Afrique mon Afrique, que je t’aime

En 2002, en quittant Saint-Cyr, mon commandant d’unité français m’avait demandé, à la fin de notre entretien.

– mon lieutenant, vous comptez retourner au Togo à la fin de votre formation ? C’est un peu chaud chez vous actuellement. Je rappelle que nous étions en 2002.

– mon capitaine, d’après moi, le Togo est le plus beau pays au monde. Je serai payé en tant que lieutenant environs 200 euros mois, soit 20 fois moins que je gagne ici, mais pour rien au monde je ne resterai ici. Je viens de là, je suis né là-bas et j’y serai enterré.

– vous avez aimé votre séjour en France ? Quel est votre plus beau souvenir jusqu’ici ?

– c’est quand j’étais gamin, dans mon village, au nord du Togo. On n’avait pas d’électricité, pas de télé, pas d’eau courante, mais jamais je n’ai été plus heureux que dans cette enfance-là.

Mon interlocuteur était stupéfait et je suis d’avis qu’il ne pouvait pas comprendre ce dont je parlais. Le consumérisme a malheureusement pris le pas sur nos autres valeurs.

Quand je regarde cette vidéo, je comprends pourquoi parfois, le reste du monde ne peut pas nous comprendre, nous autres Africains. Cette exubérance de bonne humeur, cette orgie apoplectique de joie de vivre tranche avec la misère ambiante. L’émotion est nègre. Et alors ?

La côte d’Ivoire est un pays béni de Dieu. Même à l’époque, même quand ça tirait (j’y étais casque bleu en 2004), les gens préféraient dormir dans les maquis pour passer le couvre-feu.

Et quel talent ? quelle dextérité ? Quelle créativité ?

Pour être honnête, je me retrouverai toujours à l’aise dans un terrain poussiéreux, avec ces jeunes fougueux et magiciens de leur corps, que dans un théâtre lambrissé. On dit chez moi que le poisson reste là ou l’eau lui semble profonde.

Ici je suis chez moi

Je suis vraiment chez moi

Les hommes que je croise

M’appellent leur fils

Et les enfants leur frère.

Aimons nos pays vivants.

Gerry Taama