Emmanuel Macron a commémoré le jeudi 15 août le 80eme anniversaire du débarquement de Provence, occasion d’un nouvel hommage aux combattants tombés sur les théâtres de guerres. A cette cérémonie, aux côtés du président français, cinq chefs d’Etats africains dont le togolais Faure Gnassingbé étaient présents pour célébrer les soldats qui ont sacrifié leur vie. Paradoxalement, au Togo depuis plusieurs mois, des voix s’élèvent pour demander des hommages officiels aux soldats tués lors des attaques terroristes au nord du pays.
Dans les nations évoluées, c’est une tradition de longue date de célébrer la mémoire des femmes et des hommes morts en opération. Un acte mémoriel qui se veut aussi un combat contre l’oubli. C’est donc naturellement que la France honore depuis des lustres des trépassés au service d’un État sur les théâtres de guerre. Un exercice auquel Emmanuel Macron s’est encore plié jeudi , 15 août 2024 à Toulon dans l’est de la France. A cette occasion, le Président français a convié des Etats africains dont les citoyens ont participé activement à l’opération « Dragoon » le 15 août 1944 qui a été déterminante dans la libération totale de la France lors de la seconde guerre mondiale .
« Officiers de l’Empire ou enfants du Sahara, natifs de la Casamance ou de Madagascar, (…) ils n’étaient pas de la même génération, ils n’étaient pas de la même confession, (…) ils étaient pourtant l’armée de la nation, armée la plus fervente et la plus bigarrée », a rappelé le Chef de l’État français, en soulignant le rôle joué par l’armée d’Afrique lors du débarquement de Provence, dans la nuit du 14 au 15 août 1944. Le Président français a insisté sur le fait que les noms de ces soldats « doivent continuer d’être donnés à nos rues, nos places, pour inscrire leurs traces impérissables dans notre histoire ».
A la cérémonie, des pays comme la Tunisie, la Côte d’Ivoire ou le Sénégal ont envoyé un ministre, d’autres comme le Tchad ou le Bénin leur ambassadeur. Le Togo a été représenté par le Chef de l’Etat, Faure Gnassingbé. Un vrai contraste de voir le Président togolais tout souriant de participer à un hommage à des soldats pendant qu’il rechigne à offrir des honneurs similaires aux militaires tombés au nord du Togo.
Les soldats togolais ne méritent-ils pas des hommages… ?
Depuis l’annonce officielle des premières attaques terroristes au nord du Togo en 2021, plusieurs soldats sont malheureusement tombés sur le champ de bataille. Si leur nombre exact n’est pas publiquement connu, de nombreux soldats ont laissé leur vie dans les combats contre ces hommes sans foi ni loi. Le 20 juillet 2024, c’est le poste avancé de Kpékpankandi dans la Préfecture de Kpendjal qui a subi une nouvelle attaque des terroristes. Selon diverses sources, l’attaque aurait fait une dizaine de morts dans les rangs des Forces de défense et de sécurité togolaises.
Alors que le gouvernement s’est muré dans le silence sur la situation au nord du pays, des partis de l’opposition s’étaient montés au créneau, au lendemain de la dernière attaque, pour non seulement demander des comptes à l’exécutif mais aussi des hommages aux soldats tués. « La DMP exige du gouvernement des actes pour rendre des hommages mérités à ses vaillants soldats tombés sur le champ d’honneur avec leur identification et de traiter leurs familles avec dignité et respect contrairement à ce qui se fait jusqu’à ce jour », a souligné la Dynamique pour la Majorité du Peuple (DMP) dans une déclaration publiée le 24 juillet 2024.
Malgré les interpellations sur la nécessité de rendre un hommage mérité aux trépassés dans la lutte contre le terrorisme, « le gouvernement togolais et Faure Gnassingbé restent enfermés dans un mutisme abscons, au demeurant méprisant et outrageant pour le peuple togolais », a dénoncé l’Alliance nationale pour le Changement (ANC) dans un communiqué publié le 04 août 2024.
S’il existe, une journée nationale consacrée et observée chaque 21 juin de l’année par le peuple togolais en mémoire non seulement de ses vaillants fils et filles tombés au cours de la lutte pour l’accession du pays à la souveraineté internationale, mais aussi de ses patriotes tombés au champ d’honneur dans la défense et la protection de l’intégrité territoriale de la nation, elle n’a pas absolument rien à voir avec des hommages à rendre aux soldats morts en opération.
En effet, dans une nation où les dirigeants ont de la considération pour la mémoire des soldats qui ont donné leur vie sur les champs de bataille, l’acte mémoriel commence par des cérémonies immédiates d’hommages, effectuées peu de temps après le décès. L’occasion pour la nation de saluer le sacrifice et de graver la mémoire de ces gens dans l’histoire. Ces hommages sont également un moyen de témoigner de la solidarité et de la compassion de tous les citoyens aux proches des soldats.
Au Togo de Faure Gnassingbé, aucune reconnaissance mémorielle n’est offerte à ces héros qui constituent des remparts pour l’existence même de l’Etat. Une posture déplorable qui n’est toutefois que la traduction d’un mépris hallucinant à l’égard du peuple togolais.
Lemy Egblongbeli
Source: lecorrecteur.tg