La lettre circulaire n°25-1095/PC/SG, émise le 30 mai 2025 par la ministre, Secrétaire général à la Présidence du Conseil, Dr Sandra Johnson, continue de susciter des réactions au sein de l’opinion.
Elle stipule que toute demande d’ordre de mission, d’autorisation de sortie du territoire national, ainsi que d’établissement ou de renouvellement de passeport de service, doit désormais être soumise à l’approbation du Président du Conseil. Mais à y regarder de plus près, cette mesure ne constitue pas une rupture, encore moins une nouveauté. Elle s’inscrit dans la continuité d’une pratique administrative togolaise remontant à plus de trois décennies.

Depuis la transition politique de 1992, marquée par la création de la Primature, la compétence relative à la délivrance des ordres de mission et des passeports de service a toujours été exercée par le chef du gouvernement. Une prérogative exercée d’abord par Joseph Kokou Koffigoh, puis par ses successeurs à la tête de la Primature, jusqu’à Komi Sélom Klassou et Victoire Tomegah Dogbé. Avant cela, sous le régime du feu Général Gnassingbé Eyadema, ces actes relevaient directement de la Présidence, en l’absence d’un poste de Premier ministre.
L’entrée en vigueur de la Constitution du 6 mai 2024, instaurant la Ve République, a aboli la Primature et transféré les fonctions de coordination de l’action gouvernementale au Président du Conseil. L’article 50 de cette nouvelle loi fondamentale précise que ce dernier conduit la politique de la Nation. Il est donc naturel que les attributions anciennement portées par la Primature lui reviennent de plein droit. La circulaire du 30 mai vient ainsi formaliser ce transfert, sans introduire de nouvelle exigence procédurale.
D’ailleurs, un encadrement plus strict de la délivrance des passeports de service avait déjà été amorcé en juillet 2024, à travers la circulaire n°007/SGG/2024 signée par le Secrétaire général du gouvernement, Christian Trimua. Celle-ci imposait la présentation de documents justificatifs précis – actes d’engagement, bulletins de paie, anciens passeports – et soumettait toute demande à un accord préalable. Le texte du 30 mai ne modifie pas ces conditions, il redéfinit seulement l’autorité compétente, conformément à la nouvelle organisation institutionnelle.
Si la circulaire a pu surprendre, c’est sans doute en raison de la méconnaissance des changements introduits par la Ve République. Mais dans les faits, elle ne fait que réadapter un processus existant à une réalité juridique nouvelle. Le passage de la Primature à la Présidence du Conseil n’entraîne donc pas une recentralisation du pouvoir, mais un ajustement administratif dans le cadre légal établi.