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Togo- Cité au quotidien: Les vœux, toute une pédagogie

La dernière fois où nous avons partagé nos réflexions avec vous, nous avons expliqué comment se fixer des objectifs, pousse à changer dans son présent ce qui doit l’être en vue de la réalisation de ces objectifs.

Si nous appliquons cette logique aux nombreux vœux que nous avons échangés depuis trois semaines maintenant, nous rendons-nous compte de ce à quoi nous nous sommes engagés en formulant des souhaits à l’attention de toutes les personnes que nous avons rencontrées ?

En début d’année, on entend très souvent dire « La santé avant tout ! ». Une question se pose alors : que ferons-nous pour que la santé de nos concitoyens devienne une priorité ? Après un tour dans les structures sanitaires, il est difficile d’établir un bilan satisfaisant à la vue des longues et interminables files d’attente, des difficultés des familles, de patients à se procurer des médicaments, de la surcharge de travail des professionnels de la santé, etc. Mais, ce qui est le plus frappant c’est ce qu’on découvre lorsqu’on rend visite aux familles : la santé est-elle une priorité pour elles ? La plupart des citoyens le voudraient bien mais la pression de la lutte pour la survie quotidienne ne leur en laisse guère le loisir.

De fait, ils ont peur de la catastrophe que serait pour eux un ennui de santé important d’un membre de la famille et certains expliquent que c’est dans ce sens qu’ils se souhaitent mutuellement une bonne santé, sinon, sans cette santé, tout serait bouleversé dans les familles.

Cependant, lorsque nous souhaitons la santé avant tout à quelqu’un, à qui laissons-nous la responsabilité de travailler à la réalisation de ce souhait ? Pour les croyants, au Créateur ? Oui bien sûr. Mais va-t-il faire cela tout seul ? Nous connaissons tous le proverbe togolais qui dit qu’il faut faire un effort pour poser sa charge sur ses genoux avant de demander de l’aide pour la poser sur sa tête. Ainsi, qui d’entre nous ne sait pas que les légumes qui constituent la base de notre alimentation, adémè et piment par exemple, sont cultivés avec des engrais ?

Où sont alors les citoyens scientifiques et nutritionnistes, les organisations de consommateurs qui se donneront comme tâche cette année d’informer sur la nocivité ou l’innocuité de ces engrais ? Où sont les acheteurs qui attendent cette information et ne se laissent pas seulement guider par les couleurs chatoyantes et la taille de ces légumes aux engrais, ces acheteurs qui continuent à acheter les autres légumes moins beaux mais plus sûrs ?

Où sont les personnes qui achètent des légumes dit bio et qui luttent pour que ces légumes soient accessibles à tous? Et, si nous ne faisons pas partie de toutes ces personnes, quand on découvrira que la consommation des légumes aux engrais est à la source de tel ou tel ennui de santé, nous tous, qui avons dit à nos frères et sœurs « la santé avant tout ! », pourrons-nous affirmer que nous avons ainsi fait notre part pour que la santé devienne une priorité pour tous ?

De la même manière, nous souhaitons « la paix ! » à nos concitoyens. Et c’est une bonne chose. Mais on constate, qu’en 2022, notre sous-région est sous tension. Nos vœux pour 2022 se sont-ils réalisés ? Certainement pas. Alors nous sommes obligés de nous demander si nous avons fait notre part. Sinon ceux pour 2023 ne se réaliseront pas non plus.

Oui, nous ne vendons pas des armes mais n’avons-nous pas le devoir de nous informer sur les sources de ces conflits et de chercher une réponse à la question fondamentale sur le vivre-ensemble dans l’harmonie des différences ? Les différences ethniques, politiques et religieuses sont-elles vraiment des obstacles à un vivre ensemble harmonieux ? Et si des universitaires, qui ont souhaité la paix à leurs compatriotes en cette année 2023, organisaient une rencontre pour débattre ensemble de la question du vivre-ensemble et de l’avenir de notre continent ?

Et si on commençait par la recherche des informations d’ordre historique sur la rencontre de notre continent avec l’Occident sur tous les plans en particulier politique, économique, culturel et surtout religieux ? Cela n’aiderait-il pas surtout à dénouer l’imbroglio actuel dans lequel nous nous trouvons avec des termes comme djihadisme, terrorisme, islamisme etc .?

Nous pourrions aussi nous interroger sur le vivre-ensemble au quotidien entre fidèles de diverses religions, sur la tolérance ou l’intolérance, sur les préjugés et le regard posé les uns et les autres au nom de la religion ou au nom de nos appartenances politiques. Lorsque nous aurons mené l’une ou l’autre de ces actions, alors, et tant d’autres initiatives, impossibles à citer ou à décrire ici, peut-être pourrions-nous nous souhaiter la paix les uns aux autres en ayant fait une partie du trajet sur le chemin de la paix. Le vivre en paix ne proviendrait-il pas de l’acceptation de l’autre dans sa différence ?

Avant on citait aussi « la prospérité ! » parmi les vœux de début d’année, maintenant on va directement au but en souhaitant « beaucoup d’argent » à ceux à qui nous voulons du bien.

A quoi servent ces vœux répétés d’année en année sans notre engagement ?

L’ONG OXFAM a publié le 16 janvier 2023, un rapport intitulé La loi du plus riche. Ce rapport, sorti le jour de l’ouverture du Forum économique mondial à Davos, en Suisse, (ce forum réunit des patrons de multinationales, des oligarques, des banquiers, de puissants responsables politiques et des intellectuels du monde entier) donne les informations suivantes :

. Les 1 % les plus riches ont accaparé près des deux tiers des 42 000 milliards de dollars de nouvelles richesses créées depuis 2020, soit près de deux fois plus que les 99 %restant.

. La fortune des milliardaires augmente de 2,7 milliards de dollars par jour alors même que les salaires de 1,7 milliard de personnes ne suivent pas le rythme de l’inflation.

. Un impôt allant jusqu’à 5 % sur les multimillionnaires et les milliardaires du monde entier pourrait rapporter 1 700 milliards de dollars par an, soit une somme suffisante pour sortir 2 milliards de personnes de la pauvreté.

Si on ajoute à cela le fait que, d’après la Banque Mondiale, l’extrême pauvreté a augmenté en 2020 pour la première fois en 25 ans alors que parallèlement, l’extrême richesse a augmenté de manière spectaculaire depuis le début de la pandémie, alors à quoi bon souhaiter que les plus pauvres deviennent un peu plus riches, un peu moins pauvres si nous ne faisons pas nôtre le combat pour la justice sociale ?

Ne serait-il pas temps de réfléchir sur le type de société dans lequel nous voulons vivre pour qu’il y ait moins de pauvres ? Ne serait-il pas temps de montrer qu’un autre rapport à l’argent permettra de l’utiliser comme moyen d’assurer le bonheur du plus grand nombre, plutôt que l’extrême richesse d’une toute petite minorité ?

Forts de tout cela, ne commencerions-nous pas à nous souhaiter les uns aux autres plus de justice et moins d’inégalités ? Et nous soumettant désormais à cette pédagogie des vœux qui nous engage à nous mettre en mouvement pour la réalisation de nos souhaits, ne croyez-vous pas, frères et sœurs, que le monde se mettrait à changer dans le sens de nos vœux de début d’année ?

Que 2023 devienne l’année de réalisation de nos plus ardentes espérances pour la justice et la solidarité !

[email protected]

Lomé, le 20 Janvier 2023

Maryse Quashie & Roger Folikoué

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