Protection civile, les Affaires sociales, la Coordination nationale d’assistance aux réfugiés (CNAR), Green Village Foundation et bien d’autres acteurs dont les actions multiformes nous permettent quotidiennement de continuer par espérer », a indiqué W. MOUKALA-PIKA, représentant des refugiés ou migrants du Congo Brazzaville.
La célébration de cette journée est marquée par une exposition des savoir-faire de ces migrants et réfugiés vivant au Togo. Les organisations gouvernementales, non-gouvernementales et internationales qui viennent en aide à ces réfugiés ou migrants au Togo, ont aussi présenté au public les différentes actions menées en leur faveur durant ces dernières années.