Nord-Togo : montée en puissance des violences djihadistes venues du Burkina Faso

Depuis janvier, le nord du Togo est le théâtre d’une recrudescence des attaques djihadistes. Selon une récente déclaration du ministre des affaires étrangères Robert Dussey, au moins 62 personnes – dont 54 civils et 8 militaires – ont été tuées dans 15 attaques. Un bilan qui illustre l’enracinement progressif de la menace dans cette région frontalière du Burkina Faso.

Les incursions sont attribuées à des groupes islamistes actifs dans l’est du Burkina, notamment dans la province de la Kompienga, où opère une puissante brigade du Groupe de soutien de l’islam et des musulmans (affilié à Al-Qaida). « Les frontières sont poreuses. Ce sont les mêmes populations qui sont dans la Kompienga qu’on retrouve du côté du Kpendjal », observe Mathias Khalfaoui, spécialiste des questions sécuritaires en Afrique de l’Ouest. La préfecture togolaise de Kpendjal, dans la région des Savanes, est la plus exposée.

Le pays avait connu sa première attaque meurtrière en mai 2022. Depuis, « [il] connaît sans véritable discontinuité des attaques et autres événements liés à des groupes djihadistes sur son territoire », note Khalfaoui dans une étude publiée par la fondation Konrad Adenauer. L’avancée se fait « lente et méthodique », précise-t-il, mais touche désormais aussi les préfectures d’Oti et d’Oti-Sud, plus au sud.

La communication officielle demeure minimale. Ce silence s’inscrit dans une « politique de verrouillage informationnel » assumée, afin « de ne pas démoraliser » les troupes, selon le politologue Madi Djabakate. En 2023, les autorités avaient reconnu une trentaine de morts liés aux attaques.

Le contexte local favorise l’implantation des groupes armés. « Les préfectures affectées, notamment Kpendjal et Kpendjal-Ouest, souffrent d’une absence structurelle de l’Etat. L’affectation de fonctionnaires dans ces zones est perçue comme une sanction, tant les conditions de vie sont difficiles et les services publics inexistants », souligne Djabakate, dénonçant une « réponse essentiellement militaire et répressive ».

Près de 8 000 militaires togolais sont actuellement déployés dans la région dans le cadre de l’opération « Koundjoaré ». Le budget de la défense est passé de 8,7 % des dépenses publiques en 2017 à 17,5 % en 2022. Mais pour de nombreux observateurs, seule une approche coordonnée à l’échelle régionale pourra enrayer l’expansion djihadiste dans une Afrique de l’Ouest profondément divisée.

Source: Le Monde avec AFP

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