Faure Gnassingbé et la hantise du pouvoir à vie : La 5ème République ne rassure plus

La course entamée par le Président Faure Gnassingbé depuis l’an dernier pour se tailler un refuge pour le pouvoir à vie ne semble pas encore terminée. Il continue de chercher la protection idéale et parfaite pour une assurance indéfectible.

La constitution togolaise de la 4ème République votée depuis 1992 et vidée de son vitellus a été perçue par le régime RPT-UNIR du père au fils comme un épouvantail qui fait fuir ce dernier à ne point s’arrêter. 

Un faux retour à la limitation de mandats présidentiels 

Le dernier grand soulèvement populaire des années  2017-2018 qui a provoqué le séisme politique au sein du pouvoir cinquantenaire et la feuille de route de la CEDEAO ont contraint l’homme du 05 février à accepter le retour à la limitation de mandats présidentiels après trois quinquennats passés au sommet de l’Etat. Et pour s’assurer d’une vie paisible après le pouvoir, le prince s’est taillé  l’article  75 qui  précise : « Les anciens Présidents de la République sont, de plein droit, membres à vie du Sénat. Ils ne peuvent être ni poursuivis, ni arrêtés, ni détenus, ni jugés pour les actes posés pendant leurs mandats présidentiels ».  Naturellement, cette disposition a fait penser au commun des mortels que jusqu’en 2030 au plus tard, au terme de ses deux mandats supplémentaires  ajoutés aux trois précédents, le président Faure Gnassingbé serait enfin repu des 25 années de règne  pour enfin prendre sa retraite avec toute la protection garantie  par l’article 75.

 Mais, c’est sans compter avec l’incertitude et la boulimie du pouvoir du locataire  du Palais de Lomé.
En effet, dès le premier trimestre de l’année 2024, les tenant du pouvoir de Lomé entament le basculement du pays vers ce qu’ils nomment «régime parlementaire». 
Le vendredi 19 avril 2024, les députés de la majorité présidentielle adoptent définitivement la constitution de la 5ème République.  Cette nouvelle Constitution  supprime ainsi  l’élection présidentielle au suffrage direct. Autrement dit, les citoyens ne choisiront plus directement le chef de l’État. Ce sont désormais les parlementaires qui éliront le président de la République pour un mandat de quatre ans.  Le président du conseil des ministres , sorte de Premier ministre qui aura la réalité du pouvoir, sera choisi dans le parti majoritaire. Et son mandat sera lié à celui des députés et des sénateurs. 

Et depuis lors, les contestations ne cessent de se faire manifester de toute part. Partis politiques et organisations de la société civile se font entendre. En réaction à ce tollé  général, le pouvoir de Lomé adopte la méthode de la caravane qui passe sans se soucier de  l’aboiement du chien.   Après les élections régionales et la nomination des gouverneurs, le Sénat fut installé. Rien ne semble pouvoir arrêter le système dans sa marche vers son objectif. 

 La 5ème République  manque-t-elle de garantie suffisante ?
Alors que les Togolais voient en la constitution de la 5ème république l’unique moyen pour Faure Gnassingbé de se garantir le pouvoir à vie, son ministre des Affaires étrangères annonce la volonté du Togo d’intégrer l’AES (Alliance des Etats du Sahel) dirigée par trois putschistes. Aussi, après ses déclarations du début de l’année sur la chaîne de télévision Vox Africa, le ministre des Affaires étrangères, de la Coopération et  de l’Intégration africaine, Robert Dussey assure-t-il  cette fois sur les réseaux sociaux que le Togo envisage d’adhérer à l’AES, l’organisation des trois putschistes: le Malien Assimi Goïta, le Burkinabè Ibrahim Traoré et le Nigérien Abdourahamane Tiani. Qu’est-ce qui peut justifier une telle  détermination du régime togolais à adhérer à l’AES? se demande-t-on. Officiellement, le ministre Robert Dussey laisse entendre que l’Intégration du Togo à l’AES permettra au trois pays de l’AES de devenir les partenaires privilégiés du port autonome de Lomé. 

Mais au-delà de cette raison officielle, les observateurs avisés y voient un motif politique dont la réelle intention serait de se défaire de la pression du  protocole additionnel de la CEDEAO sur la démocratie et la bonne gouvernance. Le Togo reste en effet le seul et unique pays au sein de la CEDEAO qui n’a jamais connu d’alternance politique depuis l’avènement de la démocratie et qui use de tout subterfuge pour l’éviter. Plusieurs crises politiques suivies de violences et de répressions des forces de défense et de sécurité  sur les populations civiles ont marqué la marche du Togo vers cette alternance politique jamais admise par le régime  en place. De ce fait, le Togo se singularise de façon flagrante dans sa posture d’unique pays dont la présidence est assumée par une seule famille depuis près de 60 ans.

Pour le président  Faure Gnassingbé, pense-t-on, demeurer ainsi dans la CEDEAO avec la même logique du pouvoir à vie lui donnerait  l’image d’un caneton  sorti de la boue et se retrouvant  au milieu des pigeons blancs. Le malaise dans cette situation serait sans doute bien profond et doit sérieusement tourmenter le pouvoir de Lomé.  En plus, il n’est pas exclu que la CEDEAO  instaure prochainement une nouvelle disposition qui oblige les chefs d’Etat et de gouvernement  à  ne pas excéder deux mandats dans l’exercice de leurs fonctions. Alors, la seule solution pour échapper à cette situation inconfortable serait de trouver un refuge confortable à l’AES, espérant gagner le soutien du peuple, loin de la CEDEAO, mais aussi des pressions de la France dont le soutien en faveur du pouvoir de Lomé s’est extrêmement affaibli.

Joachin 

Source : Lecorrecteur.tg

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