25 C
Canada
Thursday, March 28, 2024
Accueil ACTUALITES Bras de Fer entre le Mali et la CEDEAO : Sortir de...

Bras de Fer entre le Mali et la CEDEAO : Sortir de la logique des sanctions !

Un mois après la prise des sanctions particulièrement sévères contre le peuple malien par les chefs d’Etats de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), les dirigeants maliens et leur peuple ont non seulement tenu vaille que vaille le coup, mais cherchent avec rigueur des solutions alternatives sérieuses.

L’essentiel des importations de produits se fait désormais à partir du port de Conakry. Par jour, l’on voit des pelletons de camions à perte de vue qui viennent du port de Guinée pour desservir le Mali en produits de tous genres.

Au même moment, les autorités maliennes ont commencé à nouer des relations fortes avec le Katar, l’Iran, la Russie, l’Arabie Saoudite, la Chine, l’Algérie, la Mauritanie, le Maroc, etc. Le ministre malien des Affaires étrangères, Abdoulaye Diop est pratiquement entre deux avions et plaide la cause du Mali partout où besoin est.

Visiblement, son plaidoyer reçoit des échos fortement favorables d’autant plus que ces pays, pour l’essentiel d’obédience musulmane, prônent comme principe de vie, la solidarité et l’assistance à autrui, surtout lorsque ce dernier est en situation de détresse.

Ainsi, l’assistance humanitaire qui lui sert d’instrument de plaidoyer, est presque garantie, notamment auprès des pays comme le Katar et l’Iran, en sus des appuis financiers conséquents pour permettre au Mali de faire face aux charges régaliennes de l’Etat.

On peut objectivement imaginer que tous ces secours de circonstance dont vont bénéficier les maliens, ne pourraient pas suffire pour assurer l’autonomie du pays dans l’immédiat, mais il s’agit là des palliatifs importants qui lui permettent aussi bien de tenir le coup, que de disposer du temps pour envisager des dispositions plus sérieuses en vue de son affranchissement à moyen et à long terme.

En revanche, si les Maliens ont des raisons d’espérer des soutiens fermes de la part de ces différents Etats amis sollicités, les pays voisins, notamment la Côte d’Ivoire et le Sénégal vivent des moments particulièrement difficiles du fait de ces sanctions.

En effet, du port d’Abidjan et de San Pédro, quittaient par jour, entre 200 et 250 camions de marchandises en direction du Mali. Depuis un mois, moins de 50 camions font une telle navette. Selon Koné Fati, président de la confédération des syndicats des conducteurs routiers et transporteurs d’Afrique de l’Ouest, il y a urgence à faire cesser cette situation.

Il note avec regret que l’impact négatif de ces sanctions sur les activités économiques en Côte d’Ivoire est énorme. « Lorsque les marchandises maliennes atteignent 200 mille tonnes, les camions maliens chargent les 2/3 et ceux de la Côte d’Ivoire 1/3 pour desservir le Mali, aujourd’hui pratiquement plus rien ne se fait encore », affirme-t-il.

Il explique que malgré les exceptions portées sur les produits de première nécessité tels que le riz, le lait, le sucre, ainsi que les produits pharmaceutiques, le trafic ne s’opère plus du fait de la suspension des transactions monétaires entre le Mali et les autres pays, d’autant plus qu’il n’est plus possible d’opérer des transferts qui servent à lancer des commandes de marchandises. Du coup, les ports ivoiriens ne sont plus compétitifs.

Par ailleurs, Diabacté Mamadou, comptable à la compagnie SAMA Transport, dédiée au transport des passagers entre Abidjan à Sikasso, affirme que désormais, la compagnie n’arrive plus à remplir deux cars alors qu’elle mobilisait journellement une bonne dizaine de bus pour un tel transport. « On essaye de se maintenir sinon ça ne va pas, si cette situation dure encore deux à trois mois, personne ne pourra encore tenir », s’est-il plaint.

Quant au Sénégal, la donne est encore plus compliquée. Le Mali qui est le principal pourvoyeur du bétail au Sénégal n’en envoie plus. Conséquence, le prix du kilogramme de viande qui était de 1500 fcfa, est désormais situé entre 2500 et 3000 fcfa. Or les sénégalais ne blaguent pas avec la viande du bétail, notamment venu du Mali.

En effet, les échanges commerciaux entre le Sénégal et le Mali s’élèvent à 285 milliards de fcfa par an, selon un économiste sénégalais.
La fermeture des frontières entre les deux pays et la suspension des transactions ont laissé un effet direct dans la vie des milliers de sénégalais. Des produits en provenance du Mali tels que le beurre de Karité et le Tamarin se font de plus en plus rares sur le marché sénégalais.

Et l’économiste en question de soutenir que si la situation continue, il y’a un risque sérieux de révolte, « car des activités sont carrément éteintes entrainant la perte des milliers d’emplois directs et indirects ».

Au regard de tout ce qui précède, il apparait clairement que les peuples des pays limitrophes du Mali subissent plus que jamais les effets néfastes de ces sanctions dont leurs dirigeants auraient pu faire économie en procédant par un travail pédagogique et en ayant recours à d’autres moyens plus softs de pression, si tant est que leur désir est de voir l’ordre constitutionnel se rétablir le plus convenablement possible dans le pays de Modibo Kéïta.

Ceci est d’autant plus vrai que l’expérience montre clairement que les sanctions contre un pays n’ont jamais donné de résultats escomptés nulle part dans le monde.
Commençons d’abord par le Togo. En 1993, sous prétexte du déficit démocratique, l’Union Européenne avait pris des sanctions contre notre pays en suspendant carrément sa coopération. Cette mesure a duré jusqu’en 2006 sans que cela n’entraine un soulèvement populaire et encore moins, le renversement du pouvoir des Gnassingbé.

Ailleurs, un pays comme l’Iran a également fait l’objet des sanctions de la Communauté Internationale, pendant des années, cela a produit un effet contraire qui a rendu l’Iran quasiment autonome, puissant et riche sur plusieurs plans.

La preuve en est qu’aujourd’hui, nos pouvoirs font la cour à l’Iran pour bénéficier de son expérience dans plusieurs domaines. Il importe à cet effet de rappeler que le ministre togolais des affaires étrangères, le professeur Robert Doussey, venait de s’y rendre il y a juste deux semaines, en vue de réchauffer les relations entre le Togo et ce pays, principal allié aujourd’hui de la Russie.

Cuba a lui aussi subi l’embargo des USA pendant des décennies, qui a d’ailleurs attenté près d’un millier de fois à la vie de Fidel Castro, rien de concret n’a été obtenu. Au contraire, Cuba a fait appel au génie national qui a permis l’affranchissement de ce pays et son affirmation dans plusieurs domaines dont celui de la médecine notamment.

L’expertise de Cuba dans la médecine n’avait-elle pas été sollicitée par plusieurs pays en 2020 lorsque le virus de Covid-19 a surgi dans le monde ? Ce pays a-t-il encore besoin d’aide internationale pour faire vivre son peuple comme c’est le cas dans l’écrasante majorité des Etats africains?

Lorsque de l’extérieur, l’on vous confine dans votre dernier retranchement, il vous suffit d’un minimum d’intelligence pour activer votre énergie du désespoir qui opère pratiquement des miracles dans votre vie. Ces faits sont si vrais que les dirigeants de la CEDEAO vont finir par se rendre à l’évidence que le recours aveugle à des sanctions injustes et surtout illégales contre le peuple malien était vraiment mal inspiré.

Il importe naturellement, dès l’instant où les dirigeants maliens ont eu l’habilité de mettre en place un comité en vue de l’amorce d’un dialogue intelligent avec cette communauté, que ces sanctions soient levées au plus vite par ces dirigeants afin de soulager leurs propres peuples qui en payent injustement le prix aujourd’hui.

Mais tout compte fait, la CEDEAO est allée si loin, que l’on peut aisément imaginer que les dirigeants maliens ne vont pas renoncer à des solutions alternatives crédibles qui vont leur permettre tôt ou tard, de se défaire ou plutôt, de se soustraire de cette communauté surtout que pour l’instant, beaucoup de ses dirigeants ne sont toujours pas résolus à emprunter la voie de la noblesse qui exige d’eux, une gouvernance assainie et centrée sur le bon devenir de leurs citoyens.

Luc ABAKI

Subscribe
Notify of
guest
0 Comments
Inline Feedbacks
View all comments

Popular News

Togo-Yacoubou Moutawakilou, condamné à mort et exécuté pour son engagement pour le Togo

Depuis ce triste jour du 13 janvier 1963 où Sylvanius Olympio fut assassiné, tous ceux qui ont essayé d´affronter la dictature en se mettant sur son chemin, furent impitoyablement éliminés. La liste de tous ces martyrs, assassinés d´une façon ou d´une autre, est longue. Les nombreuses tentatives depuis le début des années ´90 pour humaniser le pouvoir d´état et le rendre aux Togolais, n´ont pas pu résister à la terreur militaire, seule légitimité de la dictature du père en fils.