Ceux qui empruntent la voie du Campus Nord ont pu remarquer ces derniers temps un groupe inhabituel de personnes âgées rassemblées devant les locaux de la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS). Certains, armés de béquilles, attendent patiemment leur tour. Ces retraités, venus effectuer leur contrôle de vie biannuel, espèrent garantir le versement de leurs pensions. Mais l’expérience est loin d’être sans difficultés.
Depuis 2004, la CNSS a adopté la bancarisation pour le paiement des prestations sociales, réduisant ainsi les interactions physiques avec les bénéficiaires. Pour s’assurer que les pensions sont bien versées aux retraités vivants, un contrôle de vie a été instauré, obligatoire deux fois par an, entre le 30 avril et le 15 juin et entre le 31 octobre et le 15 décembre, en vertu de l’article 200 de l’arrêté N°002/2012/MTESS/CAB/DGTLS.
En août 2022, la CNSS a lancé une plateforme en ligne, BIOSECU.CNSS.TG, basée sur la reconnaissance faciale. Grâce à ce système, les retraités devraient pouvoir réaliser le contrôle de vie depuis chez eux, à condition de disposer d’un smartphone, d’une connexion internet et d’une pièce d’identité valide. Cependant, selon de nombreux témoignages, la plateforme n’a jamais réellement fonctionné.
Pendant que la plupart des retraités rencontrent d’énormes difficultés pour accéder à la plateforme, des jeunes installés devant le siège de la CNSS semblent y avoir un accès privilégié. Ces intermédiaires facturent 1000 FCFA pour aider les retraités à valider leur contrôle en ligne, un service devenu presque indispensable, faute de pouvoir effectuer cette démarche à distance.
« Chaque année, c’est le même scénario. J’ai essayé plusieurs fois depuis chez moi, sans succès, mes enfants aussi. Finalement, j’ai dû venir ici pour payer 1 000 francs et finir avec ce problème », se désole A.D, un retraité depuis 22 ans visiblement frustré ayant travaillé à l’OTP. En effet, sans autre choix, ces retraités n’hésitent pas à se déplacer, malgré les coûts et les tracas, pour ne pas risquer de perdre leur pension.
Outre ces frais qu’ils payent, la situation présente une humiliation pour ces aînés, forcés d’attendre en bordure de route. « C’est vraiment un manque de considération. Nous restons parfois debout, sans siège. Nous sommes des papas, des grands-pères. Ce n’est pas normal », déplore une dame retraitée.
Certains retraités se déplacent même depuis l’étranger, comme ce bénéficiaire venu du Ghana pour effectuer son contrôle malgré une santé fragile. Pour ces personnes, la promesse d’une technologie censée leur simplifier la vie ne reste qu’une promesse non tenue.
Pour de nombreux retraités, cette situation met en lumière une gestion problématique de la dématérialisation du service. Si la CNSS a choisi de réduire les interactions physiques, encore faudrait-il que la solution en ligne soit accessible à tous.
Les responsables de la CNSS sont ainsi invités à revoir ce système de contrôle de vie, afin de permettre à tous les retraités, quel que soit leur état de santé ou leur situation géographique, de pouvoir le faire en ligne et bénéficier de leur pension dans la dignité et le respect.
Pour rappel, ce contrôle concerne les bénéficiaires des droits viagers (pensions et/ou rente) résidant sur le territoire national et à l’extérieur.
Joël D.
Source : Libertetogo.tg