Kokou K. DAGBEDJI, Coordinateur de l’initiative Alliance Panafricaine Multi-Acteurs sur la Pollution Plastique a participé à la Troisième Session du Comité́ intergouvernemental de négociation chargé d’élaborer un instrument international juridiquement contraignant sur la pollution plastique, notamment dans le milieu marin qui s’est tenue du 13 au 19 Novembre 2023 au Siège des Nations Unies à Nairobi au Kenya.
Radio Diaspora a profité de l’occasion pour lui tendre le micro.
Radio Web Diaspora : Monsieur Kokou DAGBEDJI, vous participez en tant qu’observateur à la Troisième Session du Comité́ intergouvernemental de négociation chargé d’élaborer un instrument international juridiquement contraignants sur la pollution plastique, notamment dans le milieu marin du 13 au 19 Novembre 2023 au Siège des Nations Unies, Nairobi, Kenya, Afrique. Donnez-nous vos premières impressions
Kokou DAGBEDJI : Mes premières impressions sont très positives.
En premier lieu, il se dégage une volonté manifeste de faire participer tout le monde aux négociations et d’élaborer un Instrument consensuel.
En deuxième lieu, la délégation officielle et la société civile africaine sont présentes, ce qui est une avancée pour notre continent.
Vous parlez justement d’une volonté de faire participer tout le monde aux négociations. Dites-nous davantage.
Les États, les Organisations de l’ONU, les Organisations internationales, les ONG, le monde scientifique, les entreprises et tous les autres partenaires qui interviennent dans la problématique de la gestion de la pollution plastique sont présents lors de ces assises ce qui est un facteur non négligeable et l’approche participative adoptée permettant à tout le monde de soumettre ses propositions contenues dans un document, discuté, amendé d’abord lors des discussions des Groupes de contact et soumis finalement à la validation en plénière traduisent éloquemment cette volonté déterminante.
La rencontre se tient à Nairobi en terre Africaine. Comment s’organise alors l’Afrique pour impacter l’élaboration de l’Instrument ?
Il existe le Groupe Africain qui représente tous les différents pays du continent. Au moins deux délégués par pays participent à ce groupe, échangent et soumettent un document qui tient compte des besoins de l’Afrique. Je trouve cette démarche collective essentielle et productive pour le continent.
Et la société civile africaine alors?
Kokou DAGBEDJI : La Société civile africaine est très peu représentée. La raison serait peut-être liée au manque de moyens, parce que le Secrétariat de INC a mis 20 bourses pour la prise en charge des observateurs non-étatiques venant du monde entier.
Malgré ce handicap, il y a quelques observateurs de la Société civile africaine qui sont présents à Nairobi.
Radio Web Diaspora : On sait que le rôle de la Société civile est déterminant dans ce genre de négociation surtout en termes d’apport d’idées alternatives et complémentaires. La pollution plastique touche notre continent. L’Afrique et sa société civile doivent donc impacter l’Instrument. Comment s’organise alors cette société civile peu représentée pour changer les choses ?
Vous avez touché du doigt un point crucial pour notre continent. À mon sens, la société civile doit s’organiser pour participer à l’INC en nombre, collectivement et soumettre des propositions qui favorisent notre continent. Elle doit nécessairement parler d’une même voix.
Ce que j’ai vu à Nairobi nous interpellent tous, car les sociétés des autres régions du monde se concertent tout au long des travaux afin de mieux défendre leurs intérêts contrairement à la société civile africaine qui est en marge de cette démarche.
Mais j’ai la conviction que les choses vont évoluer rapidement.
Qu’est-ce qui vous donne cet espoir ?
À Nairobi, notre organisation a tenu une rencontre d’échange et de réseautage. Elle a invité tous les délégués officiels et les parties prenantes présents à Nairobi ; au total presque 260.
Nous avons alors échangé sur l’amélioration des apports particulièrement de la société civile africaine.
En nombre de propositions aux États Africains, nous avons soumis un échange régulier entre les délégués officiels et les parties prenantes africaines notamment les ONG avant, pendant et après l’INC afin de faire mieux connaître les positions de la société civile africaine et soutenir la position du Groupe africain.
Concernant la présence physique de la société civile, nous avons proposé que chaque pays africain prenne en charge la participation d’au moins deux représentants.
Au niveau du Secrétariat, nous avons soumis une troisième déclaration et demandé l’élargissement du nombre d’observateurs à prendre en charge.
Au niveau de l’élaboration de l’Instrument, nous avons soumis différentes propositions dont les points phares sont : la prévention de la pollution plastique par un mécanisme qui soutient davantage les pays les moins pollués dans le maintien de leur faible niveau de pollution, compense la perte d’emploi lié à l’objet Zéro plastique par l’innovation et l’investissement dans les produits alternatifs durables qui tiennent compte des modes de production et de consommation endogènes et qui créent davantage de l’emploi.
Ce mécanisme doit éviter de déplacer le problème de pollution par les plastiques vers la pollution par exemple par les produits alternatifs.
Un Fonds mondial de la mise en œuvre qui est alimenté par tous les États et proportionnellement à leur PIB, un Fonds complémentaire continental et national qui soutient spécifiquement les activités des ONG et des communautés locales dans la mise en œuvre de l’instrument.
Et le Togo dans tout cela ?
Notre pays est très engagé dans la lutte contre la pollution plastique. Il dispose de l’un des textes les plus contraignants au monde. Ce qui fait que nous avons déjà une base juridique solide qui ne demande qu’à être davantage appliquée.
Il envoie également deux délégués officiels pour participer aux travaux de l’INC et nos représentants font un travail remarquable afin d’intégrer les besoins spécifiques de notre pays dans l’Instrument.
Le Ministère de l’Environnement et des Ressources Forestières prend le problème à bras le corps et a organisé dernièrement une rencontre sur la problématique de la pollution plastique à l’Hôtel 2 Février.
L’ANASAP de son côté déploie des actions efficaces, afin de prévenir et d’éliminer la pollution par les plastiques.
Au niveau de la Société civile, Soutien Social à travers son initiative Alliance Panafricaine Multi-Acteurs sur la pollution plastique sensibilise et mobilise la Société civile togolaise et africaine pour l’INC.
Dans cette logique, il a organisé une rencontre Multi-Acteurs à Lomé avec le soutien justement de l’ANASAP et les facilitations du Ministère de l’Environnement.
Notre ambition est de devenir une organisation de référence qui prend un pan de la lutte contre la pollution par les plastiques. Ce travail va en complément de celui du Gouvernement et des entreprises de recyclage et de collecte.
La pollution plastique est qualifiée de ” pandémie” ou « d’épidémie » par des hauts responsables de ce monde.
Une pandémie demande par conséquent une action commando, d’envergure, multi-acteurs, transversale et un seul acteur ne peut pas y arriver.
Notre pays mobilise actuellement tous les acteurs afin de se débarrasser de la pollution plastique et l’espoir est permis pour vaincre la pollution par les plastiques au Togo et en Afrique.
L’occasion est ici pour nous de remercier la Diaspora togolaise en Europe et en Amérique qui appuie nos activités.
Et les perspectives ?
Le Président du Kenya a déclaré dans son allocution d’ouverture que le monde doit avoir de l’ambition dans l’élaboration et la mise en œuvre de l’Instrument et tout le monde doit jouer sa partition.
Nous avons de l’ambition pour notre pays et l’Afrique et donc nous sommes motivés et continuons de mobiliser et d’organiser la Société civile africaine pour l’adoption d’un Traité qui tient fondamentalement compte des intérêts de notre continent.
L’application de l’Instrument est tout aussi capitale. C’est pourquoi nous avons déjà conçu un programme qui renforce notre contribution dans l’élimination complète des produits plastiques toxiques au Togo.
Nous avons vu ce que les pays comme le Rwanda et le Kenya sont en avance en termes de produits alternatifs à usages multiples, biodégradables et non polluants.
Nous avons aussi toutes les compétences pour le faire chez nous en tant que mouvement citoyen.
Notre Alliance Panafricaine Multi-Acteurs sur la Pollution Plastique s’est renforcée à Nairobi avec l’adhésion du Cameroun, de l’Ouganda, du Ghana, du Kenya, du Rwanda, de l’Égypte et des organisations de la Diaspora.
Notre ambition est de couvrir tout le continent et de mener ensemble des actions complémentaires et transversales adaptées aux réalités de chaque pays.
Les plastiques sont des migrants et nos actions doivent être à la fois locales, nationales, régionales, continentales et mondiales.
Nous allons y arriver.
Je vous remercie
Merci. Comme on le dit au Kenya, Asante et chez nous Akpe kaka.
Très intéressant et une excellente initiative.
Beaucoup de produits plastiques sont dangereux pour la santé et l’environnement. Il faut donc se pencher sérieusement sur le sujet.