Une cinquième République en marche mais à quel prix ?

Démocratie, monarchie, autocratie, dictature ou encore régimes présidentiels, semi-présidentiels ou parlementaires, tous les systèmes ont leurs bons et leurs mauvais côtés. La capacité d’un système à garantir le bonheur des peuples dépend certes du cadre institutionnel, mais elle dépend surtout de la qualité des personnes chargées de l’incarner.

Au Togo, l’adoption d’un régime parlementaire dans le cadre de la 5ème République suscite de vives interrogations. Ce système, par essence, n’est ni bon ni mauvais. Sa réussite dépend des acteurs qui le mettent en œuvre. Or, ces acteurs inquiètent énormément.

L’histoire récente du pays offre peu de raisons de croire que ceux qui gouvernent le fassent dans la transparence et l’intégrité. On se souvient encore de la révision controversée de la Constitution de 1992, menée dans le secret de la nuit, et dont les rumeurs de corruption entachent encore la légitimité. On parlait de 40 millions de francs qui auraient été remis à des députés pour faire passer le projet.

La mise en place d’un Sénat, une des pierres angulaires du nouveau régime en gestation, suscite également des inquiétudes. Les conseillers régionaux, qui joueront un rôle clé dans la désignation des sénateurs, sont loin de faire preuve d’indépendance d’esprit ou de courage. Aucun ne peut oser défier une décision du pouvoir. Cela laisse donc craindre un Sénat composé de pantins incapables d’incarner l’autorité et la dignité qu’exige une telle institution. Loin d’être un contre-pouvoir, cette assemblée risque de devenir un simple prolongement des intérêts partisans, incapable de répondre aux attentes du peuple.

La réussite d’un régime parlementaire repose sur trois bases: une classe politique compétente, intègre et visionnaire. Malheureusement, la classe politique togolaise est tout le contraire, avec ses pratiques opaques.

Au-delà du débat sur le système politique, la question essentielle reste celle des hommes et des femmes qui doivent porter le projet d’un régime parlementaire. Etant donné qu’il n’y a pas une volonté claire de changement de mentalité, une rupture avec les pratiques passées et un engagement sincère envers l’intérêt général, le risque est grand que cette réforme ne soit le chapitre le plus sombre dans la longue série de désillusions.

On aura un Sénat de façade et sans âme. Au lieu de sénateurs qui marcheront à pas de sénateur, on aura des sénateurs qui ramperont devant le Président du Conseil des ministres, devant le Président de la République, devant les préfets, les gouverneurs, les militaires et tous ceux qui ont toujours détenu le vrai pouvoir dans ce pays.

N’djo

SIKA’A Journal

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