Au Togo, c’est la peur qui vide les rues, pas le soutien au régime

La première journée de manifestations contre le régime de Faure Gnassingbé s’est déroulée ce jeudi 26 juin dans un climat pesant. Si certains médias internationaux évoquent une mobilisation « timide », les images filmées à distance et les nombreux témoignages sur les réseaux sociaux révèlent surtout un pays paralysé par la peur.

Sur le terrain, des scènes de tension ont été signalées dans plusieurs quartiers de Lomé, avec des blessés et même des cas de décès évoqués par des témoins, bien qu’aucun bilan officiel ne les ait encore confirmés.

Dans la capitale, l’atmosphère ressemblait davantage à celle d’un jour férié qu’à une journée ordinaire. Le Grand Marché, habituellement bouillonnant même les jours non ouvrables, est resté étonnamment calme. De nombreux magasins ont gardé porte close, et certaines entreprises ont conseillé à leurs employés de rester chez eux pour des raisons de sécurité.



Ce contraste soulève une interrogation : la faible affluence traduit-elle un désintérêt pour la contestation, ou bien un silence imposé par un climat de répression persistant ?

De nombreux Togolais ont préféré observer à distance, depuis leurs balcons ou derrière leurs fenêtres. Les vidéos partagées en ligne montrent des civils battus par des hommes en civil, identifiés comme des miliciens circulant dans des véhicules de l’État. « Cette femme ne faisait pas de politique. Regardez ce qu’ils lui ont fait », s’indigne le journaliste Anani Fifa. « L’indifférence dans une dictature est un crime silencieux. »



La peur d’être arrêté ou agressé est omniprésente. « Je ne peux pas voir ces images à chaque manifestation contre les imposteurs au Togo et rester indifférent. Les silencieux et les ‘moi je ne fais pas de politique’ ont contribué à cela », poursuit le journaliste.



La presse internationale est également visée. Depuis le 16 juin, France 24 et RFI sont suspendues au Togo pour « manque d’impartialité ». Quelques jours plus tôt, une journaliste de TV5 Monde avait été interpellée et forcée d’effacer ses images tournées lors des manifestations du 6 juin.

« La répression ne saurait taire durablement la colère d’un peuple qui a faim », avertit le journaliste Roger Amemavoh. Si les rues sont silencieuses, les images, les voix et la mémoire collective témoignent d’un ras-le-bol encore bien vivant.

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