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Togo-Prof. Robert Dussey : « Le Togo dispose de plus d’un millier de soldats au Mali »

Le 16 février dernier, le ministre togolais en charge des Affaires étrangères, Prof. Robert Dussey a effectué une visite de travail en Russie. Au menu des discussions, l’accès au Spoutnik V pour vacciner les Togolais contre le Covid-19, la suppression de visa pour les Togolais détenteurs de passeport diplomatique. Dans une interview accordée au confrère Sputnik France, le chef de la diplomatie togolaise revient en détail sur sa visite de travail en Russie, notamment les accords qui ont été conclus. Il parle également de la position du Togo face à l’insécurité grandissante dans le Sahel. Bonne lecture.

Sputnik : Monsieur le Ministre, le 16 février 2021, vous effectuez une visite officielle à Moscou. Comment décrivez-vous la trajectoire des relations entre les deux pays ?  

Pr Robert Dussey : Le Togo a toujours été un ami de la Russie. Les deux pays ont toujours eu de très bonnes relations. Mais il faut reconnaître que nous n’avions pas su bien développer cette relation. Aujourd’hui, c’est l’occasion pour nous d’y remédier. Surtout que la visite que nous effectuons est la toute première d’un officiel togolais dans ce pays depuis l’accord-cadre de coopération entre les deux pays au début des années 1960. Jamais un officiel togolais, ni au niveau présidentiel, ni au niveau ministériel, ne s’est rendu en visite officielle en Russie. Nous tenons donc à remercier les autorités russes qui, dans leur nouvelle vision aujourd’hui, ont voulu associer le Togo pour qu’ensemble nous puissions travailler pour la paix et le développement dans chacun de nos deux pays

Quels sont, pour vous, les grands enjeux de ce voyage ?

Pr Robert Dussey : C’est essentiellement des enjeux économiques. Le Togo s’est doté d’un plan national de développement (PND) pour la période 2018-2022. Ce plan est renforcé par un plan d’action gouvernemental 2020-2025. Puisque nous voulons de plus en plus diversifier notre économie, nous pensons que, sur des volets comme l’agriculture, le développement industriel et autres, la Russie peut apporter énormément. Comme elle le fait déjà beaucoup dans plusieurs pays africains. Nous avons là une occasion de l’amener à le faire aussi au Togo.

Peut-on s’attendre à la conclusion d’accords ?

Pr Robert Dussey : En effet, il y a deux signatures en vue. La première est prévue dans le cadre de l’exemption de visa de services diplomatiques entre la Russie et le Togo. Nous allons également parapher un mémorandum politique. Mais il faut dire que le Togo est déjà en discussion avec la Russie pour des programmes dans les domaines agricoles, industriel et éducatif. Je dois préciser que, sur le plan de l’éducation, des étudiants togolais bénéficient, depuis des années déjà, de bourses de l’État russe pour étudier en Russie. Au moins une centaine de Togolais ont été formés grâce à ces dispositifs. La Russie a déjà démontré sa bonne volonté sur ce plan et nous voulons continuer à travailler dans ce sens en élargissant nos cadres de coopération en matière économique. Particulièrement sur l’agriculture et la transformation des produits agricoles, conformément à notre plan national de développement.

Le Togo se prépare pour une campagne de vaccination contre le Covid-19 qui doit démarrer en juin prochain. Ce voyage permettra-t-il de négocier avec les Russes l’acquisition de doses de leur vaccin Spoutnik V ?

Pr Robert Dussey : La pandémie au Covid-19 est tellement grave que nous pensons que tout vaccin qui peut sauver l’humanité et préserver nos populations est bon à prendre. Il va de soi donc que, durant notre séjour en Russie, nous négocierons l’achat du vaccin Spoutnik V pour la campagne de vaccination des Togolais, prévue pour démarrer en juin prochain. Le Togo n’est pas le seul pays sur le continent à s’intéresser à ce vaccin. D’autres États l’utilisent déjà et nous étions déjà, de notre côté, en discussion avec les autorités russes. Nous espérons trouver au cours de notre séjour un bon deal afin que nos populations puissent, selon la volonté du Président de la République, Faure Gnassingbé, être vaccinées le plus tôt possible.

Il y a un an exactement, en marge de la conférence de Munich sur la sécurité en Afrique, vous annonciez avec votre homologue russe, Sergueï Lavrov, un forum économique Togo-Russie. Ce projet fait-il partie des victimes collatérales du Covid-19 ?

Pr Robert Dussey :  Effectivement, nous avions annoncé un forum que nous étions en train de préparer. Mais notre élan a été coupé par la pandémie. Comme vous le savez, partout ailleurs, dans tous les pays, le protocole sanitaire mis en place interdit les grands événements. Cela a retardé les choses. Mais je puis vous assurer que, dès que la situation sanitaire le permettra, ce forum se tiendra. Parce qu’il y a une volonté politique avérée des deux côtés. Et les responsables des chambres de commerce des deux pays étaient déjà informés.

Qu’espérez-vous de ce forum?

Pr Robert Dussey : Ce forum est important pour nous parce que la Russie veut investir sur le continent. Moscou le fait d’ailleurs déjà dans certains pays. Parce que nous avons beaucoup de potentialités et d’opportunités dans notre pays en lien avec notre plan national de développement, il est de notre devoir d’inviter la Russie à investir aussi chez nous. Vous savez, au Togo, nous voulons totalement sortir du cadre trop formel de la diplomatie. Maintenant, nous faisons de la diplomatie économique. Donc si les hommes d’affaires russes vont investir dans certains pays d’Afrique et même dans la sous-région, pourquoi ne pas venir le faire ici chez nous aussi ? Raison pour laquelle Sergueï Lavrov et moi-même avions souhaité que les hommes d’affaires de nos deux pays puissent se rencontrer dans ce forum économique pour apprécier les potentialités.

Depuis le sommet Russie-Afrique de Sotchi en 2019, le Togo essaie de se positionner comme porte d’entrée des investissements russes en mettant en avant « sa position géographique ». En quoi cet atout peut-il séduire vos partenaires ?

Pr Robert Dussey : Le Togo a le seul port naturellement en eau profonde de tout le golfe de Guinée. Il y a deux ans, le port autonome de Lomé a été classé premier port à conteneurs de la sous-région. Le Togo a sur place, à Lomé, la capitale, une compagnie aérienne qui dessert toutes les autres capitales de la sous-région. Lomé abrite le siège de plusieurs banques régionales, etc. Donc il existe des raisons fondamentales pour positionner le Togo comme porte d’entrée des investissements russes en direction d’autres pays de la sous-région. Ceux de l’hinterland, par exemple. Au-delà des Russes, c’est une position géographique très intéressante pour tous les partenaires. Les Américains et les Européens en sont conscients. Et c’est à nous de savoir présenter ces atouts aux partenaires financiers et aux hommes d’affaires qui veulent investir au Togo. Nous croyons que, pour assurer le développement de notre pays, il faudrait forcément un investissement direct étranger (IDE) important. Et quand on voit les investissements russes dans les pays de l’Europe de l’Est et de l’Ouest, y compris dans certains pays de la sous-région ouest-africaine, nous pensons que le Togo a toutes les potentialités pour attirer les mêmes capitaux. Et le gouvernement a mis en place toutes les conditions nécessaires. C’est le message que nous adressons à tout investisseur potentiel.

Les Russes sont prêts à aider dans la zone sahélo-saharienne pour lutter contre le terrorisme. C’était l’une de vos déclarations à Sputnik en 2020, après en avoir discuté avec Sergueï Lavrov à Munich. Quelle est la vision du Togo pour une paix et une sécurité durable dans la sous-région ?

Pr Robert Dussey : Le Togo est un pays de paix. Depuis plusieurs années, Lomé accueille de nombreuses délégations pour des discussions tournant autour de la paix, de la stabilité et du développement sur le continent. Chaque fois qu’un pays africain, particulièrement de la sous-région, est en difficulté, le Togo par sa diplomatie, cherche à contribuer à la paix. Donc, quand nous voyons la situation dans le Sahel et les situations sociopolitiques et sécuritaires dans lesquelles se trouvent certains de nos voisins et frères comme le Mali, le Niger et le Burkina, nous ne pouvons pas croiser les bras et regarder. C’est pour cette raison que le Président Faure Gnassingbé, beaucoup sollicité ces derniers temps, ne s’est pas tu. Et nous l’avons accompagné dans plusieurs missions de pacification dans le Sahel. Nous disons forcément qu’il faut qu’il y ait la paix dans cette région parce que notre survie en dépend. Sinon, la ceinture que forme le Sahel et d’autres pour nous les pays du golfe de Guinée est en danger.

À ce jour, nous sommes en train de redynamiser l’initiative d’Accra qui englobe le Ghana, le Bénin, le Togo et la Côte d’Ivoire pour maintenir cette ceinture et éviter une descente des groupes terroristes armés vers les côtes. Nous le faisons parce que, dans le golfe de Guinée, lui-même, il y a de plus en plus d’insécurité surtout dans le domaine maritime. Si nous laissons une menace armée venir de l’intérieur du continent, vous conviendrez avec nous que les pays du golfe de Guinée seront pris en étau. Donc le travail de la diplomatie togolaise est d’éviter que cela arrive. Tous les pays comme la Russie qui peuvent contribuer à cela sont les bienvenus. Nous avons aujourd’hui le G5 Sahel qui est soutenu par la France, les États-Unis et d’autres pays européens, le Togo ne verra pas d’inconvénients à ce que d’autres partenaires, comme la Russie, viennent nous aider à contenir cette menace terroriste.

Toutefois, votre séjour ne semble pas prévoir la conclusion d’accords dans le domaine de la défense et de la sécurité…

Prof Robert Dussey : Non, rien de cela n’est en vue. Le Togo bénéficie déjà de l’appui d’autres partenaires sur des questions sécuritaires et militaires. Mais nous restons ouverts aux propositions qui nous seront faites.

En parlant d’insécurité dans le Sahel, le Togo paie déjà un prix pour son engagement en faveur de la paix. Une attaque terroriste contre son contingent au sein de la mission onusienne au Mali s’est soldée, le 10 février, par la mort d’un militaire et a fait plusieurs blessés.

Pr Robert Dussey : Permettez que je souhaite un prompt rétablissement à nos soldats blessés et que je présente mes condoléances à la famille du soldat décédé. C’est tout le Togo, toutes les forces armées togolaises qui sont tristes. Mais, vous savez, comme l’a dit le Président de la République, nous avons perdu un homme, mais nous allons continuer à aider nos frères maliens pour que vienne la paix dans ce pays. De toutes les façons, le Togo dispose de plus d’un millier d’hommes déjà au Mali. Ils y sont à la demande des Nations unies et le Togo est toujours disposé à aider d’avantage si la demande est formulée.

Source : Alphonse Logo/Sputnik France

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sen
sen
February 18, 2021 3:31 pm

ce qu’il faut c’est reglé le problème malien à la base de façon définitive, et eviter d’envoyer nos valeureux soldats qui font un travail apprécié, se faire massacrer.

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