Togo- Élections municipales : l’abstention l’emporte

Les Togolais étaient appelés aux urnes ce jeudi pour élire de nouveaux conseillers municipaux. Mais le scrutin s’est déroulé dans un climat de grande tension politique et marqué par une très faible participation à l’échelle nationale. Dans de nombreux bureaux de vote, l’affluence a été quasi inexistante, conséquence visible de l’appel au boycott lancé par plusieurs organisations de la société civile et de l’opposition.

À Lomé comme dans plusieurs localités du pays, les centres de vote sont restés déserts durant une grande partie de la journée. « Il n’y a pas beaucoup de votants. On peut presque compter les bulletins à l’œil nu », confie un agent électoral rencontré dans un bureau de vote de la capitale, au micro de la Deutsche Welle.

Le mot d’ordre de boycott, bien qu’accompagné d’un appel à manifester le jour du scrutin, n’a pas donné lieu à des rassemblements. Mais le refus de se rendre aux urnes, lui, semble avoir été largement suivi.

 Un boycott assumé par une frange de l’opposition

Ce boycott a été largement encouragé par le front « Touche Pas à Ma Constitution » et des influenceurs du mouvement M66, à l’origine des manifestations de juin dernier, violemment réprimées. Pour Nathaniel Olympio, porte-parole du front, ce rejet des urnes s’inscrit dans une logique de protestation contre le régime en place : « Quand le changement à la tête du pays sera effectif, les élections retrouveront leur place d’honneur », affirme-t-il.

Cette méfiance envers le processus électoral est partagée par de nombreux citoyens. « Cela fait des années que nous votons dans ce pays, mais rien ne change. Moi, je n’irai plus voter sous ce régime », a déclaré un électeur désabusé, interrogé lors de la campagne.

 Une stratégie à double tranchant

Cependant, certains observateurs rappellent que le boycott électoral peut avoir des effets contre-productifs. En décembre 2018, la coalition de l’opposition regroupée sous le nom de C14 avait déjà refusé de participer aux élections législatives, espérant ainsi faire pression sur le pouvoir. Résultat : seuls quelques partis considérés comme proches du pouvoir avaient pris part au scrutin, offrant une large majorité parlementaire au parti présidentiel. Cette absence d’opposition forte à l’Assemblée nationale avait facilité l’adoption de lois restreignant les libertés publiques et réduit l’espace civique.

Un précédent qui pousse certains opposants à reconsidérer la stratégie du boycott. Jean-Pierre Fabre, président de l’Alliance nationale pour le changement (ANC) et maire du Golfe 4, s’en est publiquement distancié : « Certains préconisent le boycott. J’ai eu à dire que le boycott s’exerce dans les pays où les gouvernants sont responsables. Nous avons participé à plusieurs boycotts, nous en avons vu les inconvénients. Il est temps d’en tirer les leçons. »

Alors que le taux d’abstention n’a pas encore été officiellement communiqué, cette journée électorale risque de relancer le débat sur la légitimité des scrutins organisés dans un climat de défiance généralisée.

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