Dès le début, de nombreux acteurs politiques et observateurs ont soutenu que la déclaration de l’Etat d’urgence sanitaire était basée sur des raisons politiques. Cette assertion semble se confirmer. Le gouvernement a annoncé qu’aucun patient atteint de la covid-19 n’existe plus dans les centres de prise en charge au Togo. Pourtant, l’Etat d’urgence est toujours maintenu.
« Covid-19 : deux ans après, plus aucun malade dans les centres de traitement ». Ce titre, c’est celui du site internet republiquetogolaise.com, portail officiel de la République togolaise. Les informations qui y sont publiés engagent directement le gouvernement. A la date du 08 mars 2022, soit presque deux ans jour pour jour après la déclaration du premier cas, plus aucun patient atteint de la covid-19 n’est recensé dans les structures de prises en charge du coronavirus sur le territoire. Ces données proviennent de la coordination nationale de la riposte à la Covid-19. En d’autres termes, que ce soit au CHR-Lomé Commune ou dans les autres centres de prise en charge mis en place dans le pays, plus personne n’est sous traitement.
Pour le site gouvernemental d’information, les données ne signifient pas la fin de la pandémie au Togo, mais valident la stratégie mise en place par le gouvernement depuis le début. « En effet dès le 06 mars 2020, plusieurs décisions fortes ont été prises par l’exécutif avec l’appui du conseil scientifique, et de nombreuses mesures restrictives (allégées puis renforcées au gré des vagues de contamination) ont dû être instaurées : état d’urgence sanitaire, fermetures des frontières, couvre-feu, bouclages de localités, fermetures de lieux de culte ou de loisirs, masques obligatoires, limitations de rassemblements, de manifestations culturelles et sportives, instauration de jauges, quarantaines obligatoires, tests PCR, nouvelles procédures de voyage, vaccinations, etc. », résume le communicateur.
Toutes ces mesures, y compris l’obligation de vaccination, ont été réellement prises par le gouvernement. Ont-elles contribué à la situation actuelle avec zéro patient dans les centres de prises en charge ? Sur cette question, les avis divergent selon que l’on soit pour ou contre lesdites mesures. Ce qui est indéniable, c’est qu’officiellement à la date du 08 mars – honneur aux femmes – tous les malades de la Covid-19 sont guéris. La tendance a été amorcée depuis plusieurs semaines où les données officielles faisaient état d’une baisse sérieuse des cas de contamination couplée d’une diminution du nombre de patients sous soins, du fait des guérisons.
Conséquence, le 22 février 2022, le gouvernement a procédé à un allègement des restrictions. Dans un communiqué, il a indiqué que « tenant compte du taux de positivité », la durée de l’isolement est réduite, les lieux de culte peuvent rouvrir, et les activités culturelles et sociales peuvent reprendre sous conditions d’une autorisation.
Mais ce qui est constant dans cette crise sanitaire, c’est que certaines mesures dont les dispositions avantagent le gouvernement, plutôt Faure Gnassingbé, sont maintenues. Il s’agit en premier lieu de la fermeture officielle des frontières terrestres. Il est vrai que sur papier, le Togo n’a pas encore rouvert ses frontières, notamment à Hila-Condji du côté du Bénin et Aflao, côté Ghana. Mais dans la pratique, les passages poreux ont été multipliés par les militaires chargés de la protection des frontières. Des milliers de personnes traversent chaque jour dans un sens comme dans l’autre, moyennant paiement d’un montant. Nous l’avons dénoncé à plusieurs reprises. Et si rien n’est fait, c’est que Faure Gnassingbé et son équipe en profitent. Ce sont des millions de francs CFA qui sont collectés chaque jour.
La principale mesure qui profite à Faure Gnassingbé est l’Etat d’urgence sanitaire. La prise de cette décision a coïncidé avec les soubresauts politiques nés de la réélection contestée pour un 4ème mandat. Avec les restrictions qui y sont inscrites, Faure Gnassingbé a pu souffler, ayant obtenu l’aval des députés pour gouverner par décrets. Et cela dure depuis deux ans. La singularité, c’est que dans la sous-région ouest africaine, le Togo demeure le seul pays dont les dirigeants s’accrochent à l’Etat d’urgence sanitaire comme à une bouée de sauvetage. On en a profité pour embastiller le maximum de voix discordantes, journalistes et responsables politiques y compris. Aujourd’hui, bien que le gouvernement ait réussi à inoculer le vaccin à nombre de Togolais, et que l’on déclare « fermés » les centres de prise en charge, faute de patients, on maintient encore en place l’Etat d’urgence sanitaire. La raison : les règlements de compte aux adversaires politiques ne sont pas encore terminés.
G.A.