Par la rédaction d’Icilome.com

Dans une interview fleuve, Nathaniel Olympio, figure de l’opposition togolaise et porte-parole d’un mouvement politique en cours de structuration, revient sur les tensions politiques croissantes au Togo. Il aborde sans détour la montée en puissance des mouvements citoyens menés par la jeunesse, les accusations de violences étatiques, et les dérives autoritaires du régime en place.
Une mobilisation citoyenne inédite
Pour Nathaniel Olympio, la révolte actuelle n’est plus l’œuvre des partis politiques traditionnels. Elle naît d’un réveil spontané, porté par une jeunesse togolaise connectée, lucide, et profondément touchée par les défaillances de la gouvernance. « Ce n’est plus une course à la vedette », insiste-t-il, refusant toute rivalité avec les nouvelles figures de la contestation. « C’est une excellente chose que la jeunesse prenne le leadership de la lutte ».
Le mouvement M66, composé de jeunes et de blogueurs, a lancé un appel aux manifestations les 16 et 17 juillet. Nathaniel Olympio ne se pose pas en chef de file, mais en soutien inconditionnel. Il salue leur sincérité et leur courage : « Ils ne cherchent pas de poste électif. Ils défendent leur dignité. »
Une opposition discréditée… volontairement ?
Interrogé sur le rejet manifeste des partis politiques par les jeunes manifestants, Olympio admet une crise de confiance. Mais pour lui, ce discrédit est orchestré par le pouvoir lui-même : « Le régime a tout fait pour décrédibiliser l’opposition auprès de la jeunesse. » Il accuse le gouvernement d’avoir vidé de leur sens les libertés fondamentales, notamment à travers une loi liberticide promulguée en 2019, malgré les avertissements des rapporteurs spéciaux de l’ONU.
Depuis cette date, selon Olympio, il n’a plus été possible pour l’opposition de manifester librement. « La dernière manifestation légale date de janvier 2019. »
L’affaire Amron : déclencheur d’un réveil collectif
L’arrestation puis la libération du rappeur engagé Amron ont secoué le pays. Olympio le considère comme une icône, un catalyseur. « Son arrestation a indigné la jeunesse. Elle a réveillé une colère longtemps contenue. » Malgré la polémique sur ses déclarations post-libération, l’opposant rappelle : « Il a affirmé avoir été torturé. Et ça, on ne peut pas le mettre au conditionnel. »
Il souligne que même si Faure Gnassingbé n’a pas donné d’ordre direct, c’est son régime qui a permis un climat de violences impunies. « Quand on peut venir arrêter un citoyen chez lui, devant sa femme et ses enfants, le torturer et le détenir sans charges, c’est que le chef de l’État est responsable de l’environnement politique qui permet cela. »
Justice togolaise : un silence coupable ?
Olympio dénonce fermement l’inaction du procureur de la République. Malgré des morts lors des manifestations de fin juin, aucune information judiciaire pour assassinat n’a été clairement ouverte. « Parler d’enquête contre X sans qualifier les faits, c’est vouloir cacher la vérité. » Il appelle à un véritable sursaut de la justice togolaise pour protéger les citoyens.
Faure Gnassingbé : « un danger pour les Togolais »
Sans ambiguïté, Olympio affirme que le président togolais est « un danger » pour le peuple. Il rappelle les centaines de morts attribuées à l’accession au pouvoir de Gnassingbé en 2005 et les décès plus récents de manifestants en juin 2024. « Même s’il parle de milices comme de groupes d’autodéfense, il crée les conditions d’un affrontement civil. »
Rejet des élections : une ligne de principe
Fidèle à sa ligne politique, Olympio refuse de participer à toute élection organisée sous la dictature actuelle. Pour lui, « les élections ne sont plus qu’un outil de confiscation du pouvoir ». Il critique aussi ceux qui demandent un simple report des élections sans en contester le cadre. « Les élections ne mènent à rien tant que le régime dicte les règles du jeu. »
Et maintenant ?
Alors que le pays se prépare à de nouvelles manifestations, Nathaniel Olympio renvoie la balle au pouvoir. « La vraie question n’est pas de savoir si je serai dans la rue, mais ce que le régime compte faire pour répondre à la jeunesse. »
Le Togo est à un tournant. Entre la jeunesse qui s’affirme et une classe politique historique remise en question, l’avenir du pays se jouera dans la capacité à refuser la peur, à défendre la vérité et à construire un nouvel horizon démocratique.
Source: https://www.youtube.com/watch?v=672hIrH0nVQ
Merci a ECHO DU TOGO