Le pouvoir judiciaire joue un rôle central dans un pays démocratique. C´est la colonne vertébrale pour la démocratie. Si ça lui manque, le pays ne peut jamais bien fonctionner et se développer. S´il n´arrive pas à s´émanciper mais reste sous tutelle du pouvoir exécutif, ce pays ne peut jamais évoluer. C´est une réalité. C´est une vision objective des choses. Si on veut évoluer, on doit sincèrement penser à cela. C´est une nécessité absolue. C´est pourquoi dans les pays développés, les juges sont totalement indépendants vis-à-vis du pouvoir exécutif. Ils n´obéissent qu´à la loi et à leur propre conscience. Prenons par exemple deux faits et deux condamnations dans deux pays différents: le Togo et la France.
En avril passé, Djimon Oré a été arrêté chez lui (dans des conditions qui ne nécessitent même pas le rappel ici), pour avoir tout simplement comparé la situation du Togo depuis 1963 au génocide rwandais, au camp de concentration Nazi et à une armée tribale. Ce fait banal lui a valu la prison. Cette comparaison lui a valu deux ans de prison ferme. Ceux qui aspirent à la justice et à la liberté d´expression pensent à juste titre que c´est une condamnation arbitraire quand on sait que Djimon Oré est un homme politique et qu´il est dans son rôle de critiquer le gouvernement. Les zélés du régime lui reprochent d´avoir porté atteinte à l´honneur du chef de l´État et à celui de la Première ministre. Ce langage, peut-être excessif de sa part, mérite-t-il deux ans ( 24 mois ) de prison ferme ? On va comparer son cas à celui de l´auteur de la gifle donnée à Emmanuel Macron. La peine de prison de l´auteur de cette gifle rarissime, est 5 fois de moins que celle de Djimon Or, puisque le juge l´a condamné seulement à 4 mois de prison ferme alors même que les faits sont plus graves et humiliants pour Emmanuel Macron. Djimon Oré, lui, a 24 mois de prison ferme alors que les faits qui lui sont reprochés sont moins graves que la gifle donnée à Emmanuel Macron. Pourquoi 20 mois de plus pour Djimon Oré ? Ces comparaisons sont nécessaires pour dénoncer les abus judiciaires au Togo.
Alors, quel regard peut-on porter sur la justice dans les deux pays et le sens qu´on a du pouvoir ?
Ça montre que dans les pays démocratiques, celui qui incarne le pouvoir est considéré comme un être humain alors que dans les pays non démocratiques, il est presque considéré comme un Dieu ayant le droit de vie et de mort sur les citoyens qu´il prend pour des simples sujets, et pour cette raison, ne doivent rien dire qui puisse paraître humiliant ou portant atteinte à son honneur. Quand on a ce sens du pouvoir dans un pays, la vie des citoyens est en danger. Le pays ne peut jamais avancer démocratiquement. Tout le monde est convaincu maintenant que la condamnation de Djimon Oré est très sévère par rapport aux faits qu´on lui reproche. Il y a une grande disproportionnalité entre la sanction infligée et les faits qui lui sont reprochés. C´est la justice du plus fort qu´on a au Togo. On aurait pu, tout au moins, le condamner à quatre mois de prison avec sursis. Mais deux ans de prison ferme, c´est inhumain et arbitraire. Si un homme politique en France tient ces propos de Djimon Oré, il ne va même pas s´inquiéter pour cela car là il n´y a pas la justice du plus fort mais celle du plus faible.
En Europe la justice est faite pour protéger les faibles. Mais en Afrique c´est pour protéger les forts.
Donc si on veut que notre pays évolue, il est important et même nécessaire que le pouvoir judiciaire soit émancipé. Il ne doit plus rester sous tutelle du pouvoir exécutif, sinon le pays ne pourra jamais avancer.
On couche très bien des articles dans la Constitution mais la réalité est tout autre.
Quel investisseur pourra venir investir dans un pays si la justice ne fonctionne pas librement ? En tout cas pas les Allemands. La justice est une colonne vertébrale pour la démocratie. Si elle n´est pas en bonne santé, la démocratie ne peut pas fonctionner dans ce pays. Si les citoyens n´ont pas confiance en la justice de leur pays, c´est un problème pour le pays. Je pense que c´est ce sentiment que les Togolais ont de la justice togolaise aujourd´hui. Ça fait mal quand on aboutit à cette conclusion.
Quand on est président de la république ou tout simplement un homme d´État, faites en sorte que le jour que vous quittez votre fonction, la majorité de vos compatriotes vous regrette. Alors, est-ce le cas aujourd´hui dans notre pays ? Je doute fort. Pensez plutôt à laisser un bon héritage derrière vous. Ainsi les générations futures parleront bien de vous. C´est ma conception du pouvoir.