Togo- Incendie dévastateur à Agoè-Assiyéyé : Urgence de situer les responsabilités

Le jeudi 7 décembre un groupe de femmes du marché d’Agoe Assiyeye  ont exprimé leur ras-le-bol suite aux nombreuses rackets et tracasseries des policiers en poste sur les lieux. Les vidéos de ce mouvement  d’humeur ont fait le tour des réseaux sociaux. Des rumeurs ont fait état de ce que plusieurs  femmes apparues dans cette vidéo ont été menacées par les responsables de la commune d’Agoè-Nyivé 1. La preuve de ces menaces, c’est ce communiqué au ton martial publié le 11 décembre par le Maire Adanbounou. 

Des policiers ripoux

Mais il y a plus grave qu’on dissimule mais qui transparaît clairement  dans le communiqué.  Selon les informations des sources bien renseignées, les tracasseries policières ne sont qu’une partie des mobiles du mouvement  d’humeur du 7 décembre.  Il y a un autre mobile qui était l’élément déclencheur.  Le marché d’Agoè Assiyéyé dispose d’un poste de police comme les autres grands marchés  de Lomé. La mission de ces policiers entre autre est de veiller sur le site la nuit. Une commerçante qui possède une baraque avec un prolongement de grillage dans le marché  a constaté que des individus ont pris l’habitude  de subtiliser la nuit des articles dans le grillage de l’entrée de sa boutique  qu’elle prend quand même soin de couvrir le soir par une bâche avant de rentrer. D’autres commerçantes ont également signalé ces voies de fait. La dame décide alors de placer discrètement  une caméra  à l’entrée de sa boutique. Elle découvre plus tard sur les images que ce sont des policiers qui viennent la nuit subtiliser les articles. Et pourtant la mission de ces policiers est de protéger le site. C’est donc cette découverte qui a servi d’élément déclencheur du mouvement d’humeur.

Les autorités municipales au lieu de sermonner les policiers ripoux se sont ruées  sur la dame lui reprochant d’avoir installé une caméra dans un lieu public sans autorisation.  Dans le communiqué  du 11 décembre,  le maire parle de “la principale instigatrice” de ce mouvement  d’humeur qui a été identifiée.  Parle-t-il de cette dame qui a identifié les policiers ripoux par la caméra? Il faudra lui poser la question.  Une chose est certaine  cette “instigatrice” a passé un sale temps ainsi que  d’autres femmes dans les mains des petits Mussolini. 

Mais pour que le scandale lié à la découverte  de ces policiers  ripoux n’aille pas loin, ces derniers ont été discrètement mutés, certains parlent même de sanction. Deux semaines  après ce scandale de policiers ripoux le marché prend feu. Est-ce un hasard, une vengeance ? Seule une enquête de la justice  doit situer l’opinion. 

Le silence du Procureur

Selon des témoignages,  certains jeunes le soir du sinistre ont vu le début de l’incendie et se sont approchés des vigiles en faction, ces derniers sont restés indifférents.

Dans un pays où  la justice sert encore à  quelque  chose le Procureur de la République  devait jouer sa partition. Le lieu du sinistre devait être scellé dès le lendemain. La police scientifique doit être dépêchée sur les lieux pour des prélèvements pour avoir une idée du départ de l’incendie et éventuellement le combustible ou même si c’est une piste accidentelle. Depuis jeudi le site est largement  accessible à tout le monde et des gens viennent faire des vidéos comme bon leur semble. Le Procureur est dans un silence assourdissant.  Quand il s’agit des journalistes, opposants, enseignants syndicalistes, des prisonniers politiques,  il est très actif. Voilà comment  fonctionne le Togo.

Cette histoire  de caméra et policiers ripoux est une piste pour toute personne appelée à  investiguer sur ce sinistre. Cette dame doit être retrouvée et interrogée, le maire qui a publié  ce communiqué  doit également être interrogé. Il faut aussi retrouver ces policiers. 

Pendant que le feu dévastait le marché, des individus se sont organisés  pour dévaliser certaines boutiques et magasins autour du marché.  D’autres sont rentrés sur le site en plein feu pour voler les pintades, poules et même des moutons brûlés par le feu, preuve si besoin en est que le site n’a pas été quadrillé.

L’incendie de ce marché est un drame sans précédent.  Le marché d’Agoè Assiyéyé de par sa position regroupe les Togolais de tout bord et en cette fin d’année plusieurs commerçants ont fait des ravitaillements de plusieurs  millions. Ils ou elles viennent  de perdent tout.  Plusieurs femmes sont actuellement  dévastées et la seule consolation qu’on leur jette à la figure c’est ” Dieu va faire ” ou c’est notre fief, propos indécents sans aucune dignité. 

Parlant de fief, comment peut-on être fier d’appeler ce dépotoir dont les images sont en dessous un marché dans une capitale? Que vient chercher l’histoire de fief en plein drame ?

Situer les responsabilités

Tant que  l’impunité sera la norme au Togo, le pays ira de crise en drame et personne  ne sera épargné. La gestion de ce pays ne répond à aucun standard de gestion élémentaire d’un État.  Il y a quelques semaines c’est HAPLUCIA, une institution chargée de lutter contre la corruption, qui s’est pointée devant les médias pour dire “les gens ont volés l’argent,  nous sommes en train de les obliger à rembourser”. Incroyable! Qui sont ces mystérieux voleurs dont le peuple ne doit pas connaître les noms   et les montants subtilisés dans les caisses de l’État alors que les petits voleurs de quartier sont jetés tous les jours en prison?

Pour revenir au marché  d’Agoè Assiyéyé,  il faut absolument déterminer l’origine de cet incendie et rendre justice à  ces valeureuses femmes qui ont tout perdu.  Les enquêtes des  incendies des marchés de Kara et Lomé n’ont jamais conduit aux vrais auteurs.  Pourquoi c’est toujours les jeudis nuit que les marchés prennent feu?  Celui d’Agoè Assiyéyé 10 ans après ne doit pas subir le même sort. Il faut absolument  situer les responsabilités. 

Que la Providence soulage ces femmes dévastées. Joyeux Noël malgré tout même,  si le temps n’est nullement  à la fête.

Ferdinand AYITÉ [Titre originel: Les ripoux de la police et l’incendie du marché d’Agoè Assiyéyé]

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