En reportage au Togo pour Afrique XXI, le journaliste français Thomas Dietrich a été arrêté et brutalisé par des policiers avant d’être condamné, le lendemain, à six mois de prison avec sursis et expulsé du territoire. Reporters sans frontières (RSF) condamne fermement le traitement brutal et arbitraire infligé au reporter, ainsi que la décision de suspendre toutes les accréditations pour la presse étrangère, qui constituent des entraves inacceptables au droit à l’information.
Thomas Dietrich aura passé trois jours sur le sol togolais avant d’être condamné à six mois de prison avec sursis et expulsé. Le journaliste indépendant, en reportage pour le média français Afrique XXI, était venu couvrir l’actualité politique et les manifestations liées à la nouvelle Constitution togolaise, qui fait passer le pays d’un régime présidentiel à un régime parlementaire. Sa demande de e-visa avait été validée, et son passeport avait été tamponné à la frontière béninoise lors de son arrivée, le 13 avril.
Deux jours plus tard, le journaliste est allé chercher son accréditation, demandée en amont en toute transparence, auprès de la Haute Autorité de l’audiovisuel et de la communication (HAAC), l’organe de régulation des médias. Elle lui a été refusée au motif qu’il aurait dû l’obtenir en même temps que sa demande de visa. A la sortie de ce bâtiment, des hommes encagoulés l’ont empoigné et jeté dans un fourgon, yeux bandés, avant de le remettre aux autorités policières, qui l’ont brutalisé et longuement interrogé, selon les propos du journaliste recueillis par RSF. Le lendemain, Thomas Dietrich assistait à son procès pour un jugement express. En deux heures, le verdict était rendu : six mois de prison avec sursis, interdiction d’entrer sur le territoire togolais et expulsion vers le Bénin, pour “entrée illégale sur le territoire”.
« Rien ne peut justifier le traitement qu’a subi ce journaliste, de même que rien ne justifie de si graves décisions de la part des autorités togolaises. Thomas Dietrich s’est rendu au Togo en toute transparence. Le motif de sa condamnation ressemble dangereusement à un prétexte pour entraver son travail. Et alors que le pays vient de se doter, dans un climat tendu, d’une nouvelle Constitution, que des élections législatives et régionales sont prévues le 29 avril prochain, la décision de suspendre provisoirement la délivrance d’accréditations aux médias étrangers est une violation flagrante de la liberté d’informer et prive les populations d’une informations plurielle. RSF appelle les autorités à y mettre un terme immédiatement », Sadibou Marong, Directeur du bureau Afrique subsaharienne de RSF
Traitements dégradants
Lors de son interrogatoire le 15 avril par les autorités policières à la brigade de recherche et d’investigation (BRI), Thomas Dietrich a été frappé à de multiples reprises, étranglé, déshabillé et menacé. “Ils m’ont dit qu’ils allaient me mettre dans une geôle et demander aux prisonniers de me faire des choses”, témoigne-t-il auprès de RSF. Il n’a pas pu avoir accès à ses médicaments. Les policiers lui ont également reproché d’avoir “insulté le président”. La veille, le journaliste avait publié une vidéo sur X, dans laquelle il abordait l’adoption de la nouvelle Constitution, dont “personne ne connaît la teneur”, et qualifiait le pays de “dictature”.
Les journalistes étrangers interdits d’accréditation
RSF a contacté le vice-président de la HAAC, Octave Olympio, qui a transmis une fiche sur Thomas Dietrich, l’accusant de “manoeuvres délibérées tendant à masquer sa réelle profession”, et d’avoir “emprunté des voies illégales et sans aucune formalité” pour entrer sur le territoire, après avoir été “refoulé”. Le reporter a pourtant transmis une copie de son passeport tamponné à RSF, et a souligné avoir envoyé des documents attestant de son activité et précisé sa profession à de multiples reprises lors de sa demande de visa et de son passage au poste-frontière.
RSF a tenté de joindre la ministre de la Communication et des Médias, Yawa Kouigan, et le ministre de la Sécurité et de la Protection civile, Calixte Madjoulba, sans succès.
Le 15 avril, la HAAC a publié un communiqué annonçant “la suspension provisoire de la délivrance des accréditations”, “considérant les problèmes liés à l’envoyé spécial Thomas Dietrich […] dans le cadre de la délivrance des accréditations” et “les manquements graves constatés dans la couverture de l’actualité politique sur le Togo par RFI et France 24 ces derniers temps”, sans précision des contenus imputés.
Depuis avril 2022, ces deux médias français sont particulièrement ciblés dans certains pays du Sahel, à l’instar du Mali, du Burkina Faso et du Niger où ils sont suspendus définitivement ou jusqu’à nouvel ordre par les juntes au pouvoir.
Source: RSF/ Titre original [Togo : RSF dénonce l’expulsion arbitraire du journaliste Thomas Dietrich et la suspension des accréditations pour la presse étrangère]
Encore une togolaiserie
M. Thomas Dietrich
J’ai pris connaissance de votre mésaventure au Togo qu’on pourrait intituler ironiquement : “Bons baisers du Togo”.
Ce que vous avez subi au Togo, c’est une partie négligeable de ce que peut subir un togolais, un journaliste togolais “normal”. Car vous, vous avez la chance d’être Français, je voulais dire un Français de France. Après avoir subi ce que vous avez subi, Imaginez un peu ce que peut être le quotidien d’un togolais lambda, un togolais normal, né sur le sol togolais, qui grandit sur ce sol, vieillit et meurt sur sol. Vous comprenez pourquoi beaucoup marchent sur la tête et réfléchissent par les pieds, malgré leurs doctorats ?
Votre mésaventure, ressemblerait presque, à un conte de fée, à côté de ce que subit beaucoup de journalistes togolais depuis quelque années:
-Joel Egah, décédé quelque semaines après sa sortie des geôles de la dictature féroce du système Faure Gnassingbé
-Ferdinand Ayité et Isidore Kouwonou qui ont dû quitter précipitamment le pays pour échapper au semblant de cour de justice qui existe au Togo
-Plus récemment, Apollinaire Mewenemesse, 71 ans, détenu, pour avoir dit ce qui ne plait pas au prince, au Monarque Gnassingbé Faure.
Pour être franc, c’est par votre reportage sur la présence de l’armée française, d’une base militaire française dans le Nord du Bénin, que je vous ai connu ou remarqué, il y a 2 ou 3 ans.
Les togolais conscients, vous trouvent chanceux de sortir sainf et sauf de cette prison à ciel ouvert.
–
Toi, continues de pleurer sur les réseaux sociaux. Il est sorti “SEIN”, SAIN, SAINF et SOF; ahah! (quel est l’ orthographe exact ?).