Le mercredi 21 juillet dernier, à la suite d’un mouvement de débrayage du personnel, trois agents de la Société nationale des éditions (Editogo), éditrice du quotidien national Togo-Presse, ont été interpellés muni-militari par la Police nationale. Une semaine après, ces responsables, selon les informations, frôlent la condamnation du fait des humeurs du Directeur Général de fait.
Invraisemblable !
La faute des agents Laré Koupak, Assih Abalo et Baderi Monipak qui ont conduit ce mouvement d’exaspération, est d’avoir osé se faire entendre, dans leur réclamation de meilleures conditions de travail. En effet, le mouvement, selon les informations recueillies, fait suite au refus systématique de l’employeur de satisfaire la série de revendications visant l’amélioration des conditions de travail du personnel. Ces revendications, décline t-on, se résument essentiellement à l’augmentation des salaires de façon à le hisser sur la grille salariale dans la fonction publique et le retour des primes pharmaceutiques.
Mais aussi paradoxal et invraisemblable que cela puisse paraître, l’employeur a hermétiquement fermé la porte à toute discussion avec les employés. Ce, cinq ans durant, notamment depuis l’élection du nouveau bureau depuis 2016. Et c’est donc en réponse au refus, voire l’hostilité affichée par le Directeur Rémy Banafey Assih à toute réclamation que les agents de la société ont décidé de paralyser, le mercredi dernier, l’acheminement des journaux à l’intérieur du pays et la distribution dans la capitale. Et la suite, c’est ce qu’on connaît. L’embastillement de ces derniers par la Police, sur ordre du Directeur Assih. Et aujourd’hui, une certaine presse fait cas de la condamnation des trois agents à diverses peines.
Une hypothétique jurisprudence
La gestion de cette situation qui prévaut actuellement à Editogo est non seulement grave, mais aussi et surtout révélateur d’une réalité monstrueuse qui a court au Togo. En effet, il sonne bien curieux qu’un mouvement revendicatif puisse déboucher sur des interpellations des responsables syndicaux. Qui plus est d’une structure étatique, même si parapublic, comme Editogo qui imprime le quotidien national. En le faisant, en ce vingt unième siècle, le sieur Rémy Banafey Assih, pourtant admis à la retraite depuis presque une quinzaine d’années déjà, démontre, preuve à l’appui, qu’au Togo, il y a de ces hommes rendus intouchables et qui semblent disposer de la vie et de la mort sur leurs concitoyens.
Bref, Rémy Banafey Assih démontre suffisamment aux togolais que lorsqu’on est dans le giron du Chef de l’État, l’on a carte blanche à agir, comme bon lui semble, sans que personne ne crie gard. Autrement, de quelle force dispose t-il pour refuser collaborer avec ses employés, contre même les prescriptions de la législation en vigueur.
Plus encore, ce dernier se révèle une monstre curiosité, puisque admis à la retraite, mais refuse de libérer le plancher. Si malgré sa situation professionnelle qui sort de l’ordinaire, ce dernier trouve encore de l’énergie et de la fougue nécessaires pour agir en toute défiance du droit de réclamation, c’est à croire qu’il tire sa force d’un vice suprême de gouvernance. Une situation exceptionnelle, susceptible d’être interprétée comme cautionnée par les décideurs, qui créent malheureusement une situation de jurisprudence dans l’espace public. Surtout face à l’engagement de ceux-ci, les premiers responsables du pays, qui, pourtant, crient à la modernisation de l’administration publique. Pendant que ces derniers font de l’Editogo, la propriété d’un protégé.
L’énigme Banafey
Aujourd’hui, cet épisode sonne comme un mauvais signal qu’envoie le sieur Rémy Banafey Assih. Le message selon lequel, malgré tous les discours tenus pour tenter de cacher la réalité, il existe bel et bien deux Togo. Un Togo détenu par ceux qui se croient plus togolais que les autres. Et un autre Togo réservé aux togolais, sans voix qui, eux, sont de fait, traités comme des citoyens de la pitance. Ce qui fragilise encore beaucoup plus, le tissu social déjà animé par les nombreuses années de crises politiques, ajoutées aux inégalités sociales qui ont fait perdre le goût à la vie à la majorité de togolais qui ne savent point à quel saint se vouer.
Autrement, pendant que des milliers de diplômés sans-emplois jonchent les rues à Lomé, un retraité doré ne peut se payer le luxe de narguer tout un pays, comme le fait Rémy Banafey Assih. Si et seulement si ce dernier n’a pas le soutien des premiers responsables du pays, du Chef de l’État au Premier ministre, en passant par les ministres de la Fonction publique et de la Communication qui sont tous, et logiquement, ses supérieurs hiérarchiques. Il urge donc que ces derniers se saisissent du cas Banafey non-seulement pour redonner la fierté d’être togolais à tout jeune aspirant au travail, mais aussi pour prouver que nul n’est au-dessus de la loi. Mais en attendant, le sieur reste et demeure une énième énigme de défiance administrative.
Source : Fraternité