La CEDEAO, la Guinée-Bissau et les intrigues de Umaro Sissoco Embaló

En six ans, l’espace CEDEAO a enregistré quatre coups d’État militaires (Mali ; Burkina Faso ; Niger ; Guinée). Traités de putschistes par des Chefs d’Etat civils de la CEDEAO, ces militaires auteurs des putschs se défendent, estimant que ces civils qui prennent en otage l’institution CEDEAO et qui s’érigent en donneur de leçon, sont plus putschistes qu’eux autres, militaires.

En effet, se référant à la définition de « coups d’Etat » telle qu’adopter par l’Union Africaine, on peut dire sans se tromper que des Chefs d’Etat civils de l’espace CEDEAO sont auteurs de « refus de remettre le pouvoir au parti ou au candidat vainqueur à l’issue d’élections libres, justes et régulières », et aussi « d’amendements ou de révisions des Constitutions ou des instruments juridiques pour porter atteinte aux principes de l’alternance démocratique ». Des pratiques que l’Union Africaine inscrit dans le registre des stratégies de coups d’Etat ou de putschs, à travers la définition qu’elle donne au « changement anticonstitutionnel de gouvernement » dans la « Charte Africaine de la Démocratie, des Elections et de la Gouvernance » qui dispose en son article 23, ce qui suit :

Les Etats parties conviennent que l’utilisation, entre autres, des moyens ci-après pour accéder ou se maintenir au pouvoir constitue un changement anticonstitutionnel de gouvernement et est passible de sanctions appropriées de la part de l’Union :

  1. Tout putsh ou coup d’Etat contre un gouvernement démocratiquement élu.
  2. Toute intervention de mercenaires pour renverser un gouvernement démocratiquement élu.
  3. Toute intervention de groupes dissidents armés ou de mouvements rebelles pour renverser un gouvernement démocratiquement élu.
  4. Tout refus par un gouvernement en place de remettre le pouvoir au parti ou au candidat vainqueur à l’issue d’élections libres, justes et régulières.
  5. Tout amendement ou toute révision des Constitutions ou des instruments juridiques qui porte atteinte aux principes de l’alternance démocratique.

Doit-on aujourd’hui donner raison à ces militaires, face au théâtre en tournage en Guinée, par l’un des fidèles élèves du syndicat des Chefs d’Etat de la CEDEAO, Umaro Sissoco Embaló qui ravale son vomi ?

En effet, le 11 septembre 2024, il y a juste sept mois, le Monsieur disait : « Je ne serai pas candidat en 2025. Mon épouse m’a conseillé de ne pas me présenter. Je respecte donc ses conseils ».

Je disais à l’époque, d’ailleurs tout comme plusieurs autres observateurs avisés, qu’à force de cheminer avec les porcs, le mouton finira par gouter aux excréments humains. Et voilà, le 03 mars 2025, Umaro Sissoco Embaló se livre à un rétropédalage qui relève des absurdités : « Je serai candidat à l’élection présidentielle du 30 novembre ». Waouh !

Comme les conseils de Dame Dinisia Reis Embaló ont peut-être évolué ! Ou peut-être dois-je dire que Umaro Sissoco Embaló venait de prononcer son divorce des conseils de sa chère femme, première Dame de la Guinée-Bissau, si bien-sûr celle-ci est restée fidèle à ses conseils qui ont amené Monsieur le Président de la Guinée-Bissau le 11 septembre 2024 à faire le serment de ne pas briguer un troisième mandat.

Un sérieux revers que le « syndicat des Chefs d’Etat » de la CEDEAO doit prendre à ses dépens, puisqu’ayant refusé de se conformer à la définition de « changement anticonstitutionnel de gouvernement » adoptée par l’Union Africaine dans la Charte Africaine de la Démocratie, des Elections et de la Gouvernance pour véritablement promouvoir la Bonne gouvernance, l’alternance, la Démocratie et l’Etat de Droit.

Cette situation réconforte dans la démarche de plaidoyer dont le but est d’amener la CEDEAO à adopter le principe de la limitation des mandats des Chefs d’Etat et des Chefs de Gouvernement (formule répondant à l’appellation de l’instance dirigeante de l’organisation CEDEAO : Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement) pour renaitre de ses cendres. Autrement dit, la formule dispose de la limitation des mandats des Chefs d’Etat pour les régimes présidentiels et de la limitation des mandats des Chefs de Gouvernement ou Président du Conseil des Ministres pour notamment les pseudos régimes parlementaires.

L’adoption du principe de la limitation des mandats va permettre à la CEDEAO de mettre définitivement fin au diktat des Chefs d’Etat véreux qui, à travers leurs attitudes totalement irresponsables, avilissent l’image de l’institution. C’est inadmissible, cette facilité avec laquelle des hommes qui président à la destinée des Etats, peuvent changer de veste. Ces comportements rétrogrades et dangereux ne servent d’aucune leçon aux jeunes générations. A cette allure, l’avenir de l’Afrique s’annonce périlleux. Il est donc temps que la CEDEAO prenne ses responsabilités afin de mettre fin aux dérapages des brebis galeuses qui freinent l’élan de développement de la Mère Afrique. D’où l’appel aux organisations de la société civile ouest-africaines de poursuivre avec sérénité le plaidoyer pour l’adoption du principe de la limitation des mandats des Chefs d’Etat et Chefs de gouvernement ; D’où également l’appel à l’endroit de la CEDEAO à savoir raison garder en refusant de céder au chantage de certains régimes qui sont à l’œuvre pour saboter la mission de l’institution CEDEAO ; D’où encore l’appel à l’endroit de l’Union Africaine de ne pas rester spectatrice de la désintégration du continent et de l’état de déliquescence avancée dans lequel des dirigeants véreux, méchants et dictateurs abandonnent leur pays ; D’où en dernier ressort l’appel à l’endroit de la jeunesse africaine et ouest-africaine en particulier à jouer efficacement son rôle dans le devenir du continent africain.

Rodrigue Ahégo
Libre penseur

Source : Togonyigba

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