Le vrai enjeu dans l’échiquier politique en Côte d’Ivoire est de voir si les trois dinosaures, à savoir Henri Konan Bédié, Alassane Ouattara et Laurent Gbagbo autour de qui, la vie des citoyens ivoiriens s’est jouée depuis plus de trente ans, accepteraient volontairement de renoncer en 2025, à leur course habituelle vers le fauteuil présidentiel.
Je suis bien sûr de ceux qui pensent qu’ils se doivent, au regard de leur âge, de leur rendement très relatif, de la guerre qui ponctue leur lutte pour ce fauteuil et de l’étouffement que leur présence opère sur les aspirations légitimes des jeunes cadres de se faire eux-aussi la main dans la gestion du pouvoir politique, d’y mettre un terme et souffler eux-mêmes un peu, avant leur rappel un jour à Dieu.
Mais en prenant simplement une grâce présidentielle en lieu et place d’une amnistie, le Président Ouattara a décidé, délibérément, de mettre fin à toutes les prétentions politiques que pourrait encore nourrir Laurent Gbagbo.
La grâce en effet, n’efface aucunement la condamnation, et ainsi à vie, il sera noté dans le casier judiciaire de Gbagbo, qu’il fut un condamné, qui n’a eu de salut que grâce à un acte”généreux ” du président Ouattara.
Cela dit, le président Gbagbo se présente aujourd’hui comme un handicapé politique fortement limité dans ses mouvements comme dans ses actions, même si ses rentes viagères, confisquées depuis pratiquement douze ans, lui seront désormais versées.
Or, pour être juridiquement rigoureux, son acquittement par la Cour Pénale Internationale devrait entrainer de fait, l’effondrement systématique de toutes les décisions juridiques intérieures obtenues à l’arrachée, sous l’effet évident des manœuvres politiques.
Que les observateurs se souviennent en effet, que c’est lorsque le procès de Blé Coudé et de Gbagbo patinait à la Haye, avec une évidente difficulté de l’accusation à assumer les débats, que le pouvoir de Ouattara, pris dans ses propres cordes, a précipitamment initié une procédure au plan interne ayant abouti à ces types de condamnations qui piétinent de fait, le principe sacrosaint de NON BIS IN IDEM, bien connu de tous les acteurs de droit.
Voilà qui conforte en vérité, la thèse de théâtre qui caractérise l’activité politique dans nos pays. Sans aucune espèce de sincérité, sans aucun engagement rigoureux pour la cause qui élève, les acteurs politiques, dans nos pays, versent plutôt dans du dilatoire, des manœuvres de diversion et de digression avec en seule toile de fond, la conservation ou la conquête sans retenue du pouvoir.
Dans un tel contexte, la perspective d’un investissement massif en terme d’énergie, de volonté, du temps et des moyens dans le processus de construction de nos sociétés, ne peut qu’être un leurre, presqu’à vie, si rien de déterminant ne change dans les habitudes de pensées, de vie et d’action de ceux qui ont la prétention de nous gouverner.
Luc Abaki
Merci pour cet éclairage. C’est dommage pour nos chefs d’État qui ne pensent et ne respirent que pour la conservation de leur pouvoir arraché au prix de massacres, d’assassinat et de tripatouillage des constitutions. Dommage pour l’Afrique…Pendant que Alassane Ouattara faisait semble de jouer à l’apaisement en recevant les présidents Bédié et Gbagbo, l’idée machiavélique cachée derrière tout ceci est contenue dans son discours à la Nation du 06 aout: pas de prisonniers politiques libérés (seulement 2 sur une centaine!), pas d’amnistie politique (Qui aurait pu remettre le compteur politique à zéro pour tous y compris pour lui-même; on attends toujours l’audition et l’inculpation des partisans de ce même Ouattara durant la crise poste éléctoral!). Rien de tout cela. Quelle vermine ce Monsieur Ouattara! Quelle indécence! Quelle honte pour l’Afrique.