Le Rwanda, pays où le numérique occupe depuis de nombreuses années le développement, a accueilli la semaine dernière, un sommet international sur l’intelligence artificielle, (Global AI Summit on Africa). « L’IA et le dividende démographique de l’Afrique : réimaginer les opportunités économiques pour la main-d’œuvre africaine », c’est sur ce thème que les experts du domaine et les décideurs se sont planchés. Invité, le Chef de l’Etat togolais, Faure Gnassingbé a livré un discours qui laisse croire que son pays, le Togo connait un certain progrès notable dans ce domaine dans lequel tous les pays rentrent en compétition. Au Togo, la révolution annoncée depuis des années balbutie. Mais comme toujours, les autorités se plaisent dans la propagande.
En 2024, l’indice de développement des TIC 2024 qui scrute les progrès réalisés dans le domaine du développement des technologies de l’information et de la communication (TIC), a classé le Togo 28ème sur les 47 pays évalués. Une place qui témoigne du retard du Togo dans ce domaine. Et pourtant, depuis de longues années, les autorités tambourinent sur les toits du monde comme étant à l’avant-garde du numérique. C’était encore le cas à Kigali le 03 avril 2025 à Kigali.
Un retardataire qui bombe le torse
Prenant la parole devant des experts et autres décideurs africains et mondiaux, le Chef de l’Etat s’est montré particulièrement conscient de la nécessité pour les pays africains de faire du numérique un pilier du développement au service des populations.
« Nous devons avoir une approche sélective, stratégique et adaptée aux capacités réelles de notre continent. Nous devons identifier les domaines dans lesquels nos besoins sont les plus urgents pour que nos efforts produisent un effet de levier maximal. Je pense à trois secteurs clés de notre stratégie de développement à savoir la santé, l’éducation et l’agriculture, où la promesse de l’intelligence artificielle rencontre la réalité la plus concrète. Je suis convaincu que l’Afrique peut devenir un terrain d’innovation pour elle-même et pour le monde », a indiqué Faure Gnassingbé.
Le Président Faure Gnassingbé prône également la souveraineté numérique. « Je pense pour ma part que l’Afrique ne doit pas rester dépendante des plateformes étrangères. Il faut construire notre souveraineté numérique. Celle-ci doit reposer sur trois piliers, à savoir nos données, nos infrastructures et nos normes. Il ne s’agit pas nécessairement de construire nos propres modèles d’IA, mais de faire des choix intelligents en adaptant des modèles ouverts et sobres en énergie à nos réalités », a-t-il insisté avant d’ajouter que « l’intelligence artificielle est la prochaine grande révolution. L’équité sera une condition essentielle d’une Intelligence artificielle au service de tous en Afrique. L’Intelligence artificielle doit aussi bénéficier aux travailleurs informels et aux zones rurales qui n’ont pas accès direct à la technologie. Cela suppose des formations ciblées, des investissements dans la collectivité et des solutions pensées pour les réalités locales».
Une belle allocution qui peut laisser croire, celui qui n’a jamais mis les pieds au Togo ou qui ne connaissent son l’indélicatesse avec le développement des nouvelles technologies, que ce pays est un pionnier dans le numérique. Loin de là, le Togo, malgré des milliards d’investissements, la révolution numérique n’a jamais décollé. Dans nombre de domaines, le pays reste à l’état primaire, à l’opposé de toutes les avancées.
Des milliards d’échecs
En décembre 2024, la Banque mondiale annoncé un financement de 100 millions de dollars, près de 60 milliards de FCFA, « pour soutenir le gouvernement du Togo dans son ambition d’utiliser les technologies numériques comme levier essentiel pour accélérer la croissance, la création d’emplois et la compétitivité des secteurs prioritaires ». Depuis plusieurs années, le Togo accumule les prêts pour lancer sa révolution numérique mais les résultats escomptés par les populations sont loin d’être atteints. Le dernier échec en date est la construction du Data Center de Lomé annoncée tambour battant.
Inauguré en grande pompe le 4 juin 2021 par Faure Gnassingbé, le DATA Center de Lomé, selon le gouvernement, est « une infrastructure critique qui revêt d’une importance cruciale dans la concrétisation des objectifs de la croissance soutenue par la transformation digitale ». Plus de trois ans après, ce complexe qui a englouti plus de 12,7 milliards de FCFA (23,7 millions de dollars), un prêt de la Banque Mondiale dans un partenariat public-privé (PPP) avec le Programme Régional Ouest-Africain de Développement des Infrastructures de Communications (West African Regional Communications Infrastructure Program ou WARCI).
Plus de trois ans après, ce complexe brandi comme l’un des projets les plus ambitieux à l’ère de la digitalisation pour faire du Togo un hub technologique et digital à l’orée de 2025, semble porter disparu. Selon certaines informations, l’Etat togolais cherche même à s’en débarrasser. Rien que l’entretien des infrastructures demanderait des efforts financiers colossaux pendant que le centre n’aurai toujours pas effectivement démarré ses activités.
En 2023, alors que le Chef de l’Etat togolais a fait savoir à Kigali que « l’Afrique ne doit pas rester dépendante des plateformes étrangères », le Togo a curieusement décidé en depuis 2022, de confier la gestion de ce Data Center, devenu un boulet pour les finances publiques, à un gestionnaire privé. Depuis l’annonce, les quelques sociétés qui ont tenté de reprendre le centre se sont heurtés aux réalités et ont rebroussé chemin.
Au-delà du cas du Data center de Lomé, la digitalisation tambourinée par les autorités togolaises n’est que leurre. La réalité étant tout autre dans les administrations publiques. Au Togo, le simple service de transfert d’argent mobile rencontre d’énormes difficultés. Dans les hôpitaux, les services publics, les écoles, le simple accès à internet est un parcours de combattant. Dans de nombreuses localités du pays, les populations, au 21ème siècle, ne connaissent pas encore internet. Des réalités qui contrastent avec le discours propagandistes des autorités présentant le Togo comme une terre du numérique.
Lemy Egblongbéli
Source: lecorrecteur.tg
Ma tante maternelle, dans un village de la Région Maritime, m’envoie des messages vocaux et vidéo whatsapp. C’est comme si elle est connectée… Voyons la moitié pleine du verre…