« Freedom Togo-MLN, mouvement de libération nationale créé le 20 juillet 2024, a été infiltré par les services togolais. Cette infiltration en profondeur leur a permis de prendre le contrôle de certains organes de gouvernance du mouvement et d´en dicter l´agenda. Des divisions et tensions insurmontables sur les orientations stratégiques du mouvement en sont ainsi apparues. Dans l´impossibilité de préserver l´indépendance et l´intégrité des objectifs de Freedom Togo-MLN, le vice-président et son courant politique, ont le regret de vous annoncer leur retrait de toutes les instances de Freedom Togo-MLN à compter de la date de signature du présent communiqué.» Voilà
Le drame politique togolais, symbolisé par le règne dictatorial des Gnassingbé de père en fils, depuis plus d´un demi-siècle, la tentative des Togolais, depuis au moins trois décennies, au pays et dans la diaspora, pour se libérer d´ une telle gouvernance inhumaine, n´auront pas fini de nous réserver leurs surprises et rebondissements, souvent défavorables, à l´opposition et aux populations togolaises. Avec le retrait de François Akila BOKO de toutes les instances de Freedom Togo-MLN, selon le communiqué de presse publié le 28 janvier 2025 par l’intérêt, un regroupement de l’opposition dans la diaspora, mis sur pied six mois auparavant, est sur le point d’imploser avant d’avoir vraiment fait parler de lui en termes d’activités. Rappelons que Monsieur Boko était le vice-président du mouvement, et en tant que tel il était pratiquement le patron, l´une des personnalités principales autour du mouvement vit le jour. La surprise des uns et des autres, après l´annonce du retrait de François BOKO, est d´autant plus grande que dans le communiqué de presse il est mentionné : «…le vice-président et son courant politique, ont le regret de vous annoncent leur retrait de toutes les instances de Freedom Togo-MLN à compter de la date de signature du présent communiqué.» Si le vice-président du Liberté Togo-MLN parle de son courant avec lequel il se retire, cela voudrait-il dire que le Mouvement de l’opposition, porté sur les fonts baptismaux tambours battants, n’était pas et n’est peut -être toujours pas une entité homogène ?
Pour le moment, comme en de pareilles circonstances où la passion, l´émotion et les spéculations semblent toujours prendre le dessus, étant devenus le sport national des Togolais, chacun va de sa petite idée pour expliquer ce qui reste à l´instant inexplicable. C´est pourquoi nous nous sommes rapprochés de certains de nos compatriotes en Allemagne proches du bureau exécutif du Freedom Togo-MLN pour espérer en savoir plus. Nous allons faire notre analyse de la situation à l’aide des prises de position des uns et des autres, surtout en nous basant sur les déclarations faites par Monsieur Boko pendant et après son départ du regroupement de l’opposition en exil. À lire les uns et les autres au sein du staff dirigeant du MLN, on al´impression que Monsieur Boko allé soit trop vite en besogne en annonçant son départ et celui de son courant sans vraiment chercher à résoudre les difficultés dont il parle, au sein du bureau exécutif du mouvement, où, selon ses attributions, il ne serait pas n’importe qui. Et c´est pourquoi le Secrétaire général de Liberté Togo-MLN, Jean-Sylvanus Olympio, n´y va pas par quatre chemins pour dénoncer une tentative de fragilisation de Liberté Togo-MLN et surtout une trahison de la part du Saint-Cyrien François Akila BOKO : «Quelle que soit cette situation qui se présente à nous, nous y ferons face et notre mouvement poursuivra sa feuille de route pour en finir avec la dictature Gnassingbé,…Je reste confiant et je vous demande de rester confiant et serein au nom de l’ensemble des Togolaises et Togolais qui nous font confiance. Cette dictature Gnassingbé doit se terminer et le MLN prendra part ! …Ce qui vient de se passer n’est pas un coup de tonnerre, c’est une trahison… Son départ orchestré dans la presse ressemble davantage à une tentative de fragilisation du mouvement qu’à un véritable souci de préserver son intégrité ».
Pour sa défense, l´ex-vice-président du mouvement de libération dit exprimer son désaccord avec ce qu´il définit par « bâtir une stratégie de lutte contre la dictature des Gnassingbé autour de la mémoire de Sylvanus Olympio et la surenchère mémorielle et émotionnelle », qui serait selon lui, « contre-productif et permettre au clan Gnassingbé de ressouder les siens autour du crime originel fondateur de leur régime. » Monsieur Boko parle surtout de la tentative des uns et des autres au sein du MLN de préférer «des envolées tribales et la haine primaire et nostalgique du Kabyè» comme stratégie de renversement du régime de dictature, qui aurait également pesé dans la balance et l´ incité à partir. Les anciens collègues au bureau exécutif du Freedom Togo-MLN de l´ancien ministre de l´intérieur de Gnassingbé Éyadéma ne sont aucunement de cet avis comme nous l´évoquions un peu plus haut. «…des envolées tribales et la haine primaire et nostalgique du Kabyè», comme l´écrit le vice-président démissionnaire, ont-elles vraiment été le comportement des uns et des autres au sein du personnel dirigeant de Freedom Togo-MLN ? Ou Monsieur Boko, à court d’arguments pour vraiment justifier son départ inattendu du mouvement de libération, tentait-il de saisir cet argument très sensé au Togo que sont le tribalisme et le népotisme pour clouer le bec de ses détracteurs ? Le Saint-Cyrien François Akila BOKO n´aurait-il pas réussi, malgré son comportement héroïque en 2005, en refusant de cautionner la prise du pouvoir dans le sang de Faure Gnassingbé, à se séparer définitivement du cordon ombilical d´avec le régime de Lomé, et serait-il un ambitieux qui agirait sous l´influence des officiers kabyè de l´armée tribale, comme le supposent certaines spéculations ?
Par ailleurs, la célébration de la mémoire de Sylvanius Olympio que François Akila BOKO rejette et prend comme un des prétextes pour démissionner ne tient pas la route. Depuis le début de la démocratisation en 1990, presque tous les partis politiques de l’opposition, en réclamant la fin de la dictature, se sont toujours référés à l’assassinat du père de l’indépendance togolaise en honorant sa mémoire. Et si la libération du Togo de la dictature des Gnassingbé se fait toujours attendre, ceci ne serait pas du tout dû à une certaine célébration ou centralité autour de la mémoire de Sylvanius Olympio. En évoquant dans sa réaction aux nombreuses critiques liées à son retrait du mouvement de libération MLN, François BOKO mentionne une polémique interne au mouvement ayant trait à un supposé contact discret des officiers bassars ou komkonbas qu´il soupçonne d´être téléguidés par le pouvoir pour piéger Liberté Togo-MLN. Comment peut-on qualifier une telle attitude qui consiste à ébruiter une affaire confidentielle, supposée ne jamais sortir des cercles du MLN, quel que soit ce qui pourrait arriver ? Ceci est-il destiné à saboter et à affaiblir Freedom Togo-MLN, ou à en faire la promotion ? Et surtout quel sera désormais le risque sécuritaire pour les soldats et officiers originaires de l´ethnie mentionnée, quand on sait qu´au sein de cette armée togolaise pas comme les autres, il y a eu dans un passé récent des exécutions de soldats et d´ officiers supérieurs que beaucoup d´observateurs avaient qualifiés d´épuration ethnique?
Finalement, c’est qui le vrai infiltré au sein de Freedom Togo ?
Malgré tous les malentendus possibles au sein des mouvements de libération de l´opposition togolaise, que ce soit au sein du Freedom Togo-MLN ou ailleurs, et malgré toutes les spéculations des uns et des autres, la triste réalité est celle-ci : notre pays le Togo ploie toujours sous une dictature militaro-familiale terrible de père en fils, dont il devrait se débarrasser. Et pour arriver à cette fin nous avons besoin de tous les citoyens ayant des qualités dans divers domaines ; et il est indéniable que François BOKO ait des qualités de portée internationale dont beaucoup de pays seraient fiers. Et nous ne croyons sincèrement pas que l´intéressé soit tiraillé entre une solidarité tribale sans avenir et sa ferme et sincère volonté d´en finir avec le régime de Faure Gnassingbé. Vivement que les tensions de part et d’autre baissent, que les choses se décantent rapidement, que la vérité, malgré les malentendus du moment, triomphe, et que les Togolaises et les Togolais soient ceux qui gagnent !
Samari Tchadjobo
Allemagne