Togo/06 septembre 1994 – 06 septembre 2024 : Il y 30 ans que David Ahlonko Bruce a été enlevé à quelques pas de l’Etat-major, la famille toujours sans nouvelle

Il y a 30 ans que David Ahlonko Bruce, 49 ans, haut fonctionnaire du ministère togolais des affaires étrangères et ancien chef de cabinet de Mgr Philippe Fanoko Kpodzro, président du Haut Conseil de la République (HCR), parlement de la transition, a été enlevé à Lomé. 30 ans de recherches infructueuses. 30 ans de questionnements. 30 ans d’angoisse.  

Le 06 septembre 1994, comme tout bon père, David Ahlonko Bruce a décidé de déposer sa fille et la nièce de son épouse, toutes deux mineures, à l’école avant d’aller au bureau. Mais à quelques encablures de l’Etat-major des Forces armées togolaises, sa voiture de marque Peugeot aurait été prise en étau par deux cars militaires, un devant et l’autre derrière pour l’empêcher de progresser. Il aurait été sorti et embarqué dans l’un des deux véhicules militaires. Après avoir sommé les enfants de descendre, un des soudards était monté à bord de la Peugeot de David et était parti avec les autres. « Dites à votre maman qu’il est au camp de la Gendarmerie », auraient-ils dit à ces mineures tétanisées.

Informés, les parents s’étaient lancés à sa recherche. Au camp de la Gendarmerie, ils se seraient fait dire que David n’y était jamais venu. Le Vatican où séjournait Mgr Kpodzro au moment des faits, a été mis à contribution. Le chef de l’Etat d’alors, le Général Gnassingbé Eyadema, fut personnellement interpellé par le Saint-Siège. Sans oublier l’implication très active du Département d’Etat américain. Mais en vain. Personne n’a vu l’ancien chef de cabinet du président du HCR. Personne ne pouvait situer la famille sur ce qui lui était arrivé après son enlèvement non loin de l’Etat-major des FAT. 

Le 07 septembre 1994, Amnesty International a officiellement saisi le président de la République togolaise, le Premier ministre Edem Kodjo, les ministres des affaires étrangères, de la sécurité, et des droits de l’homme à travers une campagne intitulée «‘’Disparitions’’, craintes d’exécutions extrajudiciaires ». Après avoir indiqué que M. Bruce a été pris pour cible en raison de ses activités pendant la période de transition politique au Togo, et qu’il n’était pas gardé au camp de la gendarmerie, l’ONG internationale des droits de l’homme a appelé « les autorités togolaises à mener immédiatement une enquête sur la « disparition » de David Bruce, afin d’établir où il se trouve et l’identité des responsables de son enlèvement ». Des appels renouvelés qui sont restés sans suite.

« Aucune évolution n’a été constatée dans l’affaire de la disparition en 1994 de David Bruce, un haut fonctionnaire du ministère des affaires étrangères favorable à l’opposition, qui fait toujours l’objet d’une enquête du gouvernement », a déploré le Département d’Etat américain dans son rapport 2001 sur les droits de l’homme dans le monde. 

Trente ans jour pour jour, le constat est le même. Le mystère reste entier. Même le processus de vérité, justice et réconciliation n’a pas permis de faire évoluer cette affaire. Bien que des membres de la famille aient fait de déposition, aucun élément nouveau n’a apparu pour soulager leurs peines de plusieurs années. Eux qui se sont déjà résolus à ne plus revoir leur fils, ne souhaitent qu’une chose : retrouver ses restes et organiser ses funérailles. Auront-ils cette opportunité un jour ?

J.D.

Source : Liberté

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