Critiquée, moquée, boudée et isolée, la «5e république» de Faure Gnassingbé est mal partie

«…qu´est-ce que les Togolais vont faire? C´est une question à laquelle on ne peut pas répondre avec précision aujourd´hui. Mais, ce qui est certain, c´est que les Togolais, avec la colère qui les anime, avec la révolte qu´ils ont dans le ventre, eh bien, un jour viendra, un évènement se produira, et en ce moment les Togolais vont se lever tous ensemble, comme un raz-de- marée, et ils vont balayer tout devant. Ce jour, il n´est pas loin, parce que les Togolais veulent que ça change, d´une manière ou d´une autre, et le plus rapidement possible.» (Nathaniel Olympio, responsable du Front «Touche-Pas-À-Ma-Constitution», en mai 2025)


Faure Gnassingbé, contrairement à ce que l´on pourrait croire, doit être aujourd´hui le plus malheureux et le plus inquiet sur la terre togolaise. Et pour cause, celui qui vient de se ménager une présidence à vie en marchant sur la volonté populaire, en crachant sur la dignité de ses concitoyens, avec tout ce qui se passe comme critiques et réprobations au Togo, dans la sous-région et en Afrique, ne peut pas rester indifférent à l´intérieur de lui-même; même s´il a un coeur aussi dur pour pouvoir résister à la souffrance de son peuple. Oui, le désormais, supposé «collègue» de la présidente du conseil italienne Giorgia Meloni, du premier ministre britannique Keir Starmer ou du nouveau chancelier allemand Friedrich Merz, devrait avoir aujourd´hui beaucoup de soucis à se faire, au lieu de fêter une quelconque victoire politique.

Le premier ministre, le chancelier ou encore le président ou la présidente du conseil, malgré la différence dans la dénomination, est le chef du gouvernement de son pays. Dans tous ces pays dotés d´une tradition démocratique, le chef du gouvernement, à la moindre crise, au moindre scandale, peut voir sa coalition au parlement voler en éclats et être renversé à tout moment; ouvrant ainsi la voie à de nouvelles élections. Un scénario impossible au Togo à cause d´un parlement à 99,9% monocolore, aux ordres et de surcroît issu des élections truquées.
Donc comme on le voit, il ne suffit pas de copier des titres ou des attributions des chefs de gouvernements en usage dans les pays démocratiques, et les transposer dans un pays, comme le Togo, pour être un régime démocratique.

Les caractéristiques d´un état de droit ou de démocratie sont tellement claires et contraignantes qu´elles ne permettent aucun traficotage malhonnête, ou aucune escroquerie politique. Et comme pour corroborer le fait que la démocratie, avec tous ses différents systèmes, ne soit pas faite pour les amuseurs de galerie, la démocratie allemande a encore une fois prouvé son dynamisme en faisant douter Friedrich Merz, le candidat au poste de chancelier, avant qu´il ne soit élu, presqu´in extremis, au second tour. «À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire», dit-on. Tel doit être aujourd´hui le sentiment d´échec, de honte et d´humiliation auquel devraient être en prise Faure Gnassingbé et tout son gotha de collaborateurs, de conseillers et de courtisans qui prennent leurs concitoyens pour des moins que rien.

Après la prétendue prestation de serment dans la précipitation, samedi 3 mai 2025, qui ne fut qu´un fiasco total, la supposée 5e république qu´on tente d´imposer au peuple togolais, semble avoir du plomb dans l´aile. Ce qui s´est passé ce samedi noir à Lomé ne fut qu´une cérémomie de souillure des symboles de la république, à commencer par la vraie constitution togolaise de 1992. Pressé de rendre effectif son coup d´état constitutionnel, comme il en a pris l´habitude depuis 2005, le «prince-héritier» togolais, qui n´a aucun respect pour ses concitoyens, laisse traîner dans la boue les armoiries de la République. En effet, l´autre indétrônable thuriféraire du régime de dictature, depuis le père Éyadéma, l´octogénaire Barry Moussa Barqué, président d´un sénat dont les Togolais n´ont pas besoin, ayant battu tous les records dans le domaine des scandales financiers en toute impunité, «grand chancelier», retourne s´asseoir parce que les armoiries de la république qu´il devrait remettre au nouveau «Président du Conseil», Faure Gnassingbé, sont introuvables. Bienvenue dans la république bananière appelée Togo!

16 (seize) chefs d´état ont pris part, le même jour, samedi 3 mai 2025, à la cérémonie de prestation de serment du nouvellement élu président du Gabon, Oligui Nguema, à Libreville, pendant que Faure Gnassingbé avait dû se contenter de son cercle de courtisans et de fidèles pour la même cérémonie à Lomé. Pourquoi des présidents africains, dont certains de la sous-région ouest-africaine, ont préféré se rendre au Gabon, plutôt qu´au Togo? Aucun réprésentant de l´UA (Union Africaine), ni de la CEDEAO. La diplomatie de mensonge de notre ministre des Affaires Étrangères, Robert Dussey, habitué à sauter d´avion en avion, gaspillant ainsi l´argent des Togolais qui tirent le diable par la queue, n´a-t-elle pas fonctionné? Tout le monde en Afrique est-il désormais au courant de ce qui se passe d´inhumain et de politiquement inacceptable au Togo depuis plus d´un demi-siècle?

C´est normalement au Togo que tous les responsables politiques africains et tous les observateurs devraient affluer, pour toucher du doigt, «l´ingéniosité» du régime togolais, qui a consisté à faire changer une constitution, votée à plus de 98% par le peuple, sans consulter le même peuple, par un parlement aux ordres, en fin de mandat, pour en faire une nouvelle république, synonyme de passage du Togo d´un régime sémi-présidentiel à un régime parlementaire. Et toute cette gymnastique pour que quelqu´un puisse rester au pouvoir aussi lontemps qu´il le veut.
Nous pouvons aujourd´hui affirmer, sans aucun risque de nous tromper, que la prétendue «5e république», qu´on tente d´imposer aux Togolais par la force, est une république mort-née, qui n´a pas d´avenir, et qui est isolée et largement boudée par beaucoup de hauts responsables politiques africains. Et ceci devrait donner à réfléchir à Faure Gnassingbé et à son entourage, pour qu´ils perçoivent enfin la voie sans issue sur laquelle ils se trouvent. Notre pays est devenu une curiosité quant à la manière particulièrement méchante et inhumaine des soi-disant dirigeants de père en fils, de traîter leurs concitoyens. Et l´hérésie de la 5e république est venue éloigner davantage le Togo du concert des nations respectables.

Dans un de nos derniers articles nous affirmions que les jours du régime de Faure Gnassingbé étaient comptés, et que la balle se trouverait désormais dans le camp du peuple togolais, de son opposition et de sa diaspora. Que ceux qui peuvent aider à la libération du Togo, quelle que soit la couche de la société à laquelle ils appartiennent, le fassent. Ils auront le soutien de tout le peuple martyrisé qui ne veut aujourd´hui qu´une chose: «que ça change, d´une manière ou d´une autre, et le plus rapidement possible.»

Samari Tchadjobo
Allemagne

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