Le mot est à l’air nouveau. Pourtant il est aussi vieux que la langue française. Mais c’est par le truchement des réseaux sociaux qu’il est remis à jour. Pour les férus des réseaux sociaux gratuits en Afrique comme tik tok, YouTube, WhatsApp, télégramme, Snapchat, Instagram etc…, il ne passe un seul jour sans que le mot « influenceur » ne sortent de leur discussion. Et au regard des défis de l’Afrique actuelle, on est en droit de se demander, quels influenceurs pour quelle influence sur quels influencés ?
De toutes les études statistiques faites par les diverses organisations régionales et internationales sur la population africaine, la constante irréfutable est que sa portion juvénile est très importante. Cette dernière est estimée entre 65% et 76%. Et elle est la première utilisatrice, sinon la meilleure consommatrice des plateformes de réseaux sociaux. En plus des applications préinstallées sur leurs smartphones, tous les jeunes africains (sinon la plus grande partie) téléchargent les applications des réseaux sociaux mentionnés plus haut. A priori, il s’agit de plateformes d’interaction instantanée pouvant permettre de nouer diverses relations. Et il faut reconnaître en leur faveur, une rapidité de transmissions d’informations.
Cependant, on remarque également une montée de personnages étranges sur ces réseaux sociaux. Il s’agit d’hommes et de femmes qui, sans égard à aucune convenance sociale, s’affiche et affiche une certaine réussite sociale à travers leur richesse matérielle. Ces types de personnes abondent dans la plupart des pays africains et arborent fièrement le titre « d’influenceurs ». Pourtant, aucune biographie de ceux-ci ne révèle clairement ni l’origine ni les moyens de cette réussite. Et ce titre d’influenceurs n’est pas illusoire car en réalité, ils ont des milliers voire des millions de jeunes abonnés qui suivent les contenus de leur post. En plus de ce titre d’influenceurs, d’autres s’autoproclament « coach » et émettent des opinions à la limite indécents et contre-productifs. Très récemment, dans un Etat d’Afrique de l’Ouest, une « influenceuse – coach » qui s’est vue confier une émission télé, a conseillé clairement une téléspectatrice d’attribuer une grossesse de son partenaire chauffeur de profession à un autre homme. D’autres n’hésitent pas à faire preuve de violences physiques ou verbales sur des plateaux de télévision ou encore dans des « live » ou « direct ».
Le comble est que ces contenus sont accessibles aux jeunes qui d’ailleurs en sont les premiers destinataires. A force d’y avoir accès de façon répétitive, l’opération d’influence produit ses effets. Et véritablement, les influenceurs injectent leur pensée, manière de vivre à des milliers « d’influencés » qui les suivent. Une certaine banalisation de la réussite par un effort sérieux, soutenu et constant se lit à travers les post de ces influenceurs. Et cela a pour effet de pousser les jeunes gens dans une sorte de procrastination en espérant que la réussite vienne par magie.
L’influence exercée par ces hommes et femmes dont l’objectif principal est le divertissement, n’est pas dans une logique de développement du continent. Ailleurs, la jeunesse est orientée vers des domaines de productions réelles de richesses axées sur le travail. Est-il besoin de rappeler que les équipements utilisés pour être présents sur les réseaux sociaux sont conçus et fabriqués par des jeunes gens ailleurs ?
Cette Afrique des influenceurs passera certainement car il s’agit juste d’un phénomène de mode. Pourtant, il est en train de faire trainer les pas à ce continent qui est déjà très en retard. Les terres fertiles sont disponibles en Afrique mais les doigts sont occupés à « liker » des contenus virtuels. Les temps de formation à des activités génératrices de revenus sont désormais consacrés à des « marmailles » stériles. Cette Afrique des influenceurs doit certainement faire les affaires des Chefs d’Etats africains car elle permet de détourner l’attention des jeunes sur les véritables défis et la gestion des affaires de la cité. Les jeunes sont au courant du dernier « clash » entre X et Y tous deux influenceurs, mais ils ignorent les tenants et les aboutissants de la dernière loi votée au Parlement.
Pauvre Afrique !
Barth K.