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Cité au Quotidien : Où sont les champions de la democratie et des droits de l’homme ?

6 novembre 2022, les partisans de Paul BIYA ont célébré le 40 ème anniversaire de l’accession de leur champion au poste de président de la République du Cameroun. On pouvait attendre un tollé de protestations de la part des nombreux tenants de la démocratie, pays comme groupes, mais non, cela s’est passé apparemment sans trop de polémiques.

Pourquoi ? Est-ce parce que ceux qui militent depuis si longtemps pour le changement se sont découragés ou résignés ? Sûrement pas puisque Paul BIYA continue à réprimer toute opposition, ce qui signifie que cette dernière existe. Ne serait-ce pas plutôt parce que tous ceux qui se déclarent facilement champions de la démocratie, passent ensuite difficilement à des actions en faveur de la démocratie ? Finalement la vraie question qui se pose est celle-ci : où sont les champions de la démocratie et des Droits de l’Homme ?

Ainsi, aux États-Unis, pays dont la Constitution, entrée en vigueur depuis le 21 juin 1788, est donnée en modèle, le 6 janvier 2020, l’assaut est donné au Capitole, où siégeait le congrès américain, par des partisans de Donald TRUMP. Pour un certain nombre de Togolais, cela ne rappelle-t-il pas l’épisode de la fuite forcée des membres du Haut Conseil de la République en décembre 1991 ? (Le HCR, un organe issu de la conférence nationale, avait notamment pour mission l’élaboration d’une nouvelle Constitution). Ce qui s’est passé le 6 janvier 2020 à Washington, constitua pour beaucoup une attaque de l’un des symboles forts de la démocratie américaine mais après l’émotion des premiers moments, aujourd’hui le même Donald TRUMP, qui a incité les siens à cette attaque, s’exprime tranquillement sur les médias et prévoit même de briguer encore une fois les suffrages des Américains pour la présidence en 2024.

Au Conseil de Sécurité, les États-Unis et ses alliés ont bloqué, ces derniers jours, une enquête dans laquelle serait impliqué, en Ukraine, le fils du président américain Joe BIDEN.

Où sont donc les champions de la democratie et des droits de l’homme ?

De la même façon en France, pourquoi s’étonner ou s’indigner, lorsque le jeudi 3 novembre 2022, lors d’une question au gouvernement sur les migrants, le député de La France Insoumise Carlos Martens BILONGO a été interrompu par les propos du député Grégoire de FOURNAS du Rassemblement National: « Qu’il(s) retourne(nt) en Afrique !». Pourtant de tels propos et même pire encore, circulent dans les stades, sur les réseaux sociaux sans que leurs auteurs ne soient inquiétés.

Où sont donc les champions de la democratie et des droits de l’homme ?

Le 9 novembre 1989, lors de la chute du mur de Berlin, beaucoup se sont réjouis, dans le monde entier, de la destruction de ce symbole de la bipolarisation du monde mais surtout du rétablissement de la liberté de circulation pour les Berlinois. Mais aujourd’hui qui s’inquiète du mur d’un peu plus de 1 000 km (sur 3 144 km de frontière) qui sépare les États-Unis et le Mexique, pour contrôler l’émigration vers les USA ? Mais surtout qui sait que la plus grande partie du mur a été construite sous George W. BUSH, Bill CLINTON et Barack OBAMA, dès les années 1990. Donald TRUMP, lui, il a juste promis son extension et son renforcement.

Et qu’en est-il de la “barrière de séparation” en Cisjordanie ? En fait c’est un mur de huit mètres de haut et long d’environ 700 km. Cette barrière construite sur une des terres, les plus fertiles, pourrait avoir un impact négatif sur l’économie palestinienne, mais surtout elle a divisé des familles, elle empêche un libre accès aux services de santé, notamment pour les enfants, et entrave le libre accès aux lieux saints, tant pour les musulmans que pour les chrétiens de Cisjordanie. Pour un grand nombre d’agences des Nations Unies et d’experts internationaux, le mur constitue donc une violation du droit des Palestiniens à l’autodétermination, au contrôle de leurs ressources naturelles, à la famille, à la libre circulation, au travail, aux soins et à l’éducation, à tel point que certains ont parlé d’Apartheid [néologisme afrikaans (langue des colons sud-africains dérivée du hollandais) qui veut dire : « séparation ». Il dérive d’un mot d’origine française, « apartité »]. Finalement ce mur non seulement restreint la circulation, mais rend difficile les négociations de paix pour un vivre-ensemble des deux communautés israélienne et palestinienne.

Où sont donc les champions de la democratie et des droits de l’homme ?

De fait, notre objectif n’est pas pour l’heure de prendre position dans ce qui se passe en Israël ou aux États-Unis, mais que les citoyens africains disposent suffisamment d’informations pour savoir sur qui compter en vérité. En effet, ce n’est pas la candidature de Donald TRUMP qui pose problème ; en fait ce qui est étonnant c’est que la moitié des citoyens américains dont des personnes d’origine afro-américaine, le soutient. De la même manière il n’y a pas que des Blancs qui militent dans le parti de Grégoire de FOURNAS, le Rassemblement National !

Et les racistes qui continuent la théorie du grand remplacement en France à propos de l’accueil des immigrés qui viendraient ôter le pain de la bouche des Français, que pensent-ils de la proposition du gouvernement Macron concernant les “métiers en tension”, métiers où on a du mal à recruter ?

Selon une enquête faite en 2022, les métiers d’aides à domicile et d’aides ménagères connaissent les plus fortes tensions, avec 85% d’employeurs qui peinent à recruter. Le métier d’infirmier arrive juste derrière, avec environ 81%, suivi des conducteurs de transport en commun sur route (80%), des plombiers et chauffagistes (77,6%), puis des chefs cuisiniers (76,43%) et des assistantes maternelles (76%). “Nous souhaitons, tout particulièrement dans les métiers en tension, comme ceux du bâtiment, que le travailleur immigré en situation irrégulière puisse solliciter la possibilité de rester sur le territoire sans passer par l’employeur, a expliqué Olivier DUSSOPT, Ministre du travail.”

Si cette mesure se met en place, dans quelques années y aura-t-il des champions des Droits de l’Homme qui défendront les immigrés qui occuperont les postes dans ces secteurs ? Pour l’heure, cette mesure, même non appliquée devrait amener les Africains à se demander : Qui a besoin de qui finalement ?

En tous les cas, pour ce qui nous concerne, nous Africains, il faudrait que nous cessions de nous tourner vers les pays qualifiés à cause de l’histoire de “patries des Droits de l’Homme et de la démocratie” pour résoudre nos problèmes quant à la reconnaissance de la dignité de tout être humain. Car ce n’est pas la nationalité qui fait le tenant des Droits de l’Homme, qu’il soit responsable politique ou simple citoyen, c’est un choix de vie, un choix militant.

Par conséquent, le citoyen a le devoir d’aller au fond des choses, de s’informer le plus possible et de recourir à des analyses approfondies avant de prendre position sur tel ou tel problème, avant de se tourner vers tel ou tel recours.

Voici un exemple pris dans nos réalités quotidiennes. Il y a quelques semaines, le 18 octobre 2022, à Agoè, un grave accident de la circulation a coûté la vie à une maman ramenant des enfants de l’école sur une moto. On a beaucoup parlé du conducteur de poids lourd qui a écrasé cette personne, on s’est indigné ! Mais s’est-on interrogé sur la circulation des poids lourds dans notre capitale en même temps que les piétons, les deux roues, les tricycles et les voitures ? Certains se sont quelque peu étonnés de l’apparente imprudence de la maman. Mais ces personnes ne voient-elles pas le nombre de plus en plus impressionnant de jeunes mamans le matin et le soir, sur une moto avec un enfant au dos et deux autres sur la moto ? Croient-elles que si ces mamans avaient le choix, elles transporteraient ainsi leurs enfants de manière aussi dangereuse ? Si elles étaient moins pauvres ?

Et le transport des enfants entre l’école et la maison serait-il aussi dangereux si on avait aménagé des pistes cyclables et si on avait mieux pensé les transports en commun dans la ville de Lomé ?

Et si les parents avaient trouvé dans leur environnement immédiat des écoles satisfaisantes, du point de vue pédagogique, seraient-ils obligés d’inscrire leurs enfants dans des écoles éloignées de leur domicile ? Du coup comment est respecté le droit de tous à une éducation de qualité ?

Où sont donc les champions de la democratie et des droits de l’homme ?

En définitive, de cet accident, on a beaucoup parlé puis c’est retombé au niveau où on l’a traité : un fait divers. Mais l’analyse montre que ce n’est pas un fait divers.

Oserons-nous rappeler encore une fois aux intellectuels que c’est leur devoir de procéder à ce type d’analyse, de le faire savoir aux gouvernants et d’en faire bénéficier tous les autres citoyens ? L’aspiration à un mieux-être dans notre pays et sur notre continent doit être vraiment prise en compte et sa réalisation ne peut plus attendre.

Maryse Quashie et Roger Ekoué Folikoue
[email protected]
Lomé, le 11 novembre 2022

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