Alors que l’Alliance des États du Sahel (AES) gagne en visibilité en Afrique de l’Ouest, des discussions s’intensifient autour de la possibilité pour certains pays, comme le Togo ou le Bénin, de rejoindre cette plateforme d’intégration régionale. Lors de l’émission récente, Mamadou Diouf et Sogoyou Keguewe, deux experts en géopolitique africaine, ont exploré les raisons derrière cet engouement croissant et les défis liés à une éventuelle expansion de l’AES.
Selon Sogoyou Keguewe, journaliste togolais et ancien ambassadeur, « l’avenir est à l’AES, pas à une CEDEAO moribonde ». À ses yeux, l’AES incarne une nouvelle dynamique, fondée sur la souveraineté et l’autodétermination des États africains, à l’opposé d’une CEDEAO souvent perçue comme trop alignée sur les intérêts occidentaux.
L’Alliance des États du Sahel, constituée par le Mali, le Burkina Faso et le Niger, ambitionne de devenir un bloc régional fort, non seulement sur le plan sécuritaire, mais aussi économique. Comme l’a souligné Mamadou Diouf, éditorialiste, « les pays voisins du Sahel reconnaissent la nécessité d’une coopération accrue pour relever les défis communs, notamment la lutte contre le terrorisme ».
Le Togo : un candidat potentiel ?
Le Togo, qui partage des liens historiques et culturels avec les pays du Sahel, est régulièrement cité parmi les futurs membres possibles de l’AES. Selon une déclaration du ministre togolais des Affaires étrangères, Robert Dussey, plus de 70 % de la population togolaise soutiendrait l’idée d’une adhésion à l’AES. Cependant, comme l’a rappelé Mamadou Diouf, cette démarche nécessitera une réflexion approfondie sur les conditions définies par l’article 11 de la Charte de Liptako-Gourma, qui exige une convergence en termes de réalités politiques, sociales et culturelles.
L’adhésion du Togo pourrait également marquer une rupture avec la CEDEAO, perçue par certains comme un « syndicat de chefs d’État » déconnecté des aspirations populaires. L’expérience malheureuse du Togo avec les médiations de la CEDEAO a laissé des traces, alimentant une méfiance envers cette organisation régionale.
Au-delà des questions politiques, l’AES séduit par ses ambitions économiques et sécuritaires. Comme l’a souligné Sogoyou Keguewe, « l’AES ne promet pas un paradis, mais elle est sur la bonne voie ». La souveraineté retrouvée des pays membres leur permet de développer des projets structurants, tels que des barrages, raffineries et infrastructures agricoles, sans dépendre des institutions financières internationales ou des anciennes puissances coloniales.
Cet esprit d’indépendance attire l’attention de pays comme le Bénin et le Ghana, qui voient dans l’AES une opportunité de renforcer leur sécurité et de stimuler leur développement économique.
Si l’élargissement de l’AES se concrétisait, il pourrait redéfinir les dynamiques politiques et économiques en Afrique de l’Ouest, offrant une alternative crédible à la CEDEAO et renforçant la souveraineté des États membres.
Ainsi, l’AES ne se contente pas d’être un bloc géopolitique, mais incarne une aspiration collective à une véritable indépendance et à un développement durable pour l’Afrique.
Paul Arnaud DEGUENON
Source : Béninwebtv