En conférence de presse mercredi, le Groupe des 8 organisations de la société civile a donné sa position relativement au droit à la liberté d’association au Togo, en l’occurrence le projet de loi portant modification de la loi du 1er juillet 1901. Avec 26 organisations de la société civile, le G8 se dit partant pour cette réforme à condition que le pouvoir en place veille au respect des textes en vigueur, qui régissent la vie associative car pour ce groupement l’espace civique court une grand danger.
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NOTE DE POSITION DU G8 ET DES ORGANISATIONS DE LA SOCIETE CIVILE SUR LE DROIT A LA LIBERTE D’ASSOCIATION AU TOGO
PRESENTATION DU GROUPE DES O8 OSC
Nous sommes un groupe de huit (08) Organisations de la société civile, composé de l’Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture (ACAT-Togo), l’Association Togolaise pour la Défense et la Promotion des Droits Humains (ATDPDH), le Collectif des Juristes et Promoteurs des Droits Humains pour un Développement Durable (CJPDH2D), la Fédération des Industries du TOGO (FIT), le Groupe de Réflexion et d’Action pour le Dialogue, la Démocratie et le Développement (GRAD), Solidarité et Action pour le Développement Durable (SADD), le Syndicat Démocratique des Mines (SYDEMINES) et le Syndicat des Praticiens Hospitaliers du Togo (SYNPHOT) ; engagées pour la promotion de la démocratie, des droits humains, de la justice sociale, de la paix, de l’enracinement de l’Etat de droit, ainsi que la sauvegarde de la cohésion sociale.
PHILOSOPHIE ET VALEURS
Sans distinction d’ethnie, de race, de religion et d’appartenance politique ou idéologique, le groupe des huit (08) Organisations de la société civile (G8) est une plateforme d’échanges et de réflexions, de rapprochement de toutes les tendances, en vue d’articuler des actions communes porteuses de changement et de normalisation de la vie publique et politique au Togo.
Le G8 est une dynamique non violente, engagée pour la promotion de la justice sociale, des droits de l’Homme, de la paix sociale et civile, de la démocratie et de l’Etat de droit. Le groupe est ouvert au dialogue, aux échanges, à la réflexion et à la formulation d’alternatives porteuses de changement sociopolitique escompté par la majeure partie du peuple. Pour ce faire, il mobilise les Organisations de la société civile et syndicales partenaires ou alliées, hommes et femmes de bonne volonté au niveau national et international pour se retrouver, discuter, analyser les réalités et réfléchir sur les grands enjeux du pays. Ensemble, il recherche les causes des situations et les conséquences que cela implique pour la société. Il propose des alternatives et articule des actions de plaidoyer pour obtenir des améliorations des conditions d’exercice des droits et libertés publics fondamentaux sur le plan politique, économique et social en vue de l’enracinement de la démocratie et de l’état de droit.
I- RAPPEL DES FAITS
• 2016
Le 07 avril 2016, un communiqué en conseil des ministres mentionnait l’adoption d’un projet de loi relative à la liberté d’association au Togo.
Le 19 mai 2016, de 16H à 17h au siège de la Délégation de l’Union Européenne au Togo, le groupe des 06 Organisations de la société civile (ACAT-TOGO, ATDPDH, CEJP, GRAD, SYNPHOT, SADD) s’est entretenu avec la Délégation de l’Union Européenne en présence du Chef de la délégation suite à son courrier en date du 10 mai 2016 relatif à la modification de la loi de 1901, portant liberté d’association au Togo. En substance le courrier faisait part de nos inquiétudes et de nos préoccupations concernant le projet de loi portant liberté d’association au Togo adopté en Conseil des Ministres par le gouvernement le 07 avril 2016.
N’ayant pas eu accès à l’intégralité du contenu du document qui a pourtant été présenté et adopté en Conseil des Ministres, nous (groupe des 06 OSC) restons préoccupés quant à l’impact réel d’une telle réforme sur notre société civile si cette loi venait à être adoptée par l’Assemblée Nationale et nos inquiétudes confirmées ; nul doute que cela sera préjudiciable pour les Organisations de la société civile togolaise à l’instar des pays comme le Burundi, l’Ethiopie, la Mauritanie, la Russie ou encore l’Israël. Le Congo « Brazzaville » serait aujourd’hui dans la tourmente d’une telle réforme. A chaque fois qu’un pays a voulu modifier la loi de 1901, cela se solde par une régression de la liberté associative. Telles furent nos inquiétudes et préoccupations exprimées au PASCRENA et à l’Union Européenne en présence de l’Ambassadeur qui a bien voulu accueillir les acteurs et introduire les échanges autour de la problématique.
Au cours de l’entretien, et après l’exposé du PASCRENA soutenu par les faitières (UONGTO et FONGTO et la présidente de WILDAF TOGO) sur le processus ayant conduit à la proposition de l’avant-projet de loi au gouvernement, le représentant du GRAD a pris la parole pour expliciter et réitérer les inquiétudes du groupe des 06 organisations face à cette procédure de modification de la loi 1901 et a fait observer que malgré la justification d’une consultation massive des OSC par le PASCRENA et les faitières, aucun membre de son groupe n’a été associé ; donc ignorant les réels tenants et aboutissants de ce projet de réforme de la loi, il se pose alors la question de l’échantillon des ONG civiles ou que des ONG de développement local consultées et de leur degré d’implication dans le processus.
En effet, l’exposé du motif du gouvernement précise « prenant en compte l’évolution de la gouvernance administrative et économique ainsi que les mutations connues par le monde associatif dans notre pays, le présent projet de loi vise à corriger les limites de la loi du 1er juillet 1901 sur les associations actuellement en vigueur et à régir le domaine de la création et de la gestion des structures associatives. »
Le gouvernement a justifié son acte par des actions menées par certains acteurs de la société civile dans le cadre de l’exécution du PASCRENA.
Le groupe des 06 Organisations de la Société Civile (ACAT-TOGO, ATDPDH, CEJP, GRAD, SADD, SYNPHOT) a organisé le 08 juillet 2016 dans la salle Entente du CASEF un séminaire sur la loi du 1er juillet 1901 portant liberté d’association et le projet de sa modification au Togo.
Les tentatives auprès de différentes sources pour obtenir copie du projet de loi adopté en Conseil des Ministres en question ont été infructueuses. Le G6 a eu accès à la version finale de l’avant-projet de loi, tel qu’il a été transmis au Ministère de l’Administration Territoriale qui a été présenté sommairement lors dudit séminaire.
La relance du processus
• 2020
Le 17 novembre 2020, une délégation de la société civile a été reçue en audience par Mme Victoire TOMEGAH-DOGBE, nouvellement nommée Premier Ministre de la République du Togo, suite à une demande à elle adressée par les OSC réunies sur la plateforme virtuelle « Espace Civique et Environnement Favorable des OSC ». C’est cette délégation de la Société civile à cette occasion composée de : la Fédération des ONG au Togo (FONGTO), l’Union des ONG (UONGTO), la Faîtière Nationale des Réseaux Régionaux et des Associations de Développement du Togo (FNRR-Togo), le Groupe de réflexion et d’action Femme, Démocratie et Développement (GF2D) et le Forum des Organisations de Défense des Droits de l’Enfant au Togo (FODDET) qui a repris le processus de relance.
• 2021
Le 27 janvier 2021 : Après deux (2) séances de relecture, une réunion de synthèse a été organisée au siège de l’ONG PASYD, pour décider de la suite du processus afin de permettre aux participants de disposer d’informations.
Le 4 février 2021 : Réunion d’une délégation de l’Espace Civique avec le G6sur sa demande.
Du 30-31 mars 2021 : Séminaire d’échanges et de réflexions sur le thème : « le droit à la liberté d’association au Togo : enjeux et perspectives » organisé par le G8 ((ACAT-TOGO, ATDPDH, CJPDH2D, FIT, GRAD, SADD, SYDEMINES, SYNPHOT) à l’Agora Senghor assorti d’une conférence de presse.
Le 6 avril 2021 : Mise au point du G8 sur le processus de consultation des Organisations de la Société Civile (OSC).
Le 9 avril 2021 : Atelier de validation du processus de consultations de certaines organisations par la plateforme virtuelle « Espace Civique ».
II- CONSTATS SUR L’AVANT-PROJET DE MODIFICATION DE LA LOI 1901 DE 2016 A 2021
L’avant-projet de loi de 2016 sur la liberté d’association compte 55 articles regroupés en deux (2) titres, comportant respectivement trois (3) et cinq (5) chapitres.
L’avant-projet de loi 2021 relative à la liberté d’association au Togo comporte 57 articles subdivisés en trois (3) chapitres comportant eux-mêmes pour le chapitre 1 deux (2) paragraphes, pour le chapitre 2 cinq (5) paragraphes et pour le chapitre 3 seulement un (1) paragraphe.
L’augmentation du nombre d’articles s’explique notamment par l’éclatement d’articles de l’avant-projet de loi de 2016 en plusieurs articles dans l’avant-projet de loi 2021.
En 2016 comme en 2021, les faîtières initiatrices de l’avant-projet n’ont pasimpliqué le groupe des 06. Le groupe Espace Civique à l’origine de la reprise du processus en 2021, n’a pas non plus pris l’initiative de consulter le G6 devenu G8.
En 2021, le G8 a rencontré des organisations de la société civile et syndicales, sur le processus de consultation de l’avant-projet de loi relative à la liberté d’association au Togo. Ces rencontres ont permis de constaterque la plupart des Organisations n’étaient pas au courant de l’existence de cet avant-projet de loi. Même au sein des faitières à l’origine de cet avant-projet de loi, plusieurs associations n’ont pas été consultées. Le G8 en conclut que la consultation des Organisations de la société civile sur cet avant-projet de loi n’a pas été inclusive.
La question que nous nous sommes posé en 2016 demeure. La loi de 1901 est-elle adaptée au contexte togolais ? Qu’impliquerait réellement une modification de cette loi ? La liberté associative en danger ?
III- NOTRE ANALYSE
Notre analyse porte sur le fondement juridique et moral du droit à la liberté d’association et d’expression, la transparence qui sous-tend le processus de modification de la loi 1901 en cours au Togo, les attentes comblées, nos inquiétudes et les défis à relever par rapport au processus d’adoption de l’avant-projet de loi.
3.1. Le fondement juridique
Le droit à la liberté d’association est garanti par les traités et conventions régionaux et internationaux relatifs aux droits humains auxquels le Togo est parti. Il est aussi inscrit dans la Constitution Togolaise, en son article 50 : « Les droits et devoirs, énoncés dans la Déclaration universelle des droits de l’homme et dans les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, ratifiés par le Togo font partie intégrante de la présente Constitution. »
La déclaration de Philadelphie adopté par l’OIT en sa vingt-sixième session de mai 1944, proclame que « la liberté d’expression et d’association est une condition indispensable d’un progrès soutenu »
La liberté syndicale est explicitée dans plusieurs dispositions de la convention 87 de l’OIT dont entre autres, les articles 2, 3, 4 et 7 qui martèlent le caractère sacré et indispensable de la liberté d’association et d’expression.
L’Article 2 stipule « les travailleurs et les employeurs, sans distinction d’aucune sorte, ont le droit, sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix, ainsi que celui de s’affilier à ces organisations, à la seule condition de se conformer aux statuts de ces dernières ».
L’Article 3 stipule « les organisations de travailleurs et d’employeurs ont le droit d’élaborer leurs statuts et règlements administratifs, d’élire librementDu brouillard à la tête du football togolais leurs représentants, d’organiser leur gestion et leur activité, et de formuler leur programme d’action ».
Les autorités publiques doivent s’abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou à en entraver l’exercice légal.
L’Article 4 stipule : « les organisations de travailleurs et d’employeurs ne sont pas sujettes à dissolution ou à suspension par voie administrative ».
L’Article 7 stipule : « L’acquisition de la personnalité juridique par les organisations de travailleurs et d’employeurs, leurs fédérations et confédérations, ne peut être subordonnée à des conditions de nature à mettre en cause l’application des dispositions des articles 2, 3 et 4 ci-dessus ».
3.2. Le fondement moral
Non seulement, le droit à la liberté d’association est garanti par les traités et conventions régionaux et internationaux relatifs aux droits humains auxquels le Togo est parti, mais aussi par des positionnements moraux.
Cet avant-projet de loi relative à la liberté d’association au Togo bien qu’innovant, comporte des articles qui compromettent la liberté d’association car incohérents et inadéquats. Ces articles ne sont pas conformes aux instruments juridiques nationaux, régionaux et internationaux des droits de l’homme ratifiés par le Togo.
3.3. Un processus peu transparent
La majorité des associations togolaises n’a pas participé au processus d’élaboration de ce nouvel avant-projet de loi et ne sait ce que cette modification contient. Ce qui confirme le caractère biaisé, non inclusif et peu transparent de la consultation.
Cependant le projet de loi tel qu’adopté en Conseil des Ministres n’est pas connu, aussi bien du Groupe des 11 faitières d’ONG que du PASCRENA qui ont proposé l’avant-projet de loi, ni de Monsieur l’Ambassadeur et Chef de Délégation de l’Union Européenne au Togo, ni de la commission des lois de l’Assemblée Nationale depuis le 07 avril 2016.
L’un des actes majeurs du séminaire du 30 au 31 mars 2021 à l’Agora Senghor de Lomé stipulait que le législateur togolais prenne en compte les Lignes Directrices sur la Liberté d’Association et de Réunion en Afrique.
Cette préoccupation a d’ailleurs fait l’objet de recommandation à l’endroit du Gouvernement togolais dans le Rapport d’Intersession de la 68ème Session ordinaire de la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (14 avril au 4 mai 2021) : « Au Togo l’Etat envisage de modifier la loi sur les associations par une réforme de la loi 1901 relative aux associations encore en cours au Togo. Cependant cette révision de la législation peut déboucher sur des dispositions liberticides, si elle ne se conforme pas aux lignes directrices sur la liberté d’association et de réunion en Afrique. Aussi nous invitons expressément l’Etat togolais à se conformer aux Lignes directrices et s’assurer que la liberté d’association et l’espace civique togolais reste accessible à tous les citoyens sans restriction aucune. »
3.4. Les limites de la loi 1901 comblées
La distinction et clarification entre associations, associations d’utilité publique et ONG :
Avant, la loi ne traitait pas des ONG internationales ni régionales. Dans la pratique, elles ne peuvent donc pas obtenir de statut légal ;
L’avant-projet de loi prévoit la délivrance des récépissés dans les Préfectures ;
L’avant-projet de loi prévoit la possibilité de recours en cas de refus de formation d’une association.
Avant, la loi ne précisait pas ce qu’il advient lorsque les autorités s’opposent à la formation d’une association. Mais on ne sait pas auprès de quelle instance juridique faire le recours.
3.5. Les points d’inquiétudes sur le processus d’adoption de la loi
Depuis le 16 mars 2020, l’Assemblée Nationale Togolaise a adopté la loi sur l’habilitation du gouvernement à prendre par ordonnances les mesures relevant du domaine de la loi. Pour le dire plus simplement le gouvernement peut désormais faire passer une loi par ordonnance sans que celle-ci n’ait besoin d’être votée par l’Assemblée Nationale. Cette mesure a été justifiée par la propagation du coronavirus (COVID-19). Elle ne devait au départ s’appliquer que pour 6 mois mais la mesure a été prorogée quatre fois.
Cette mesure d’urgence qui est justifiée dans le cadre de la lutte contre la covid-19 ne doit pas faire oublier les droits de l’homme.
Nos inquiétudes sont fondées du fait que le Secrétaire Général de l’ONU Antonio Guterres à l’occasion de l’ouverture de la 46e session du CDH le 22 février 2021, a déploré que l’épidémie de Covid-19 soit utilisée par certains pays, qu’il n’a pas cités, pour faire taire les « voix dissonantes » et les médias. « Brandissant la pandémie comme prétexte, les autorités de certains pays ont pris des mesures de sécurité sévères et des mesures d’urgence pour réprimer les voix dissonantes, abolir les libertés les plus fondamentales, faire taire les médias indépendants et entraver le travail des organisations non gouvernementales », a regretté le chef de l’ONU dans son discours annuel devant le Conseil des droits de l’homme (CDH).
La Haute Commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, Michelle Bachelet, a également dénoncé « les restrictions illégitimes des libertés publiques et l’utilisation excessive des pouvoirs d’urgence » dans le cadre de l’épidémie.
« L’usage de la force ne mettra pas fin à cette pandémie. Envoyer les critiques en prison ne mettra pas fin à cette pandémie », a-t-elle martelé, sans toutefois mentionner de pays.
Le contexte de l’urgence sanitaire nécessiterait-il de faire passer par ordonnance une loi modifiant la loi 1901 sur la liberté d’association au Togo ?
On peut se demander pourquoi il serait urgent de faire passer une telle loi dans le contexte difficile actuel. De plus, une telle loi contenant potentiellement des mesures liberticides, étant donné que la liberté d’association est l’une des libertés fondamentales sur laquelle se repose la démocratie. Il est à noter que nous nous trouvons dans un contexte ou l’espace civique est menacé au Togo. En effet, selon le rapport de CIVICUS, l’espace civique au Togo a rétréci l’année dernière, il est passé « d’obstrué à réprimé. »
3.6. Les points d’inquiétudes sur l’avant-projet de loi
Des points d’inquiétude sont perceptibles dans l’avant-projet de loi portant liberté associative au Togo en son Titre I, Section 2, Chapitre 2, article 16 :
Toute association, quelle que soit sa nature, bénéficiant de subvention ou de tout autre avantage financier consenti par l’Etat, une collectivité publique ou des donateurs privés est tenue de soumettre pour contrôle un rapport financier de ses activités, à la fin de chaque exercice, aux services compétents du Ministère de l’Economie, des Finances et autres Ministères Techniques intéressés. Copie en est faite au Ministère de l’Administration Territoriale.
Tout refus de communication ou toute autre entrave à l’exercice dudit contrôle entraîne la suppression ou la suspension de la subvention ou tout autre avantage accordé par l’Etat, la collectivité publique ou privée.
3.7. La liberté associative en danger
Quatre (4) rapporteurs des Nations-Unies ont, dans un courrier en date du 11 septembre 2019, interpellé le Président de la République sur le caractère liberticide de la LOI N° 2019-010 du 12/08/19 MODIFIANT LA LOI N° 2011-010 DU 16 MAI 2011 FIXANT LES CONDITIONS D’EXERCICE DE LA LIBERTE
DE REUNION ET DE MANIFESTATION PACIFIQUES PUBLIQUES.
Le Groupe britannique The Economist dans son classement des pays en fonction du mode de gouvernance, a sorti en février 2021 un rapport qui classe le Togo en 2020 au 141ème rang sur les 167 pays classés avec une note de 2,8 points sur 10. Ce qui loge le Togo parmi les dictatures. Selon le rapport « Le Togo a perdu 15 places à la suite d’une élection profondément imparfaite et de la répression qui a suivi contre l’opposition » et étiqueté comme étant le « grand perdant d’une année difficile pour la démocratie africaine
Selon le rapport de l’alliance mondiale de la société civile (CIVICUS) qui évalue les pays en fonction de la situation des libertés d’association, de réunion pacifique et d’expression, « la classification de l’espace civique du Togo connait un recul depuis la répression des manifestations publiques des années 2017 et suivantes.
Fort de ce qui précède, le G8 et ses Organisations alliées estiment que les éléments de restriction de la liberté associative et de musèlement au gré et au bon vouloir du gouvernement apparaissent et le caractère très flou et vague de certaines dispositions de l’avant-projet de loi, qui prêtent à interprétation conforte bien cela.
L’inquiétude du G8 et ses alliées est d’autant plus fondée du fait de la faible communication et débat autour d’une démarche censée promouvoir le mouvement associatif au Togo ; la très faible, voire la non implication des acteurs actifs notamment les Organisations de défense et de promotion des droits humains, les Organisations syndicales, les mouvements et associations d’église d’une part, et d’autre part, du fait que la modification de la loi de 1901 s’est soldée par une vague de restriction de la liberté d’Association dans plusieurs pays dont le Burundi, l’Ethiopie, le Congo et la Mauritanie.
A bien des égards, elle semble pré-augurée un nouveau mécanisme de musèlement de la société civile et partant l’étouffement des fragiles transitions démocratiques en cours sur le continent. Sur les quatre pays cités en exemple, 3 sont francophones. Va- t –on parler d’un nouveaucomplot contre l’Afrique francophone pour freiner les fragiles processus démocratiques ?
Nos craintes sont fondées du fait que l’histoire postcoloniale a déjà mis en évidence comment l’Etat africain dans son extension a réussi à dominer la société civile et non à la servir par l’imposition d’un Etat centralisé qui a accentué sa fragmentation voire sa suppression. Le cas du Togo fut matérialisé dans les années 71 et 72 avec la dissolution de tous les mouvements associatifs (Associations, mouvements d’Action catholiques, protestants, syndicats etc.).
3.8. Les défis à relever
Un rapport d’analyse juridique approfondie assortie des propositions concrètes sur les dispositions de l’avant-projet de loi jugées liberticides sera transmis au Gouvernement et au groupe Espace Civique en termes de contribution du G8 et ses alliées dans les semaines qui suivent les débats inclusifs et de large consensus ;
l’Etat togolais doit s’engager à garantir la transparence dans le processus de modification de la nouvelle loi portant liberté d’association au Togo ;
le gouvernement doit prendre toutes les dispositions pertinentes et inclusives pour élargir le débat à d’autres composantes de la société civile écartées tactiquement du processus de consultation sur l’avant-projet de loi portant liberté d’Association au Togo ;
l’Etat togolais doit absolument et nécessairement protéger les droits et devoirs proclamés et garantis entre autres, par la Déclaration universelle des droits de l’homme, les Pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme, la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, les conventions fondamentales de l’OIT et les lignes directrices de l’Union Africaine sur la liberté d’Association et de Réunion en Afrique ;
l’Etat togolais doit tout faire pour que ces droits fondamentaux ne fassent l’objet d’aucune restriction ou dérogation, sauf dans certaines circonstances acceptables et justifiables par l’intérêt général ou la protection d’un droit fondamental.
les organisations de la société civile togolaise doivent prendre de la hauteur pour traiter les questions citoyennes et les affaires de la cité dans un esprit d’impartialité et de respect mutuel ;
les organisations de la société civile et les organisations syndicales doivent faire l’effort de s’approprier les grands enjeux de développement du pays à l’Horizon 2025 et la dynamique d’inclusion et de cohésion sociale qui les sous-tendent pour le bien commun et l’intérêt général ;
le G8 et ses alliées des Organisations de la société civile et des Organisations syndicales doivent en définitive émettre et s’engager le vœu pour que la modification de la loi 1901 puisse garantir dans le prochain rapport de CIVICUS le reclassement de l’espace civique du Togo de « réprimé à ouvert ».
IV- RECOMMANDATIONS
Le groupe des 08 OSC par cette note de position recommande :
● Au Gouvernement de :
• continuer par garantir la liberté d’association consacrée par la constitution togolaise et les instruments juridiques internationaux et régionaux ;
• asseoir une politique d’amélioration de l’espace civique faisant passer le Togo de la catégorie de « réprimé » à « ouvert »
• faire adopter un cadre législatif et réglementaire approprié qui soit respectueux des droits et devoirs proclamés et garantis par la Déclaration universelle des droits de l’homme, les Pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme, la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et les lignes directrices sur la liberté d’association et de réunion en Afrique ;
• prendre des dispositions pertinentes inclusives pour élargir le débat à d’autres composantes de la société civile autour du contenu de l’avant-projet de loi sur la liberté d’Association au Togo en vue de l’adoption d’un cadre législatif et réglementaire approprié qui garantisse une véritable liberté d’association, d’expression, d’opinion et de manifestation ;
▪ A l’Union Africaine et à ces instances compétentes de :
prêter une attention particulière à ce processus et s’assurer que cela puisse se faire dans le respect de la charte africaine des droits de l’Homme et des peuples et conformément aux lignes directrices sur la liberté d’association ;
• Aux partenaires bilatéraux techniques et financiers de :
repenser le soutien à apporter aux organisations de coopération décentralisée et de solidarités internationales pour qu’elles maximisent leurs appuis de façon transversale sur les libertés publiques et droits fondamentaux en danger sur tous les projets et programmes mis en œuvre au Togo ;
apporter davantage de soutien au gouvernement du Togo via les relations bilatérales pour créer des conditions de préservation de l’espace civique ;
garder un œil attentif, ou faire un suivi de proximité pour interpeller les gouvernants en temps réel afin de garantir la préservation de l’espace civique au Togo ;
continuer par appuyer le Gouvernement et les Organisations de la société civile dans le processus pour des débats ouverts inclusifs et consensuels.
● Aux Organisations de la société civile de :
rester mobilisées en vue de s’associer à toute démarche de plaidoyer envers les autorités compétentes ;
se former, former et sensibiliser sur le droit à la liberté d’association ;
apporter des contributions pour nourrir qualitativement et quantitativement l’avant-projet de loi portant modification de la loi 1901.